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Finalement, on s'est tous endormis dans la pièce aux coussins. On s'y sent plus en sécurité, sans doute l'aspect exigü, et ils sont tout aussi confortables que les matelas du studio. 

A ma droite, Victoire commence à agiter son corps chaud dans de petits spasmes incontrôlés. De l'autre côté, c'est Marius et sa capuche noire. Pour une fois, il semble avoir un sommeil paisible. Ses traits sont décontractés, et je jurerais avoir vu passer l'ombre d'un sourire sur sur ses lèvres. J'espère qu'il fait de beaux rêves, il faudra que je lui en parle demain. 

Je le fixe encore quelques instants. 

Il ouvre brusquement les yeux et réprime un rire moqueur. 

- Tu sais que tu fais vraiment peur ? C'est un rituel chez toi de regarder les gens dormir ? Ou alors c'est mon charisme naturel qui t'hypnotise ? 

Il a commencé en chuchotant, mais parle maintenant presque à voix haute. Je lui mime de baisser d'un ton, et lui décoche mon meilleur regard meurtrier. Je suis sûre qu'il a vu les éclairs sortir de mes yeux, malgré la pénombre. 

Victoire pousse un petit cri dans son sommeil. Je me retourne vers elle. Elle est brûlante. Je passe une main glacée sur son front trempé. Elle se calme un peu, et j'en profite pour dégager son front moite de ses mèches. 

Je jette un regard inquiet à Marius qui fronce les sourcils et hausse les épaules.

-Je devrais la réveiller ? 

-Je ne sais pas. Elle paraît faire un mauvais rêve, mais on est tous tellement fatigué que je ne pense pas que ça soit une bonne idée. On ne sait pas ce qui nous attend demain. 

Victoire s'est un peu calmée. Dans son sommeil, elle a saisi la main de Gabriel, allongé juste à côté. J'espère qu'elle se souviendra de son rêve, et qu'elle pourra me le raconter. Les paroles de Marius résonnent dans mes oreilles. "Ici, rien n'est anodin". Ils contrôlent nos souvenirs, pourquoi ne contrôleraient-ils pas nos rêves ? 

Je suis frappée par une pensée. Je ne rêve pas. J'en suis sûre, je suis incapable de me remémorer un seul de mes rêves. Est-ce possible ?

-Tu rêves, toi ? 

Je m'adresse au sweat noir en face de moi. Il relève la tête, la mine soucieuse. Il a pensé à la même chose que moi. 

-Je ne sais pas, Olympe. Rendors-toi, je surveille Vic.

Tous les voyants lumineux qui s'étaient alertés dans mon cerveau s'éteignent aussitôt et je ne proteste pas. Je manque sans doute encore plus de sommeil que Marius : je n'ai pas l'impression de dormir plus de deux ou trois heures par "nuit", et ça ne me suffit vraiment pas. C'est pourquoi je ne proteste pas et m'endors sur le champ.

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Je suis tirée de mon sommeil sans rêves par un énorme bruit rocailleux à rendre fou le plus stable des hommes. Je sursaute, et écarquille grand les yeux. Je suis incapable de formuler la moindre pensée. Pendant un instant, je ne me souviens même plus d'où je suis. 

Je saute sur mes jambes, et cherche les autres du regard. 

Gabriel est au sol. Il se tord de douleur. Je m'agenouille aussitôt à ses côtés. Je le secoue, prend sa température avec ma main, crie. Seulement, personne ne m'entend. Victoire fait de incessants aller-retours entre la pièce principale et la pièce aux coussins, et Marius semble avoir disparu. La panique me serre la gorge. Il faut que je me calme. 

PerseusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant