Chapitre 2

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Willa claqua la porte puis, sans jeter un regard en arrière, avança d'un pas déterminé jusqu'à... en fait, elle ne savait pas vraiment où elle allait, mais elle y allait d'un pas sûr.

Elle n'empêchait plus ses larmes de couler. Après tout, elle n'avait plus personne pour les regarder glisser le long de ses joues. Sa mère morte, son père alcoolique... Elle essayait de faire le point sur les personnes qu'elle aimait et qui pouvait l'aider, la comprendre sans la juger.

Et ces personnes étaient devenues si rares dans sa vie qu'elle pouvait largement les compter sur les doigts de la main. Il y avait évidemment Jean, son meilleur ami depuis si longtemps qu'elle ne se rappelait même pas de leur première rencontre.

Elle se souvenait par exemple d'elle, à la crèche ou à la maternelle, qui lui en faisait voir de toutes les couleurs ! C'était si drôle de voir Jean se mettre à pleurer et d'aller tout raconter à la maîtresse au moindre petit geste brusque de la part de Willa !

Ce souvenir permit au visage de la jeune fille de s'illuminer un petit peu... À côté de ses yeux larmoyants, son sourire semblait bien pâle mais il était présent, c'était ce qui comptait le plus.

Ces petites chamailleries enfantines avaient vite laissées place à une amitié hors du commun, qui liait désormais les deux adolescents plus que le pouvait une amitié commune.
Malgré cela, Willa se voyait mal aller pleurer contre l'épaule de Jean... Elle avait fait les quatre cents coups avec lui, mais il serait terriblement mal à l'aise s'il devait essayer de la réconforter !

Le temps de cette réflection, elle avait marché jusqu'au bout de sa rue. Son père n'était toujours pas derrière. Cela voulait sûrement dire qu'il ne la chercherait pas tant qu'il ne serait pas sobre. Et ces moments tant espérés arrivaient de moins en moins souvent, et duraient de moins en moins longtemps.

Les rémniscences qui lui étaient revenues en mémoire s'étaient vite effacées et les larmes avaient recommencées à couler sur son visage cristallin.

Elle pensa alors à Alison... sa meilleure amie, incontestablement... Elles étaient inséparables depuis plus de 5 ans... d'accord, cela restait une petite amitié, mais elles s'étaient tout de suite tellement bien entendues !

Sans se parler, elles comprenaient chacunes ce que l'autre pensait, rigolant avec elle ou la réconfortant si besoin. Mais Willa ne lui avait pas parlé autant qu'elle aurait dû depuis deux semaines... Sa douleur l'avait littéralement empêché de prendre son téléphone pour répondre à ses messages réconfortants. Ceux-ci lui faisaient plaisir, mais elle ne lui avait pas pour autant donné de nouvelles.

Cependant, Willa avait vraiment besoin de sa meilleure amie, et Alison le comprendrait parfaitement. Elle comprenait toujours. Elle décida donc d'aller chez son amie.

Celle-ci habitait dans le village voisin, a à peine 5km de chez elle. Willa se mit donc en route, à pied, évidemment.

Elle leva la tête vers le ciel, essayant d'évaluer grâce à la position du soleil quelle heure il était. D'après son évaluation de l'astre déclinant, il devait être à peu prêt 18h. Elle abaissa soudain son regard. C'était un jeu auquel elle jouait avec sa mère : celle qui donnait la réponse la plus proche de l'heure réelle gagnait !

Maintenant que sa mère n'était plus là pour jouer avec elle, Willa avait son téléphone.

Elle le sortit de sa poche, l'alluma et observa son écran. L'heure en écriture blanche se détachait clairement sur son fond d'écran... une photo d'Alison, Jean et elle, lors d'une de leur innombrables sorties...

Ça devait être à Halloween, l'année précédente : en effet, Alison était déguisée en une adorable jeune écolière anglaise, dans sa petite jupe d'uniforme à carreaux, tachée du sang de ses victimes... Son maquillage était très réussi : il blanchissait considérablement son visage d'habitude si agréable, et le lui barrait d'une énorme balafre, allant de son oeil droit au haut de sa lèvre.

Le Cycle ÉlémentaireWhere stories live. Discover now