20

2.6K 183 96
                                    

Ce matin là, quand je me réveillais, je portais encore le pull noir et épais de Sasuke. J'étais de nouveau dans mon cagibi, mes yeux scrutaient le plafond, et moi j'étais perdu dans mes réflexions. Je me repassais la soirée en boucle dans ma tête : ma rencontre avec Ino, la joie de danser au milieu de la foule, et puis quand je percutais Sasuke, et qu'il m'emmenait loin de toute cette agitation... Ses bras tendres et sa voix suave. Un frisson parcouru mon échine. Son odeur plongeait mes sens dans un déluge de sensations. Je divaguais et l'imaginais un instant à côté de moi, m'observant  en silence. Il passerait sa main dans mes cheveux ébouriffés et me dirait sûrement quelques choses de cinglant sur mes vêtements. Quelques choses comme : « elle est moche la couleur que tu portes ». J'avais vite compris, dans la manière que Sasuke avait de s'habiller, qu'il n'aimait pas les couleurs vives comme le orange. Et si il avait été là, à côté de moi en train de me caresser les cheveux et de médire sur mes couleurs, et si j'avais eu assez de courage, peut être lui aurais-je répondu quelques chose comme « moi au moins j'en porte ».
Seulement, il n'était pas à côté de moi, et je n'avais pas assez de courage.

Dans mon cagibi, alors que le soleil se levait en ce jour funeste de premier novembre, il n'y avait que le froid qui m'entourait ; encore. Le premier novembre, la fête des morts.

Je me levais lentement de mon lit, ayant peur de briser ce silence religieux qui régnait dans tout l'orphelinat. Je me déplaçais en douceur, les jambes engourdies et la tête lourde, en direction de mon armoire. J'avisais alors un très vieux jogging noir troué, puis mon sweat-shirt orange, tout aussi vieux. Puis je jetai un coup d'œil au pull de Sasuke que je portais toujours sur moi : il était bien plus épais que ce sweat, et il avait une meilleure odeur. Je décidais alors de le garder sur moi, c'était un peu comme si Sasuke lui aussi était là. Mes pensées s'égarèrent alors auprès de lui. Nous étions restés une bonne heure collés l'un à l'autre devant l'étang. Il me serrait fort contre lui, et je m'étais inquiété qu'il tombe malade sans pull. Puis je commençai à m'endormir lentement entre les bras du brun. Cependant, il me secoua légèrement pour me faire émerger de cette transe, il me murmura qu'il était peut être temps de rentrer. J'avais acquiescé en silence, déçu de ne pas rester plus longtemps. Il m'avait raccompagné devant mon orphelinat, j'avais voulu lui rendre son pull mais il le refusa. Puis il avait tourné les talons sans dire un mot de plus, pas de « bonsoir » ni même de même « bonne nuit » et encore moi un « à plus ». Juste un départ en silence, il ne s'embarrassait jamais de mots inutiles Sasuke.

Je secouai la tête pour le faire sortir de ma tête, il était 8h04 et je me torturai déjà l'esprit avec son visage.
Les rayons du soleil commençaient eux aussi a émerger. Je m'avançais près de ma minuscule fenêtre et regardait l'aurore se lever. Le ciel couleur d'encre rencontra de vifs fuseaux de lumière orangés. Voilà pourquoi j'aimais tant cette couleur. Le spectacle était incroyable : un contraste entre l'obscurité et la lumière. Je me perdais dans la contemplation de cette œuvre de la nature, quand les pas bourrus de Mme. Shita résonnèrent dans mon couloir, elle ouvrit ma porte brusquement et m'attrapa par les cheveux, sans douceur, m'arrachant à ce spectacle. Une fois à genoux par terre, elle me tira par le col du magnifique pull de Sasuke, comme si je ne pesais rien. Je sentis les coutures du vêtement craquer, et des larmes s'échappèrent de mes yeux. Un énième cadeau abîmé en l'espace de quelques heures, voilà pourquoi on ne m'en offrait jamais : c'était inutile.
Elle me jeta dehors avec virulence, mon dos heurta les cailloux que je sentis s'enfoncer dans ma peau. Des mais se précipitèrent vers moi pour m'aider à me relever. La voix criarde de la gérante tonna dans l'air, telle une sanction :

— Je vous laisse une heure avec ce misérable ! Après quoi il faudra qu'il lave les sols.

La personne derrière moi hocha la tête. Elle me remit debout en un éclair et me serra fort dans ses bras. C'était Jirayia. Il me sourit tristement en me murmurant à l'oreille des mots réconfortants. Une fois calmé et remis de mes émotions, il me prit par la main comme on le fait avec un jeune enfant et me tira sur le chemin en direction du village. Durant tout le trajet il me fit part d'anecdotes rigolotes sur sa femme Tsunade, il se plaignait de son caractère explosif et de sa passion pour la boisson et l'argent. Il me fit rire et c'était agréable. Nous remontions un long chemin de pavés gris et sales, nous ne croisions personne non plus. Ils étaient sûrement tous en train de récupérer de la fête d'hier. Nous arrivions bientôt à destination : le cimetière de Konoha. Mon parrain me guide jusqu'au fond ce lieu sacré où reposaient tous nos morts. Sous un chêne vieux de plusieurs dizaines d'années se trouvaient deux tombes. L'inscription était salis et abîmée par le temps, mais nous pouvions encore déchiffrer quelques mots : « Ici repose Namikaze Minato et Uzumaki Kushina, assassinés par l'enfant démon, paix à leur âme ».

Jirayia se mit à genoux, les mains croisées devant lui. Le silence s'éternisa quelques minutes, avant qu'il ne se relève pour me chuchoter qu'il m'attendait à l'entrée. Moi, je restais là, planté sans rien dire devant mes parents. Cela n'était même pas écrit sur leur tombe. Les habitants de ce village m'avait arracher à mes racines. Ils ne voulaient pas admettre, que j'avais un lien avec cet endroit. Les larmes coulèrent sur mes joues, en silence. Tous les ans je venais ici, le premier novembre. Et tous les ans je ne savais pas quoi leur dire. Les mots restaient coincés dans ma gorge. Je tombais à genoux et pleurait tout mon soûl. Je murmurai des pardons qui se perdaient dans l'air, telle une litanie. Je frappais le sol de mes points. Les gens de ce village, n'avaient-ils donc aucune pitié pour renier l'existence de ce lien entre eux et moi. Je m'effondrais tous les ans, devant ces quelques mots. Pour au final accepter, que d'une certaine manière, ils n'avaient pas torts. Je ne connaissais rien de mes parents. Je ne me souvenais plus de leur visage, de leur rire, de leur voix. Je leur en voulais de m'avoir abandonné, mais je savais que c'était de ma faute. Je les avais tués. À cette pensée je pleurais davantage.

Puis mes pleurs s'asséchèrent, et je restais de longues minutes dans un silence, mon esprit perdu dans un monde lointain.

Je repartais en direction de la sortie du cimetière quand mon regard croisa celui de Mr. Obito Uchiwa, le maréchal ferrant. A ces pieds je perçus Sasuke, ses cheveux cachaient l'ensemble de son visage. Je voulus m'approcher d'eux quand Mr. Uchiwa me fit non de la tête.

Blessé de me faire rejeter, je baissais la tête. Sasuke avait l'air mal et je voulais l'aider, mais visiblement, je n'étais pas le bienvenu.

Une fois de plus.

Au gré du ventWhere stories live. Discover now