A chacun son Armorie

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Hello ! Pour le média, le rythme de la chanson ne correspond pas forcément à la scène, mais j'ai trouvé que les paroles faisaient carrément écho à Alicante, donc voilà 😊

Quoique, elle me paraît adaptée pour la deuxième moitié du chap 😜

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PDV Ecclésia

En cas de situation particulièrement délicate, j'ai pris l'habitude de me répéter que tout ceci n'est qu'un horrible cauchemar, que mes paupières vont s'ouvrir d'une minute à l'autre et que l'ensemble de mes maux disparaîtront en même temps que la lumière du jour envahira mes globes oculaires. Sauf que, ce coup-ci, mes paupières sont bel et bien ouvertes. Je le devine aux picotements for désagréables qui prennent d'assaut mes cornées desséchées.

De furieux coups de marteau se mettent à percuter ma cage thoracique. Je ne parviens à faire le parallèle entre leur localisation, la désagréable bouffée de stress qui m'oppresse et mon soudain essoufflement, que lorsque le visage d'Alicante se décompose pour de bon.

Mon cœur bat.

Je me rassois d'un trait, puis constate avec hébétude le léger éclaircissement de ma peau, ainsi que celui de mes cheveux, désormais plus proches du cyan que du bleu marine. Lorsque je relève une paire d'yeux embués vers le dieu immobile, je comprends que la notion d'effort, mantra du couple insolite que nous formons depuis peu, vient d'atteindre un tout autre palier. Car bien que l'Amour ait été libéré de la coque métallique qui l'inhibait, je doute que les timides sentiments du Prince Obscur survivent à ce nouvel obstacle.

Tu-dum, tu-dum, tu-dum.

Je froisse mon tee-shirt à l'endroit où mon cœur se déchaîne, une zone qui s'était habituée au silence de l'Obscurité.

-Dites quelque chose.

Mon murmure n'engendre aucun écho.

A présent dépourvue de ma précieuse armure de Haine, je me sens nue, à nouveau pleinement sensible aux effets de la Peur et de la Tristesse. Plus de Mal, fini. Plus de remparts Obscurs, plus de « œil pour œil, dent pour dent » ou de « vivra qui pourra ». Car, maintenant, je souffre, j'encaisse, je cicatrise et je réalise à quel point la sensibilité de la Déesse de l'Amour est démesurée. Non seulement parce qu'elle héberge cette ressource universelle en elle, à l'intérieur de son cœur, mais parce qu'elle peut désormais projeter son intensité maladive sur quelqu'un. Sur la personne qui lui a été prédestinée, en l'occurrence.

Confuse, je rapatrie mes jambes contre mon buste puis plante mes yeux dans ceux d'une statue, anéantie par le silence pesant.

Assis en tailleur, les coudes sur les genoux, ladite statue ne bronche pas. Seuls ses yeux noirs se permettent de naviguer entre le bleu de mes iris, l'absence de flammes de mes cheveux et mon visage désespéré. Plus l'observation se prolonge, et plus les tendons de ses avant-bras saillent sous sa peau halée. Il finit par croiser les mains sous son menton, puis y appuyer ses lèvres pincées, rompant le contact visuel que je tentais de maintenir.

Alors, il se met à fixer le parquet durant de longues minutes.

Je m'efforce de minimiser l'impact du basculement sur mon équilibre mental afin de me focaliser sur le sien. Lumière oblige, le narcissisme primaire passe en seconde zone. Je pense aux autres, d'abord ; à moi, ensuite. Devise que je suis plus ou moins parvenue à intégrer. Car Armorie m'aimait telle quelle. Et c'est dans cet état d'esprit que la Déesse de la Tolérance a poursuivi l'éducation que mes parents se sont bien gardés de me transmettre. Elle faisait avec mes défauts, avec ma personnalité, mes sautes d'humeur et mon caractère, sans chercher à me modeler selon les critères de notre communauté d'origine. Par contre, elle n'hésitait pas à me mettre en garde à propos de telle ou telle attitude, qui me vaudrait sans doute de nouveaux coups d'œil inquisiteurs.

Cœur de flamme (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant