Amour à la philo

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Et j'avais gagné le droit de la raccompagner. Tout comme elle avait décroché un droit de séjour au cité de chez mon cœur. Et dans ma tête dansaient des mots les plus doux du monde, un élan que jamais rien ne peut égaler, et dont la douceur me chatouillait, depuis le fin fond de mes entrailles et où remuaient certains je ne sais quoi, dont je fus tout ému.

Ce que je te dis là fut la poésie que me dictait toute sa personne:

Quand j'ai posé le regard sur elle
J'ai alors cru l'idée à laquelle
Le cœur pouvait avoir des yeux.
Ô grâce nimbée d'une splendeur de Dieu !
Mon cœur à senti la secousse
Lorsqu'à l'aurore de ma vie, Ô ma destinée
La splendeur en l'or de ses yeux s'est dessinée
Une putain de frousse
Qui me traverse le corps tout au long
Quand j'entends mon démon coeur en décibel
Passé de zéro à cent, à la vitesse du son
Si douce et si belle !
Ô élan de mon cœur fou de bonheur !
A la cadence des battements de son cœur
Ma vie a trouvé son rythme.
Sa voix au pays de chez ma personne
Telle la plus douce symphonie qui klaxonne
Retentie en éternel hymne.

Et tandis qu'au summum de la rêverie je demeurais exalté,

Je suis désolée pour tout à l'heure, me disait-elle.

Et j'ai cru saisir que quelque chose avait changé chez elle. On eut dire que ce n'était plus la meuf avec qui j'ai eus un accrochage depuis tout à l'heure. Je ne pouvais deviner quel vent avait soufflé sur ses flancs. Peut-être que cette mielleuse brise du printemps s'était implantée en elle.

Elle était passée de la fille hargneuse à la fille délicate. Elle était passée de la demoiselle écœurée à la demoiselle pleine de cœur. Elle était passée de la femme inflexible à la femme pleine de sensibilité.

Je la vis tout de suite sur son visage. Il y a de ces impressions qu'on ne peut pas cacher. Elle était troublée, envahie, possédée d'une passion qui faisait tressaillir ses tripes.

Et je répondis :
Ça ne fait rien.

•Ne me répond pas ainsi, si non je vais attraper mal...

•Moi : Quoi ! De toutes les façons, tout le monde a cette opinion de moi.

•Pourquoi tu accordes aussi peu d'intérêt à ton image ? Tu te fiches donc de ce que les gens pensent de toi ?

•Moi : On perd du temps et de l'énergie en essayant de prouver notre valeur. Car notre société est telle qu'on se focalise sur les défauts des autres et on oublie ses vices. On fait apparaitre les erreurs des autres et on laisse taire ses fautes. On n'oublie que la perfection n'appartient pas à l'être humain ; et que si tout un chacun se faisait soi- même, alors nul n'aurait de défaut. Imagine alors ce que serait le monde ?

•Un monde où tout un chacun est parfait serait un monde où chacun se suffit à lui-même. On aurait besoin ni d'ami, ni d'amant, ni frère et ni de sœur. La notion de famille disparaitrait et la société avec elle.

•Moi : Ce que les gens devraient comprendre, c'est que tout comme Dieu a créée l'ombre et la lumière, la nuit et le jour, pour l'équilibre de la nature; il a aussi inculpé à l'homme des qualités et des vices. D'ailleurs, le bouddhisme nous enseigne que le Ying et le yang cohabitent en chacun de nous. Et même si notre côté noire prédomine, cela ne veut pas dire qu'on est naturellement mauvais. On ne devient pas quelqu'un de meilleur, on est naturellement bon.

•Pour une fois on est d'accord. Mais «L'enfer est pavée de bonne intentions !»

•Moi : C'est comme toi qui à première vue donne l'impression d'être la femme insolente, renfrognée, celle qui abomine les hommes... mais pour qui sait lire le fin fond de ton regard, de tes pensées, comme moi j'ai la facilité à ce genre d'exercice ; je peux voir que tu baignes dans une rivière de compassion et que...

Par ces paroles, elle me coupa :
Ne te fie pas aux apparences, certaines vérités sur ma personne pourraient bien te choquer.

Et sa voix aigüe devenait rauque. Les «r» ronronnaient dans sa bouche. Elle devenait tout à coup anxieuse.

Tu peux t'arrêter ici, c'est un plaisir d'avoir passé un instant en ta compagnie.

•Moi : Au faite, j'avais dit que je t'accompagnais jusqu'à chez toi et je ne vois aucune maison sur ces prairies.

•C'est toi qui n'a pas saisi ! Est-ce que tu es toujours aussi borné ou ton obsession des meufs t'aveugle au point de ne pas voir que ta vie est en péril ?

•Moi : Ma vie en péril ! Parce que j'ai eu la galanterie de raccompagner une jolie fille jusqu'à chez Elle. A moins que tu ne soies mariée ?

•Merci d'avoir un si haut estime de moi ! Tu penses que si j'étais mariée, je trainerai jusqu'à une heure pareille sans mon époux ? Je te suis très reconnaissante de m'avoir raccompagné, maintenant tu peux y retourner.

•Moi : Désolé si je t'ai offensé !

•T'en fais pas ! Maintenant vas, c'est dangereux là où tu traines.

•Moi : Dangereux pour moi et non pour toi ! Heu, c'est moi l'homme ici.

•Tu penses avoir des couilles, bientôt tu songeras à les sauver.
Putain, ils sont déjà là !

•Moi : Qu'est-ce que tu racontes ? Qui sont là ?

•Les mangeurs d'âme ! Dit plus rien, shut !!!

Elle frissonnait terriblement. Je la tins la main, et ça devenait de plus en plus palpitant. Elle tremblait, aussi légère qu'une feuille d'arbre. Je m'arrêtais alors de marcher ; et elle avec moi. Je la tins l'autre main. Nous faisions face à face. Elle marchait ensuite à reculons, comme par instinct. Et machinalement, je la suivais. Soudain, elle trébucha. Et je la retins de justesse. Nous nous retrouvâmes enlacé l'un contre l'autre. Mon bras droit longeait ses côtelettes jusqu'à son omoplate gauche. Son bras à elle, était autour de mon cou. Et ma main gauche était juste au-dessus de ses hanches. Les deux bouts de nos nez s'effleuraient à peine, on se redressait ensuite ensemble, comme cela se fait en danse classique.
Mes yeux enfuis dans ses yeux larges et effrontés, des yeux limpides, on eut dire du blanc d'œuf, avec des prunelles noires, d'un noir ébène, me coupait le souffle. Tout à cet instant paressait harmonieux et mirifique.

Soupirs d'un SoirWhere stories live. Discover now