Chapitre 31 - Emy

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Les battements de mon cœur s'accélèrent quand je le vois ici, dans le même état que moi. Puis je me rappelle.

Son père a tué sa mère. Et il est clair que James aime mille fois plus sa mère que son père. Mais était-ce volontaire ? Dans le cas où son père avait bu, ça aurait très bien pu l'être. Comme une autre personne aurait pu mourir à la place de la mère de James. Donc son père a tué cette dernière par homicide involontaire. Et il a menti à James pendant plusieurs années.

- Tu ne viens pas souvent de jour, lâché-je, en me laissant tomber à côté de lui.

- Non, c'est vrai, répond-il. Toi non plus.

- Oui, confirmé-je.

Mes iris se posent dans le ciel nuageux, et je remarque que le soleil est caché.

- Ça va ? me demande James.

- Oui, super. Et toi ?

- Tu n'es pas obligée de me mentir, constate-t-il, et je baisse la tête en me questionnant sur comment il a pu savoir, sans pourtant en trouver de réponse plausible.

- Désolée, m'excusé-je rapidement.

Et soudain, comme si je n'ai plus rien à lui cacher, je lui raconte ce qu'il s'est passé avec Josh, alias mon ancien meilleur ami. Toutes nos années à rire, à faire des conneries, jusqu'à ce jour-là. Et aujourd'hui : plus rien.

- Waouh. Une amitié foutue pour de l'amour. C'est vraiment dommage. Tu as bien fait, me sourit James.

- Je ne sais pas. Quelques fois, je me dis que j'ai été un peu trop dure... murmuré-je.

- Non ! Bien sûr que non ! Si une fille m'aurait fait ça -meilleure amie ou pas- je l'aurais virée de ma vie ! Ton corps n'appartient qu'à toi, ce n'est pas aux autres de décider de ce que tu veux en faire à ta place, me dit-il.

Plus aucune parole ne vient briser le silence qui s'est créé, et nos doigts se trouvent.

- Ma mère est réellement morte, chuchote-t-il, et je comprends aussitôt qu'il n'arrivera pas à faire son deuil de si tôt.

- Pas vraiment, soufflé-je. Elle est juste au-dessus de nous.

Un faible sourire naît sur mes lèvres, alors qu'il pose un bras sur mes épaules, et nous restons comme ça, le temps de quelques minutes, le regard noyé dans le ciel.

- T'es vraiment une fille incroyable.

Mon sourire s'efface.

- Je ne crois pas.

- Pourquoi ? m'interroge-t-il.

- Je... je ne suis pas belle, pas intelligente, je n'ai pas vraiment d'amis... tout ça, répondis-je.

- Il faudrait que tu arrêtes de dire des conneries, un jour, me réprimande-t-il.

Lorsqu'il prend un air faussement sérieux, j'explose de rire, et je vois ses yeux devenir de plus en plus petits, avant qu'il ne me suive dans mon fou-rire.

- Toi, tu n'as aucune autorité, le taquiné-je doucement, après que nous nous soyons quelques peu calmés.

Je reçois un coup de coude dans les côtes de sa part. Tout à coup, son regard se pose sur mon cou, et je me demande ce qu'il regarde, quand je devine que c'est mon collier, que je garde toujours sous mon tee-shirt.

- C'est quoi ? me questionne-t-il curieusement.

- Ah, c'est rien, répliqué-je, en le cachant sous mon sweat-shirt.

Mais je sais bien vite qu'il ne va pas arrêter ses questions ici.

- Tu aimes les chevaux ?

- Oui. Je faisais de l'équitation avant, chuchoté-je, comme si j'avais peur que quelqu'un puisse découvrir ce secret.

Ses yeux brillent quand il me regarde. J'aurai tout donné pour savoir ce qui lui traversait la tête à ce moment-là.

- Quoi ?

- Non, je... c'est vraiment cool. T'en fais plus ?

- Non.

- Tu devrais, pourtant. Ça te ferait penser à autre chose, dit-il.

Un brusque vent frais se faufile entre nous, et de violents frissons perçent sur ma peau, me provoquant une chair de poule bien évidente au premier regard.

- Mes parents ne veulent pas. C'est devenu trop cher à leurs yeux, rétorqué-je dans une pointe de regrets.

- Emy ? m'appelle James, la voix tremblante.

- Qu'est-ce qu'il y a ? demandé-je, soudain paniquée.

- Ne me laisse pas, d'accord ?

Je fronce les sourcils, en essayant de comprendre pourquoi il me dit un truc pareil.

- Mais non, James. Je suis là, lancé-je, en l'attirant vers moi.

Nos mains se séparent, et les miennes glissent vers le bas de son dos, pour que je puisse le serrer contre mon torse. Les siennes dérivent dans mes cheveux, et je ferme les yeux lorsqu'il commence à les enrouler autour de ses doigts.

Son souffle dans ma nuque me fait frissonner à nouveau, et intérieurement, je souris. Je ne me suis jamais sentie aussi bien depuis des années.

- Promets-le moi... me supplie-t-il, presque.

Quand je me recule, je vois ses larmes qui ne vont pas tarder à déborder de ses cils. Et quelque chose fait tilt en moi. James ne mérite pas de pleurer pour moi.

Je me dégage lentement de son étreinte, fais quelques pas en arrière, et pars en courant. Pourquoi faut-il toujours que la personne avec qui je suis, souffre ? Pourquoi suis-je aussi méchante ? Pourquoi suis-je incapable de tenir une promesse de trois petits mots ?

J'entends James me crier de revenir, mais pour rien au monde je ne ferais demi-tour. Parce que toute ma douleur a fait son retour. Et qu'il n'y a qu'un seul moyen pour la soigner. La première chose que je fais en arrivant chez moi, c'est d'empoigner mon cutter, et de rafler la peau de mon poignet déjà marquée par plusieurs cicatrices.

Mes cris s'étouffent dans mon oreiller, et la couleur du sang teinte mon bras. J'ai envie d'hurler toute ma souffrance, de le dire au monde entier que je n'ai pas le choix, de vivre comme ça, que j'ai envie de changer de vie. Mais personne n'y pourrait rien. Alors, je me tais. Comme d'habitude.

Et j'enfonce une fois de plus, encore plus profondément dans ma peau, ce putain de cutter, qui renferme toutes mes émotions depuis déjà plusieurs années.

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Passez un joyeux Noël :') je vous souhaite plein de bonheur :)

Prends ma mainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant