Chapitre 17 : Le carnage

80 9 6
                                    


Le lendemain de la confession qui s'était déroulée entre Adrien et Loïc, tout le groupe attendit les paroles de Malendra. Aucun d'entre eux n'avait d'autre choix que de s'en remettre à elle, car seule la vieille avait le savoir nécessaire à la résolution de leur situation. Elle s'adressa à Adrien avec une voix plus grave qu'à l'accoutumée, ce qui n'augurait rien de bon.

— J'ai fouillé de fond en comble les pensées et la mémoire de Tracas, et de tout ce que j'ai pu voir, il n'y a que cinq personnes possédant le titre de Roi en ce monde, et ces rois, tous viennent des Limbes. Sans nullement vouloir sous-estimer ta force, il t'est impossible de vaincre l'un d'entre eux. Tu n'as plus qu'un seul et unique choix : devenir un Roi sans en vaincre un. Vois-tu où je veux en venir ?

Le relevé baissa la tête, parce qu'il avait compris ce que la vieille avait sous-entendu : seuls les plus forts pouvaient détenir ce titre. Et pour montrer sa force, il allait devoir affronter des ennemis à sa hauteur, des ennemis redoutables. En d'autres mots, il allait devoir tuer encore et encore, jusqu'à trouver le plus redoutable des adversaires. Avec ces nombreux combats, il prouverait sa valeur, c'était la seule chose de certaine.

Il jeta à cette pensée un regard triste à Loïc, et songea qu'il ne pourrait jamais être digne de lui avec tout ce sang sur les mains. Mais si c'était là le prix à payer pour sauver les hommes, alors il n'hésiterait pas, jamais. Il hocha la tête, déterminé à devenir ce Roi qu'il aurait dû être de son vivant.

— Bien, en ce cas, c'est maintenant que nous nous quittons. Tracas sait ce que je veux, et je n'ai d'autre choix que de vous éviter à présent, car ce qu'il voit, je le vois, et réciproquement. Comprenez mes motivations.

Alors, la vieille se retourna, pour ne pas à voir ses compagnons d'aventure. Et tandis qu'elle retenait une mine grave, elle prononça une dernière parole.

— Suivez ceux dont le nom retentit dans les paroles des autres, et voyez si leur force est semblable à ce que l'on en dit. Adrien, prends garde à n'affronter que ceux dont la réputation est en-deçà de la vérité. A présent, je vous dis à tous au revoir.

Alors, le corps de Malendra noircit tout entier, et avant même qui quiconque ait pu faire quoi que ce soit, elle s'effondra d'un seul coup. Lorsqu'on s'approcha d'elle, on vit qu'il ne restait plus que sa robe noire, dans laquelle remuait un millier de petites araignées velues, qui fuirent aussitôt en tout sens.

On le savait bien, les pouvoirs de la vieille pouvaient être effrayants, mais rien de tout ce qu'ils avaient vu ne pouvait rivaliser avec cette vision. Elle s'était sans doute volatilisée loin de là, sans mourir cependant, mais personne ne pouvait l'affirmer avec certitude.

Les trois personnes restant se jetèrent mutuellement des regards tour à tour angoissés et attristés, avant de décider d'un commun accord d'avancer vers le nord, là où le froid décimait les hommes. Là-bas devaient se trouver des guerriers d'exception dignes d'être sacrifiés pour le salut de l'humanité.

Ainsi, le temps s'écoula longuement, et des hommes plus forts qu'on ne le pouvait supposer eurent à faire à la lame d'Adrien. Ce dernier avait de plus en plus la maîtrise du sang sombre qui coulait dans ses veines, et il n'en faisait jamais usage lors des combats : il ne pouvait se le permettre, car l'erreur qu'il avait commis lors de son affrontement contre le prêtre ne devait pas à nouveau se faire.

Ainsi, pendant de longs mois, le roi maudit tua encore et encore, s'imprégnant du sang rouge de ses victimes, comme s'il pouvait remplacer le noir qui coulait dans ses veines par ce vermeil flamboyant. Et Sylvia de son côté se débarrassait des petits gêneurs, ceux-là dont la mort n'allait rien rapporter à Adrien.

Le sang sombre : AdrienWhere stories live. Discover now