La cavale des sentiments (TOME 2) [TERMINE - A CORRIGER]

CLARA

Clara quitta la chambre d'hôtel qu'ils n'avaient pas encore rendu. Elle descendit à l'accueil et fit sonner la cloche, un homme s'approchant.

-Qu'est-ce que je peux faire pour vous ? demanda-t-il en souriant.

Clara hésita mais elle devait faire son travail, Henri avait raison. Elle était policière. Elle l'était devenue pour aider les gens, les victimes... Mais, et si ils se trompaient de victime ? Et si c'était Lisa qui était victime du système ? Et si elle avait fait leur boulot en tuant ces personnes dangereuses ? Enfin, leur boulot était de les arrêter mais Lisa n'avait pas ce pouvoir... Elle serra les dents, secouant légèrement la tête avant de lui tendre des photos.

-Vous les avez vues ici ?
-Oh bah oui. Elles sont dans la chambre 22.
-Hmhm... Il n'y a personne dans cette chambre. Elles sont parties. 
-Ma foi, elle, dit-il en pointant la photo de Callie, elle a payé d'avance.
-Combien de nuits ?
-Deux.
-Et elles sont arrivées quand ?
-Hier.
-Mh... Elles ne devaient pas partir aujourd'hui, pensa-t-elle à voix haute.

C'était donc bien Callie qui les avait vu. Elle était venue de quoi reprendre des forces avant de fuir lorsqu'elle était au restaurant. Pendant ce temps là, Lisa avait dû écrire la lettre qui leur était destinée. 

-Est-ce qu'elles ont passé des appels ?
-Mmh... Je vais regarder. Mais, dites-moi... Elles ont fait quoi ? Des junkies ? Elle en avait pas l'air celle qui a payé...
-Une meurtrière et sa complice... 
-Oh putain ! Mais oui ! J'ai vu les infos... J'ai pas fait le lien, grogna l'homme, s'en voulant de ne pas avoir pu aider. Je vois tellement de gens tous les jours...
-Ca arrive, c'est rien. Dites-moi juste si elles ont appelé quelqu'un.

L'homme vérifia les appels sortant ou entrant du téléphone de la chambre vingt-deux et il hocha la tête.

-Il n'y en a qu'un. Appel sortant.
-Une compagnie de taxi ? demanda-t-elle, repensant au taxi qui avait quitté le parking à leur arrivée.
-C'est ça. 
-Mh... Quelle compagnie ?
-A cab taxi. Voilà le numéro, dit-il après l'avoir noté sur un post-it.
-Merci...

Clara prit le morceau de papier et elle sortit du bureau. Elle inspira profondément, regardant ce bout de papier avec ces chiffres inscrits dessus. 

-Ressaisi-toi, se souffla-t-elle, repensant aux paroles d'Henri.

Elle composa le numéro sur son téléphone mais elle n'appuyait pas sur le bouton appeler. Elle revint au menu principal de son téléphone et elle chercha l'adresse de la compagnie. Searles Avenue... Elle s'avança vers leur voiture et ayant le double des clés, elle s'installa au volant avant de démarrer. Clara savait pertinemment qu'elle perdait du temps en se rendant sur les lieux. Elle pouvait appeler la centrale et demander où le taxi les avait emmenées... Pourtant, elle allait jusqu'à l'agence. Elle leur faisait gagner un peu de temps tout en faisant son boulot. Si quelqu'un découvrait ça, elle se ferait virer mais elle ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle aurait pu être à sa place... Qu'elle aurait pu mal tourner si elle n'avait pas décidé de rentrer dans les forces de l'ordre. 

Clara avait eu une enfance vraiment merdique... Adolescente, elle était tombée dans la drogue et son mentor, celui qui l'avait sortie de là, un policier, lui avait donné envie de s'en sortir et de choisir la bonne voie : la justice... Elle était devenue flic pour protéger les plus faibles, ceux qui n'avaient personne, ceux qui souffraient. Elle voulait faire le bien et elle n'avait pas l'impression que poursuivre ces femmes était la bonne chose. Elle n'arrivait pas à se l'expliquer. Peut-être qu'Henri avait raison, qu'elle savait exactement ce qu'elle faisait et qu'elle était coupable, qu'elle ne s'était pas défendue et que ça ne s'était pas passé comme elle l'expliquait dans sa lettre. Pourtant, elle ne pouvait s'enlever l'idée que c'était peut-être vrai aussi. Pourquoi laisser une lettre ? Après tout, elle leur facilitait la tâche. Ils n'avaient pas réellement besoin de chercher à savoir si elles étaient là. Pas besoin de vérifier les caméras du restaurant... Rien n'était à vérifier. C'était elle, pas une imposture ou une blague idiote... En réalité, elle comprenait. Si Henri se retrouvait dans cette situation avec elle comme coupable, elle ferait la même chose. Elle écrirait une lettre pour l'innocenter, clamer qu'il était devenu fou et refusait de partir... Mais est-ce qu'il ferait ça lui ? Serait-il prêt à risquer sa liberté pour la sauver ? Elle n'en était pas sûre. Henri était un homme bien, il aimait son métier et il faisait tout pour que justice soit rendue... Il l'aurait sûrement dénoncée et il aurait témoigné en sa faveur pour l'aider mais probablement rien de plus. De toute façon, il n'y avait pas vraiment de raison de comparer. Pourtant, la seule différence était qu'elle n'avait pas tué la femme d'Henri et n'avait jamais dû fuir. Il l'avait trompée avec elle, ils s'étaient rencontré sur son lieu de travail, ils s'aimaient et il était prêt à quitter sa femme. Il y avait similitudes dans leurs relations mais l'une avait trouvé la bonne personne qui l'avait aidée et l'autre avait fini enfermée. Peut-être que Lisa avait trouvé la bonne personne aussi... Callie. Elle faisait visiblement tout pour l'aider et elle s'exposait, cachant sans cesse Lisa. Elle était juste arrivée trop tard. Et si elles s'étaient rencontrées à l'université ? Peut-être qu'elles auraient fini ensemble, qu'il n'y aurait jamais eu Megan et donc pas de meurtre... Clara souffla doucement, ravalant ses larmes. Elle n'avait plus l'impression de poursuivre une coupable mais une victime... Et si elle méritait une seconde chance ?

Elle arriva finalement à la compagnie. Elle gara sa voiture et elle sortit la lettre, restant derrière son volant. Elle la relu une fois puis une deuxième fois avant de la ranger dans la poche de sa veste. Elle sortit de la voiture et s'alluma une cigarette. Clara prenait clairement son temps. Henri allait la détester si il comprenait, il allait la balancer mais tant pis. A quoi bon si elle sentait, si ses tripes lui disaient, qu'elle ne faisait pas la bonne chose ? 

-Dépêchez-vous, souffla-t-elle dans sa dernière bouffée, lâchant son mégot pour l'écraser de la pointe de sa chaussure.

Clara s'avança ensuite vers l'accueil de la centrale. Elle n'en avait pas envie mais elle devait tout de même agir comme si elle était toujours du bon côté... Elle agissait pour le bon côté. Elle le ressentait. Lisa n'était pas aussi dangereuse qu'elle semblait l'être. Elle en était persuadée.

-Bonjour... Clara Wright. Je travaille pour le département de Los Angeles...
-Bonjour. Qu'est-ce que vous faites par ici ? On est loin de L.A...
-On recherche une criminelle et sa complice. Elles ont fait appel à vos services ce matin. 
-Vous auriez pu appeler, on vous aurait donné les infos... Alors... Vous savez où était le point de départ de la course ?
-Mhmh... Un motel dans le centre-ville.
-Plus précise ? On a pleins d'appels pour des motels.
-Le Motel 6...
-Voyons voir, fit l'homme en pianotant sur son clavier. En effet ! On a eu qu'un appel ce matin pour le Motel 6... Un long voyage... Une heure vers... Mesquite. Pas d'adresse précise.
-Mesquite ?
-Une ville à la frontière de l'Arizona. Notre compagnie est exclusivement dans le Nevada. On va pas plus loin donc le chauffeur ne pouvait pas dépasser la frontière. 
-L'Arizona... Ce serait leur destination ? souffla Clara, pensant à voix haute.
-Possible. L'Utah n'est pas très loin non plus.
-Merci, fit-elle en sortant du bureau, retrouvant sa voiture.

Clara s'installa au volant et elle ressortit la lettre, un léger sourire aux lèvres.

-Malines... Utah ou Arizona ? Où est-ce que vous allez ? 

Elle rangea de nouveau la lettre, reprenant la route vers le motel. Elle se gara et prit le temps de se fumer une cigarette, comme si cinq minutes, allaient les aider encore un peu plus à fuir plus loin. Elle monta ensuite les marches jusqu'à la chambre, poussant la porte, espérant qu'Henri ne lui en voudrait pas trop d'être partie sans rien dire. Elle ne savait pas où elle avait la tête pour penser à les aider mais elle savait qu'elle ne la perdait pas pour autant. Elle faisait le bon choix.