Chapitre 3 : Le livre bleu, chapitre I

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A l'origine, le monde n'était qu'un océan infini plongé dans les ténèbres les plus profondes. Combien de temps cela dura ? Nul ne le sait, car rien ne vivait à cette époque, aussi la notion de temps n'existait pas. Car en effet, comment considérer le concept de temps sans pensée pour le concevoir ? Cette question qui nous agite ne se doit pas cependant de rester pour l'heure, car là n'est pas le sujet.

Un jour, une forme de vie naquit de l'océan primordial. Cet être en sortit avec grâce et élégance, avant de se pencher brusquement, pour en boire le liquide qui le formait. Alors, cette vie obtint de nombreux dons, et des pouvoirs extraordinaires, en plus d'acquérir une forme précise, semblable à celle d'une femme humaine. Pourquoi donc ? Qui peut le dire ? Nous n'en savons rien, et cela vaut peut-être mieux.

Plus tard, cette créature fut appelée par les hommes Astrich, la mère des anciens. Car effet, et c'est cela qui va nous préoccuper pour l'heure, elle s'entailla la paume de la main droite avec l'ongle de son pouce gauche.

Alors, elle laissa tomber son sang goutte à goutte, et chaque fois qu'une de ces gouttes tombait dans l'océan primordial, se formait une nouvelle vie, qui, se gorgeant de l'eau, obtenait également de grands pouvoirs.

Plus tard, les hommes nommèrent ces créatures Ames sombres, en référence à leur lieu de naissance, qui était plongé dans le noir le plus complet. Et il me semble que seuls les hommes auraient assez d'audace et d'orgueil pour placer un nom sur ces êtres, et si moi-même je l'emploie, c'est par pure commodité, qu'on n'en pense pas autre chose.

Les Ames sombres étaient presque immortelles, en effet elles pouvaient vivre jusqu'à la fin des temps si elles prenaient garde à ne jamais s'exposer au danger. Mais il était cependant possible de les tuer : je l'ai dit, elles font parties des mortels. Et, pour être plus précise, je rajouterai qu'elles pouvaient si elles le voulaient se donner la mort, mais que jamais elles n'auraient osé le faire.

Car en effet, elles ne craignaient qu'une seule chose : la mort elle-même, et c'est en cela qu'elles ressemblent aux hommes. Aussi elles ne s'en prenaient jamais les unes aux autres, et se respectèrent toutes pour toute l'éternité. Cela était bien plus commode pour survivre, s'entendre avec ses voisins étant un moyen de s'assurer une vie un peu plus longue.

De nombreuses années plus tard, une part de l'océan primordial se solidifia. Comment ? Pourquoi ? Nous l'ignorons, moi y compris. Et cette transformation donna petit à petit naissance au monde terrestre, celui des hommes.

Puis, cette opération se répéta, engendrant un nouveau monde, un monde si lumineux que les âmes sombres ne pouvaient pas y rester trop longtemps sous peine de perdre la vue. Fort heureusement, cette vue, elles la pouvaient retrouver en se baignant dans l'océan où elles étaient nées.

Et, pour en rajouter encore, un troisième monde apparu comme les deux précédents dans le même temps. Formé de de feu et de glace qui se mêlaient et s'entremêlaient dans un mouvement incessant, il apparaissait comme peu accueillant, et il est vrai que si l'on m'avait proposé d'y vivre, j'aurais décliné avec force cette offre, quelle que soit la gentillesse l'accompagnant.

Attristées de n'avoir aucun lieu où reposer, les Ames sombres optèrent pour un agissement conjoint. Ensembles, elles usèrent de leurs immenses pouvoirs afin de former un quatrième monde, le faisant surgir de l'océan. Treize fois plus grand que celui des hommes, il se trouvait vaste, bien plus accueillant que le dernier né, et elles y vécurent et régnèrent.

Ainsi fut la création des mondes et des Ames sombres, nées du sang d'Astrich, la Première. Pour autant, mon travail ne s'arrête pas là : il en fait au contraire que débuter, et c'est encore un long acheminement vers mon but qui m'attend.

Le sang sombre : AdrienDonde viven las historias. Descúbrelo ahora