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Claire m'appela dans la soirée pour me débriefer sa journée d'appels. Mon refus avait déclenché une mini crise au sein de Dior qui ne comprenait pas comment j'avais pu devenir aussi ingrate. Leur mise à l'écart n'avait pas du tout été une punition mais un moyen de me permettre de me concentrer sur ma vie personnelle selon eux. Après avoir patiemment écouté Claire m'énumérer les raisons pour lesquelles je devais absolument faire cette campagne, je lui avais simplement répondu que je ne céderais pas avant de raccrocher.
La soirée c'était déroulée tranquillement avec Lénaïc, ayant mutuellement décidé de mettre en pause nos grandes discussions pour bavarder de choses banalement anodines. On avait fini par regarder une vieille comédie romantique à la télé, nous moquant de tous les clichés représentés et finissant même par nous chamailler quand nos avis divergèrent sur la fin.
Cela faisait très longtemps que je n'avais pas autant ris, surtout avec lui.
J'étais allée me coucher à la fin du film pour éviter que cette complicité nouvelle ne devienne étrange si l'on s'attardait trop dessus. Clem m'avait envoyé quelques messages sur instagram auxquels je répondis avant de faire un tour sur mon profil instagram. Je faisais souvent cela, regarder mes publications plus ou moins anciennes avec du recul et archiver celles qui ne me plaisaient plus. Cette fois, au lieu d'archiver, je les supprimais carrément et après une bonne dizaine de minutes, je m'aperçus que j'avais supprimé un bon tiers de mes posts. Si je continuais sur cette lancée, tout y passerait. Et pourquoi pas ? La plupart de ces photos étaient trompeuses : soit elles étaient retouchées et donnaient une fausse image de mon physique, soit mon sourire de façade cachait une crise d'angoisse ou des idées noires. Passant par les paramètres de l'application, je me mis à sélectionner toutes ces images dans lesquelles je ne me reconnaissais pas pour arriver à avoir seulement trois posts non sélectionnés : trois photos avec Lénaïc.
La première avait été prise sur la plage où nous étions cet après-midi peu de temps après notre rencontre. Je l'avais posté quelques années plus tard pour la St Valentin.
La seconde avait été prise par l'une des mannequins faisant parti de l'escapade au Kenya. Elle avait prit une photo lors du seul dîner auquel nous avions participé, quittant notre chambre à contrecœur. On était assis côté à côte en train de se dévorer des yeux alors qu'une dizaine d'autres personnes nous encadraient. On n'avait même pas eu conscience qu'elle nous avait pris en photo avant qu'elle ne me l'envoie le lendemain matin.
La troisième avait été prise par Raphaël. Je les avais rejoins sur une tournée et avait fait la surprise à Lénaïc en l'attendant dans les loges après un concert. Il me tenait dans ses bras, luisant de sueur, les yeux cernés par la fatigue du rythme de la tournée mais avec un immense sourire qui illuminait tout son visage alors que je le regardais avec adoration.
Ces trois photos étaient assez représentatives de notre histoire, rien n'avait jamais compté en dehors de nous deux, nous devions être la priorité l'un de l'autre quoi que le monde autour advienne. Ce n'était pas raisonnable, ce n'était pas tenable mais ces trois clichés étaient une preuve que c'était fantastique, unique et que malgré le déchirement de la rupture, il n'y avait rien à refaire.
Après avoir longuement contemplé ces photos, je me décidais à les archiver après avoir supprimé toutes les autres.


Le lendemain matin, je fus une nouvelle fois la première levée. Si je voulais prolonger mon séjour encore un peu, il me faudrait au moins une culotte propre. Lénaïc semblant s'être couché plus tard, je pris le chemin du port et du centre ville pour faire quelques emplettes.

<De : Claire
Je viens de voir ton insta, tu veux faire faire une syncope à tout le monde ? Tu rentres quand ?>

<A : Claire
J'avais besoin de faire du ménage. Je rentrerais pas aujourd'hui, peut-être pas demain non plus>

Mes culottes, un pantalon et deux pulls dans un sac, je me rendis compte que c'était le jour du marché. Les premières fois que je venais, la mère de Lénaïc achetait toujours des galettes et des crêpes qu'elle nous garnissait de beaucoup de beurre, de jambon et de fromage. On en avait déjà mangé hier mais tant pis, je n'avais rien mangé d'aussi gras depuis des lustres et j'en mourrais d'envie.
De retour à la maison, je fus surprise de voir une voiture garée devant et encore plus de voir Lénaïc et sa grand-mère attablés devant une tasse de thé.

Coup de FoudreOn viuen les histories. Descobreix ara