Dans la gueule du loup

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•Okay, tu as gagné. Je veux bien le faire, si tu m'aides bien sûr.

•Moi : Je t'aiderai bien volontiers, si tu me dis ce que j'ai à faire et que cela soit en mes cordes.

•Bah c'est simple, on va chez moi, je me change et tu m'accompagnes chez lui.

•Moi : Si ça peut te faire plaisir, je n'y vois pas d'inconvénient.

Par ces mots, nous devînmes tout de suite complices, mieux encore, nous devînmes tout de suite des amis. Je me sentais bizarre tout de même. Bizarre et dans une perplexe complexité. Allons, pourquoi ne pas l'avouer tout de suite puisqu'il ne coute rien d'être honnête. J'étais heureux d'aider ma nouvelle amie, mais une sensation de cupidité venait se mêler à mon impression juvénile... comment vous expliquer ça encore... voilà, j'étais jaloux. C'est vrai ! Il n'y a rien d'égocentrique en moi, mais cette meuf, je l'aurai bien voulu pour moi, et pour moi seul d'ailleurs. Je me sentais tout de suite lier à elle, comme l'avare et sa cassette...

Mais quand même, une croqueuse d'homme ! J'avoue que c'est loin d'être ce que je m'étais imaginé, et même très loin d'ailleurs. Du moment où elle m'a fait part de cela, j'ai perdu toute ma maitrise de la situation. Je suis partis jusqu'à l'offrir œuf sur le plat à un autre mec. Et maintenant j'allais me jeter tout droit, dans la gueule du loup en me rendant chez elle. Au bout du compte, je pense que je ne suis pas aussi intelligent que ça.

***

Je me suis souvent imaginer au stade de ma vie où je serais vieux, la barbe grisonnante, tantôt perdu au milieu d'une savane entrain de spéculer à l'absurdité de la vie, tantôt pris au piège autour d'un cercle, baignant sous le regard innocent de mes petits-enfants, leur contant les grandes escales de mon voyage fabuleux...

Mais ce Soir-là, je n'étais ni perdu au milieu d'une savane, ni baignant sous le regard innocent de mes petits-enfants : j'étais perdu au fond d'un purgatoire dans lequel je ne soupçonnais pas d'être entré et je me voyais baigner dans une grande marmite bouillonnante et pleines d'épices.

Il parait que quand on est sous le point de mourir, on voit toute sa vie défiler
sous ses yeux. A moins que ça ne soit le fait que je n'y sois pas resté ce Soir-là, moi j'acquiesce que c'est faux. Car j'ai frôlé la mort du bout des doigts, et tout ce qui m'est traversé l'esprit, ce fut les scènes les plus bouleversantes de ma vie. J'ai vu les véritables instants de purs bonheurs, j'ai vu mes bonnes actions de grâce et d'autres dont je suis loin d'être fier, mais par-dessus tout, je me suis senti mélancolique et rongé de remords.

Et maintenant que je pressentais une mort prochaine, je ressentais à l'intérieur de chez ma personne une sorte de tempête violente, comme celle causée par la rencontre de plusieurs vents qui forment des tourbillons, je ressentais un ouragan de tristesse.

Puis la seule chose qui résonnait en moi c'était: Survivre !

La seule solution fut qu'elle soit amoureuse de moi et éperdument. C'était possible ! L'ennuie c'était l'autre type... et je comprenais pourquoi on laisse dire que l'enfer c'est les autres.
Mais nous partîmes quand même chez elle.
Nous ne marchâmes pas beaucoup. Ensuite on s'arrêta devant une porte. Elle composa un numéro sur son téléphone portable. Une jeune femme ouvrit. Nous entrâmes.

Attend moi, j'en ai pas pour longtemps, me dit-elle.

•Moi : Vas-y, je t'en prie...

J'attendais au salon. Elle prit vingt bonnes minutes pour se rechanger.

Mais tandis que j'attendais dans ce salon aux alentours pittoresques, sur une vieille chaise en dessous des rayons d'une bibliothèque était assise une dame qui, à mes yeux apeurés, me parut aussi vieille que la vieille lune.
A peine eut-je pénétré dans ce salon et que j'aperçu cette dame, je ressentis tout à coup le tremblement nerveux des grandes secousses morales. Je frissonnais d'anxiété de par toute ma personne et m'abimais soudains en des invocations puissantes:

«Allah! Point de divinité à part Lui, le Vivant, Celui qui subsiste par lui-même. Ni somnolence ni sommeil ne Le saisissent. A lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Qui peut intercéder auprès de Lui sans Sa permission? Il connaît leur passé et leur futur. Et, de Sa science, ils n'embrassent que ce qu'Il veut. Son Tone déborde les cieux et la terre, dont la garde ne Lui coûte aucune peine. Et Il est le Très Haut, le Très Grand...»

Puis, comme il fallut que nos regards se croisent, je sentis dès ce tout premier accrochage mes cheveux se dresser sur ma tête. Alors commença un échange de regards des plus terrifiants entre celle qui semblait être la vieille sorcière par excellence et moi. Mes prunes vacillaient entre la dame et une hache posée juste à quelques portées de ma main. La hache luisait à fendre la tête d'un bœuf d'un seul coup. Pour la première fois de ma vie je songeais à tuer, vraiment. Pendant cinq minutes entières je fus anéanti ; je ressentais en moi comme un écroulement, mais ce qui me préoccupait le plus, c'est que j'ignorais absolument de quelle façon l'envouteuse d'âme et moi-même pourraient sortir de nos positions respectives. Je restais figer et alerte, attentif au moindre geste de la vieille, qui du reste ne se fit pas longtemps attendre.

Soupirs d'un SoirWhere stories live. Discover now