Chapitre 11 - Emy

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Je suis en train de préparer silencieusement le dîner, quand ma mère fait une entrée fracassante dans la cuisine. Je n'ai même pas le temps de la saluer, qu'elle s'est volatilisée, et je reste penaude au milieu de la pièce.

- Tu n'as pas préparé à manger ? Mais qu'est-ce que tu fabriques ? s'écrie-t-elle, sûrement depuis le bureau, où mon père range quelques papiers.

- Tu n'avais qu'à arriver plus tôt, si tu n'es pas contente, grogne-t-il. Bonjour, au fait. Moi aussi, je suis heureux de te voir.

Sur le ton purement ironique de mon père, ma mère ne peut s'empêcher de lui rendre la pareille.

- Je n'avais qu'à rentrer plus tôt ? Vraiment, Paul ? Très bien. La prochaine fois, tu pourras te le préparer toi-même, ton repas, conclut-elle. Ne m'attendez pas. Ou devrais-je dire, ne m'attendez plus.

Je pousse un soupir, en retenant ma colère. Pour qui se prennent-ils ? On dirait des gamins de trois ans ! Dans quelle vie, je suis tombée, bon sang...

Les talons de ma mère claquent sur le carrelage sèchement, et elle entre de nouveau dans la cuisine. Ses yeux bleus lancent des éclairs, alors qu'elle a les joues rougies de colère, suite à son altercation avec mon paternel.

- À demain, ma chérie.

Une fois de plus, ses cheveux courts frisés virevoltent dans l'air, et elle ne me laisse pas le temps de lui répondre.

- À demain, maman, murmuré-je, sans qu'elle ne puisse m'entendre.

Oú vas-tu passer la nuit, maman ?

En louchant sur mes mains, je remarque qu'elles tremblent, et que je suis incapable de continuer de préparer le repas du soir. Je prends deux minutes pour respirer, me recentrer sur moi-même, puis je continue de garnir la pizza.

- On mange, crié-je, une heure plus tard, quand la pizza est cuite.

- J'arrive !

La voix de mon frère me parvient, mais pas celle de mon père, et je sais qu'il ne va pas prendre la peine de me donner une réponse.

Chaque soir, c'est pareil. La maison devient aussi silencieuse que lorsque la nuit atteint son plein boum dehors. Seul le raclement des fourchettes et couteaux sur les assiettes est présent.

Mon frère et mon père me laissent débarrasser, et retournent à leurs occupations.

- Putain, soufflé-je, quand un couteau tranche facilement la peau de mon pouce.

Une veste sur les épaules, des Converses aux pieds, et un mot glissé à mon père pour lui dire que je sors, l'air frais me frappe le visage.

La nuit recouvre notre ville d'une enveloppe protectrice, et si l'on ne fait pas vraiment attention, les étoiles sont inexistantes, à cause des lumières artificielles. Mais elles sont belles et bien ici, aussi resplendissantes qu'un sourire éclatant sur le visage d'une personne.

Mon téléphone vibre dans ma poche, mais je décide de l'ignorer. C'est sûrement ma mère, qui me souhaite une bonne nuit.

Un léger vent prend place dans l'atmosphère, et je profite de cette bouffée d'air pour respirer fortement, comme pour me laver les poumons de l'air colérique qui plane entre mes parents, et que je reçois en pleine face depuis des années.

Les étoiles semblent me regarder, de leur milliers d'yeux, comme si elles voulaient me dire quelque chose, que je ne pourrais jamais comprendre. Je souris, sans en connaître vraiment la raison.

Quelques mètres plus loin, je me retrouve dans le parc de la ville, en pensant à ma grand-mère. Je suis persuadée qu'elle aurait aimée venir en ma compagnie. La nuit était sa plus grande alliée.

Je m'assois sur un banc, aussi frais que l'air que je respire.

La lune produit une lumière naturelle impressionnante ; à croire que celles de la ville ne servent pas à grand chose. On pourrait presque voir d'ici, les cratères formés sur la lune.

Je détourne soudainement le regard de cette dernière, avant de le poser sur les étoiles. Un petit point blanc clignote, et je m'aperçois bien rapidement que ce n'est qu'un avion. Ça doit être beau, la nuit, vue de là-haut. Aucun nuage n'a marqué son territoire, la lumière que dégage la lune me le prouve.

- Ça va ? T'as l'air paumée.

Une voix me parvient, mais elle est tellement loin, que je n'y prête aucune attention.

- Eh, oh !

Des doigts passent devant mes yeux, et je sursaute. Le tête à tête entre la nuit et moi vient d'être interrompu, par quelqu'un. Je ferme mes paupières, et les rouvre lentement, prenant le temps de replonger dans la réalité.

Un garçon de mon âge, je dirais, se tient devant moi, une planche de skate sous le bras. Ses cheveux blonds bouclés retombent de chaque côté de sa tête, s'arrêtant simplement juste au-dessus de ses oreilles. Quand mes yeux croisent les siens, et que je vois son regard d'un gris couleur nuage, je ne peux m'empêcher de me lever.

- Tes yeux ont volé les nuages, brisé-je le silence.

Il rigole, et une fossette apparaît sur chacune de ses joues. Ses lèvres rosées s'étirent doucement.

- On me l'avait jamais faite, celle-là, dit-il.

- Excuse-moi, marmonné-je, en m'asseyant dans l'herbe, sans le regarder une fois de plus.

- Pas besoin de t'excuser. C'était poétique. Elles sont belles, hein ? me demande-t-il tout-à-coup, et je fronce les sourcils, cherchant de quoi il parle.

- Quoi ?

- Les étoiles, murmure-t-il, et je hoche la tête.

Je m'allonge dans l'herbe, qui semble m'accueillir parmi tous les petits brins, qui me chatouillent la nuque. Un brassement se fait sentir, juste à côté de moi, et je devine que le garçon m'a imité.

- J'aime bien venir ici, pour décompresser, chuchote-t-il, dans un souffle.

Son regard se tourne vers moi, mais je décide de ne pas le croiser. Après tout, ce n'est qu'un inconnu.

- Moi aussi, répondis-je.

Plus aucune parole ne se fait entendre, et j'entends quelques bruissements de feuilles, se soulever à cause du léger vent.

- C'est quoi ton nom ? casse-t-il le silence.

- Emy. Et toi ?

- James.

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me tuez pas :-:

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vous êtes full malades, je pleure 😭😭

merci merci et merci !! 😭😭

prenez soin de vous, vous le méritez tous 😭

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