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J'étais assis sur un banc, le long d'un chemin de cailloux. Devant moi des enfants se bagarraient dans la boue, en rigolant, comme si rien ne pourrait leur arriver. Les mères criaient au loin, essayant vainement de les arrêter dans leur fou rire. Les mains au fond de mon sweat orange, j'admirais leurs sourires. Ces lèvres qui s'étiraient doucement dans la brise d'octobre était comme un tour de magie. Ils réchauffaient mon coeur vide et déchiré depuis tant d'années. Fut un temps où je souriais comme eux, l'air de rien. Et puis tout m'a échappé, j'ai tout perdu, la vie m'a tout reprit.

Les corbeaux croâssaient dans les arbres, en un battement ils étaient déjà dans le ciel. Et j'aurais voulu voler moi aussi, toucher les nuages du bout de mes doigts et sentir le soleil brûlé mes joues de cette agréable chaleur incandescente.

Je ne me rappelais pas comment tout avait commencé. Comment j'avais tout perdu, ni comment la vie avait abandonné mes parents. Je ne me souvenais même plus de leur visage, de leur sourire ou bien encore de leur rire.
Je ne me rappelais de rien. Et c'était terrible cette sensation de culpabilité qui pesait sur mon âme en permanence.

Comment étaient-ils ? Comment s'appelaient-ils ? Comment vivaient-ils ? M'aimaient-ils ?

Il y avait beaucoup trop de questions qui planaient au dessus de moi, m'assomant toutes de désespoir.

Ces enfants au bout du chemin, inconscient de la chance qu'ils avaient, n'y même du bonheur qu'ils possédaient. Ces mêmes gamins qui riaient de tout et de rien, ceux là qui gambadaient, heureux. Ceux qui avaient des parents, une famille, un foyer, des amis.

Ils avaient tous, ces gamins.
Et moi, je n'avais rien. Je n'avais, au final, rien de plus qu'un nom et un âge.

Je laissais ma tête tombée en arrière, tirant sur mes cervicales. Mes yeux bleus se plongeaient dans la masse nuageuses, couleur cendre, je discernais les formes de ces cotons grisâtres qui peuplaient le ciel, tels une ribambelle de moutons. Je cherchais, au travers de cette uniformité de gris, un bout de nuage différent. Un comme moi, noir, maigre, qui ressortait comme un parasite dans ce tableau de volupté.

Les heures passaient, les mains enfoncées dans mon pull, je commençais à sentir l'engourdissement de mes membres. Je ne trouvais pas de nuages noirs, ni même un coin de ciel bleu. La température descendait progressivement, lentement et sûrement. Les degrés perdaient de leur chaleur, et le froid transperçait tous les pores de ma peau. Je sentais mon épiderme frissonner et mes lèvres se glacer. Cependant, je ne bougeais pas.

Je n'en avais pas envie. Je me sentais bien, ainsi dans le froid, seul avec mes pensées dans la tranquillité. Je fermais alors doucement mes paupières, me plongeant un peu plus dans les couleurs de ma tête. Je ressassais encore et toujours les derniers évènements. Kiba me manquait, Sasuke me manquait. Le calme de son absence était pesant. Quand il était là au moins, je pouvais m'occuper à retracer ses traits dans ma tête, m'échapper de cette vie pathétique. Quand il n'était pas là, je devais me contenter de l'imaginer.

Perdu dans mes pensées, ce fut la chaleur humain qui me fit revenir sur terre. Je me redressais sur mon banc pourri, sûrement aussi vieux que moi. Je me collais davantage à cette source d'apaisement. Cela devait sûrement être Iruka ou bien Jiraya, personne ne m'approcherait de manière aussi, familière, sans crainte. Je n'avais pas besoin d'ouvrir les yeux, du moins, c'est ce que je pensais.

— Qu'est ce que tu fais assis dans le froid ? Tu vas chopper la mort comme ça abruti.

Ce n'était ni Jiraya ni même Iruka. Non cette voix, rauque et grave. Ce ton cinglant et tranchant, avec une pointe d'ironie, ou bien de sarcasme ; ne pouvait appartenir qu'à Sasuke. Je me collais encore à lui, beaucoup trop heureux pour pouvoir enchaîner quelques mots, ils restaient coincer dans ma gorge. Je profitais de cette chaleur que je n'avais encore jamais sentie. Et elle était, vraiment très agréable. Le silence revint, sûrement attendait-il une réaction de ma part. Ne comprenait-il pas que le simple fait qu'il soit là me faisait me sentir moins seul ? Sasuke m'acceptait, cela me suffisait. Je n'avais pas envie de parler et de risquer qu'il se fâche et m'abandonne. Je ne voulais pas être de nouveau seul.

— On dirait un molusque Naruto. Une moule accrochée à son rocher.

Je poufais de rire en silence, ce qu'il pouvait être bizarre parfois. Enfin certainement pas autant que moi.

— Sasuke... Est ce que... T-tu aimes les... Les corbeaux ?

Un long et interminable silence me répondit, avais-je dit une bêtise ? Encore ?

— Oui.

Ça voix résonna dans l'air, me perforant la poitrine. Je me rendais compte que j'avais arrêter de respirer. L'air brûla mes poumons et je faillis m'étouffer. La scène devait être parfaitement ridicule : un adolescent tout rouge au bord de la mort, et l'autre non-chalant, attendant patiemment que le dit adolescent recrache ses poumons. Tout ça à cause de Sasuke. Je divaguais loin dans mes pensées, j'en oubliais presque de continuer cette discussion.

— Je... Je voudrais comme eux... Tu sais ; libre... Et... Être fort... Comme toi, Sasuke.

Il ne disait rien, alors je continuais :

— Et maintenant... Sasuke... J'essaierai d'être meilleur... Moins lâche... Moins faible... Moins moi...

Je ne savais pas ce qui l'avait agacé pour qu'il se lève et s'éloigne de moi brutalement. Seulement, voir son dos bien droit, et fier me rejetter, c'était comme passer mon coeur sous la moissonneuse batteuse de Mr. Shikamaru.

— Naruto, n'essais pas, fais le, sans regrets. Un silence passa, avant qu'il ne reprenne la parole :
— À demain, et tâche de trouver quelque chose pour te couvrir, imbécile.

Et il s'en allait, simplement et en silence. Sasuke était souvent rude, voire méchant, ou bien réaliste, je ne savais pas trop. Cependant quand il venait, j'avais toujours le sourire.

Mais quand il partait, mon coeur pleurait.

Au gré du ventWhere stories live. Discover now