Chapitre 13 - Emy

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- À table ! entendis-je depuis la cuisine, et une douce odeur me chatouille les narines.

Fatiguée, je descends lentement, suivie de mon frère, et nous nous installons. Mon père nous sert en silence, et je remarque que les joues de mon frère sont rouges, et ses yeux encore humides. Pourquoi a-t-il pleuré ?

Je jette un coup d'œil à mon paternel, qui mange silencieusement. Amenant la dernière bouchée de mon assiette à mes lèvres, je réfléchis à ce qu'il a pu se passer.

- Vous pouvez sortir de table, si c'est pour faire la gueule, lâche soudain mon père, et je ne comprends pas de quoi il parle.

Je n'ose pas lui poser de questions, et reste la bouche fermée.

- Ça ne sert à rien que vous restez là. Puisqu'apparemment, vous perdez votre temps.

Je fronce les sourcils. Je ne me souviens pas de lui avoir dit un truc pareil.

- J'ai autre chose à faire que de supporter votre existence, si vous ne parlez pas. Sortez, ordonne-t-il, sur un ton qui se veut sans appel.

Comme aucun de ses deux enfants ne bougent, je sens que la colère s'accumule en lui, et qu'elle ne va pas tarder à exploser.

- Putain ! Je vous avais dit de vider le lave-vaisselle, et de préparer la lessive ! Mais vous foutez quoi !? C'est à moi de tout faire ici ! Et toi, ajoute-t-il, en poitant un doigt sur mon frère, je t'avais pas demandé de jouer de la guitare, pour t'entraîner ? Hein ? Non ? Mais oui, et bien sûr ! On en a rien à faire de ce que je dis, c'est comme d'habitude, de toute façon.

Mon frère s'avance vers mon père pour s'excuser, mais ce dernier le repousse brusquement, et il manque de se retrouver les quatre fers à terre.

- Vous ne servez à rien. Vous êtes vraiment inutiles, déclare-t-il, finalement.

Tu dois avoir raison, pensé-je.

Une fois sortis de la cuisine, j'entends ma mère pénétrer dans la maison, et je me dis que ça va être la cerise sur la gâteau.

- Tu pouvais pas rentrer plus tôt !? Tes gosses n'obéissent à rien ! Leur existence me pourrit la vie, putain !

Les larmes aux yeux de savoir que mon propre père me déteste, je m'enferme dans les toilettes, prétextant à mon frère une grosse envie.

- Ne redescends pas, lui soufflé-je, avant de fermer à clef les toilettes.

Dans le miroir, j'observe mon visage pâle, et mes yeux verts, bordés de marron, suite aux larmes. Ces dernières coulent sur mes joues, doucement, se frayant un passage sur mon visage, pour s'écraser sur le lavabo.

Quelque chose m'oppresse la poitrine, m'empêche de respirer, et me cloue au mur. Mon reflet m'effraie. Les cils humides, je cligne des yeux, pour effacer la nouvelle vague de douleur qui menace de venir à nouveau.

Respire.

Respire !

Respire, putain !

Je ferme brusquement les yeux et, des étoiles apparaissent, à cause du choc. J'arrache un morceau de papier toilette, et le serre très fort dans ma main, capturant ainsi mon poing qui ne demande qu'à se ficher dans le mur.

Je dois impérativement me calmer, si je ne veux pas encore attiser les flammes de mon père. Je ne souhaite même pas écouter la dispute entre mes parents.

Alors, je plaque mes deux mains sur mes yeux, comme si cela pouvait cacher toute la tristesse et la douleur que renvoie mon regard.

Je menace d'exploser, quand soudain, plus aucun bruit ne retenti dans la maison. Pas même une parole, un cri ou un éclat de vaisselle. Rien. Comme si, d'un coup, j'étais seule. Et pourtant, je réalise que c'est le cas, je suis réellement seule, perdue en moi-même, mais quand je reviens à la réalité, les cris se font de nouveau entendre.

- J'en ai marre, Paul, je n'en peux plus ! T'as remarqué dans quel état on vit, aujourd'hui ? s'exclame la voix de ma mère.

- Et à qui la faute ? De la mienne, c'est ça ? répond méchamment mon père.

Et c'est reparti...

Je peux déjà imaginer mon père lever les yeux au ciel, comme pour montrer à sa femme qu'il est exaspéré par son comportement, alors que c'est plutôt le sien qu'il devrait changer.

Mais ça, il ne le comprendra jamais. Il est bien trop borné, pour pouvoir écouter les dires de n'importe qui.

- Tu ne penses jamais à rien, de toute manière. Tu ne changeras pas, déclare ma mère, et j'entends ses talons claquer au sol, et ses pas se rapprocher.

Je ferme les yeux, en devinant que mon frère ne retient pas ses larmes, et que malgré tout, je suis obligée de faire de même. Et de toute façon, qui pourrait m'en empêcher ?

- Emy ?

Ma mère m'appelle depuis le bas des escaliers, et je me reprends brusquement.

- Je suis aux toilettes, maman, dis-je, en évitant que ma voix ne tremble.

Pas de réponse en retour, et je sèche mes larmes, en me disant qu'il faut que je sois forte. Que je ne dois pas devenir faible, comme tout ceux qui ne cachent pas toute la misère à laquelle ils font face.

Je ne dois pas pleurer devant des personnes. Pas même ma famille, ou mes amis. Personne. Parce que, je suis toujours cette fille qui balance des faux-sourires, qui bavarde de tout et de rien pour oublier la douleur, et qui se laisse submerger par cette dernière quand elle est seule. Et je ne crois pas que je ne puisse changer un jour.

Personne ne peut changer. On reste toujours la même personne, au fond de nous. Simplement, c'est plus facile de la mettre dans un recoin de notre esprit, pour pouvoir l'anéantir. Mais elle ne disparaît jamais complètement.

J'ai essayé, de devenir une autre personne, une de ces filles parfaites, qui ne pensent qu'à leur cassure dans leur vernis à ongle, ou à leur mascara qui a coulé à cause de la pluie. Mais ça n'a jamais marché.

Parce que le côté de moi que j'ai essayé de renier est revenu.

Et en remontant dans ma chambre, la première chose que je fais, c'est de m'enfoncer le cutter dans la peau de mon poignet gauche.

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Merci
pour
les
500
vues
😭

je sais pas comment vous remercier 😭 c'est juste énorme, je pensais pas que cette histoire plairait autant 😭

merci, merci et mille fois merci 😭

vous allez bien sinon ? en vacances ?

la biiiise :)

(ps : ne cessez jamais de rêver)

Prends ma mainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant