34 - Léonie

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La nuit avait enveloppé Sainte-Soulle de son voile sombre et rassurant lorsque je franchis le seuil de la maison de mon père, Thanatos, et de Tessa, ma belle-mère. Chaque pas que je faisais résonnait d'une lourdeur, le poids des récents événements pesant sur mes épaules comme jamais auparavant.

« Léo ?! Que se passe... dit mon père.

— On a été attaqué, par surprise.

— Et qu'est-ce que ces démons font ici ?! » s'exclama-t-il en les pointant du menton.

Gloriel, à mes côtés, semblait encore fragile, son aura d'ange séraphin légèrement vacillante après ce qu'elle avait enduré. Nous nous affalâmes sur le canapé, l'atmosphère familière de la maison enveloppant mes sens dans un cocon de sécurité temporaire.

« Calme toi un peu tu veux ! S'agaça Tessa en nous rejoignant.

— L'Aiquesh a le pouvoir de guérir les personnes grâce à leurs larmes. » commença doucement Gloriel, sa voix portant la gravité de notre situation.

Ses mots flottaient dans l'air, lourds de signification et de conséquences.

Azazel, qui nous avait accompagnés, ajouta, sa voix rauque empreinte d'un respect mêlé d'une pointe de crainte :

« Mais tu es capable de bien plus, Léonie. Non seulement tu peux détruire le Darksoul, mais aussi absorber ses pouvoirs. »

La terreur m'envahit, un tourbillon glacé qui menaçait de me submerger. Comment pouvais-je, une simple faucheuse, embrasser une telle destinée ? Comment contrôler une force que je comprenais à peine, un pouvoir qui dépassait tout ce que j'avais jamais imaginé ?

C'est alors que Damien s'approcha, son regard sombre empli d'une détermination farouche.

« Je vais t'aider, Léonie. Ensemble, nous apprivoiserons tes pouvoirs. »

Ses mots étaient un phare dans la tempête de mes doutes, promettant soutien et compréhension.

Mon père, Thanatos, s'immisça dans la conversation, son visage creusé par l'inquiétude.

« Et Lucifer ? Que va-t-il se passer avec lui ? »

Damien prit une profonde inspiration avant de répondre.

« Lucifer est venu pour tenter de te tuer, Léonie. Il n'était pas seul ; Aniel l'accompagnait, l'ange qui a essayé de te tuer. »

Sa voix était calme, mais le danger qu'elle sous-entendait faisait écho à mes propres peurs.

Assise là, entourée par ceux qui me tenaient le plus à cœur, je me sentais déchirée entre la peur de l'inconnu et la détermination de faire face à mon destin.

Comment pouvais-je affronter un ennemi aussi puissant que Lucifer ? Comment pouvais-je embrasser cette partie de moi, l'Aiquesh, sans perdre ce qui me rendait humaine ?

La nuit s'étirait, chaque ombre dans la maison semblant murmurer des promesses de défis à venir. Mais, malgré la peur qui étreignait mon cœur, je savais que je n'étais pas seule. Damien, Azazel, Gloriel, mon père... nous affronterions ensemble les ténèbres qui s'amoncelaient à l'horizon. Car, au fond, c'était cela, la véritable force de l'Aiquesh : non pas la capacité de détruire ou de guérir, mais la capacité de réunir ceux qu'on aime pour affronter ensemble les plus grands périls.

***

Le matin s'éveillait doucement, déversant sa lumière timide à travers le feuillage dense de la forêt près de Sainte-Soulle. Les rayons du soleil perçaient la cime des arbres, créant des jeux de lumière sur le sol humide où je me tenais. L'air était chargé de l'odeur fraîche de la terre et des pins, un parfum qui aurait dû être apaisant, mais mon cœur battait à tout rompre, angoissé par la tâche à accomplir.

À mes côtés, Damien, Azazel, Gloriel et mon père, Thanatos, formaient un cercle de soutien et de pouvoir. Nous étions ici pour une raison : maîtriser mes pouvoirs d'Aiquesh, ceux qui me liaient si intrinsèquement au sort du Darksoul.

Damien, avec une patience que je trouvais à la fois rassurante et angoissante, me guidait dans la maîtrise du feu.

« Concentre-toi, Léonie. Imagine le feu comme une extension de toi-même, pas comme un ennemi à combattre. »

Je fermais les yeux, respirais profondément et tentais de canaliser cette énergie bouillonnante en moi. Lorsque j'ouvris les mains, des flammes jaillirent, vives et dansantes, mais loin d'être sous mon contrôle. Elles dansaient avec une intensité qui me faisait reculer par instinct, plus chaotiques que ce que j'avais envisagé.

Azazel s'avança, un sourire encourageant aux lèvres.

« Ne t'inquiète pas, ça viendra avec le temps. »

Mais le temps était un luxe que nous n'avions apparemment pas. Mon père, Thanatos, perdit son calme habituel.

« Du temps, nous n'en avons pas assez. Les sceaux se sont brisés, et le Darksoul est sur le point d'être libre. » dit-il d'une voix tendue.

Le silence qui suivit fut lourd, presque suffocant. Damien et Gloriel échangèrent un regard avant de se tourner vers nous.

« Il reste un sceau encore intact. » révéla Damien, sa voix grave sous-tendant l'urgence de la situation.

Mon père, visiblement surpris, prit un moment pour digérer l'information.

« Un seul ? murmura-t-il, plus pour lui-même que pour nous.

— Oui Thanatos. Il s’agit de... » commença Damien d’une voix empreinte d’empathie.

Je m'approchai de lui, sentant son inquiétude comme une ombre pesante entre nous. Je pris ses mains dans les miennes, cherchant dans ses yeux un signe de réconfort à lui offrir.

« Papa… répliquai-je, ma voix tremblante malgré moi.

— Quoi Léonie ?

— C’est moi le dernier sceau...

— Quoi ?! Ce n’est pas possible. S’exclama-t-il de surprise.

— Si, c’est ma mort. »

Je vis la réalisation s'inscrire sur son visage, une douleur aiguë qui me transperça le cœur.

« Lorsque je mourrai, le Darksoul pourra être libre.

— Non, non ! Ce n’est pas vrai !

— Elle a raison Than. Le DarkSoul sera libre que lorsque Léonie aura rendu son dernier souffle. » Intervint Gloriel qui s’était levé et nous avaient rejoint sur le comptoir de la cuisine.

L'angoisse me submergea alors, une marée montante de peur pour ce que cela signifiait pour moi, pour tous ceux que j'aimais. Je me sentais comme un pion sur un échiquier dont les cases devenaient des gouffres.

« Je ne te laisserai pas faire cela. » murmura Thanatos, ses mots teintés de désespoir et de détermination.

Autour de nous, la forêt semblait retenir son souffle, attendant ma réponse, notre décision. Mais quelle décision pouvions-nous prendre lorsque le sort du monde reposait sur mes épaules, sur une vie que je n'étais peut-être pas prête à sacrifier ?

Je serrai les mains de mon père plus fort, cherchant dans le lien familial la force de faire face à l'inévitable. Malgré la peur qui me tordait l'estomac, une résolution froide commençait à se cristalliser en moi. Peu importe ce que l'avenir nous réservait, je savais que je ne serais pas seule pour l'affronter.

AiqueshWhere stories live. Discover now