La Dimension Noire | Doctor Strange

✴ XIX - Fuite in extremis ✴

     Deux jours étaient passés depuis que Sasha et Pamela avaient rendu visite à Docteur Strange. Deux jours durant lesquels aucune alerte n'avait dû être signalée. Cela n'aurait pas inquiété Sasha en temps normal. Mais ce qui l'inquiétait, c'était que Mordo n'était pas revenu depuis deux jours, laissant le Manoir aux mains de Méphisto, qui prenait un malin plaisir à diriger les sorciers, qui s'écartaient sur son passage. Sasha avait croisé sa route à de multiples reprises, et à chaque fois, un sourire en coin avait orné ses lèvres. Quelque chose se tramait, elle en avait l'intuition. Ses nuits étaient courtes, elle était sans cesse sur le qui-vive, et ses nerfs étaient plus que jamais à vif. De plus, un mystère tournait dans son esprit jour et nuit, la faisant encore plus se méfier de Méphisto et de ce que Mordo et lui semblaient préparer. 

Jusque là, elle n'y avait pas prêté grande importance, pensant que l'accusation qui avait été portée à son encontre par rapport au meurtre de Marcus était destinée à faire réagir Cléa, afin qu'elle se dénonce pour protéger celle qu'elle avait pris sous son aile durant son bref séjour au Manoir. Mais à présent, Sasha ne pouvait s'empêcher de se demander si ce n'était qu'une simple manigance, ou si elle avait bel et bien été démasquée... Dans ce dernier cas, comment cela pouvait-il être possible ? La sorcière suprême de la dimension noire et elle avaient veillé à couvrir leurs traces, s'assurant que personne ne les avait suivies. De plus, même si elle n'avait pu lui parler, Mordo n'avait pas convoqué Sasha dans son bureau, et n'avait rien tenté contre elle. Le mystère restait donc entier, et ne cessait de tourmenter la jeune fille, qui ne se sentait plus à sa place au milieu de ses camarades. Elle se sentait menacée, voire prise au piège, alors que tous la considéraient encore comme une amie et une sœur. Peut-être que cette sensation était due au sentiment de protection et de confiance qui l'envahissait dès qu'elle se trouvait en compagnie de Docteur Strange... ? 

Sa relation avec le maître des arts mystiques semblait avoir peu à peu évolué positivement, en partie grâce à l'aide qu'il lui avait apporté lorsqu'elle en avait eu besoin. Et cela ne l'arrangeait pas, loin de là... Elle s'était longuement posé la question, réfutant d'abord la réponse qui lui apparaissait comme étant une évidence, avant de finir par l'accepter : Docteur Strange n'était plus son ennemi, mais l'un de ses amis. Grâce à lui, elle avait pu devenir un peu plus maître de ses propres pouvoirs, elle avait appris à les canaliser, afin d'éviter un nouveau drame. Et, bien plus étrange que cela, elle voyait désormais le maître des arts mystiques comme un modèle, et comme un point d'ancrage. Lorsqu'elle sentait que ses nerfs allaient lâcher, elle se concentrait et mettait en pratique ce qu'il lui avait appris afin de refouler la rage destructrice qui menaçait de la dévorer de l'intérieur. 

Sasha secoua la tête et se leva du canapé sur lequel elle était assise depuis de longues minutes pour se rapprocher de la cheminée du salon, qui diffusait la chaleur du feu qui y brûlait dans la pièce, mais également dans le Manoir tout entier. Son regard se perdit dans les flammes qui s'élevaient vers le conduit de la cheminée, comme si elles cherchaient à attraper quelque chose. Tandis qu'elle croisait ses bras contre sa poitrine dans un soupir, les pensées de Sasha convergèrent vers une personne qui lui était chère, et qui l'inquiétait autant, voire même plus que Mordo lui-même : Cletus. Depuis quelques jours, le roux ne lui avait plus adressé la parole, ou du moins très peu. Sans lui, Sasha se sentait seule, et abandonnée, bien qu'elle sache que sa meilleure amie était toujours là, et qu'au Sanctuaire, trois autres personnes les attendaient, prêtes à les protéger si cela s'avérait nécessaire. Elle avait bien tenté de lui parler, mais chacune de ses tentatives avait échoué, son petit ami se défilant toujours, prétextant un entraînement ou une urgence qui requerrait son attention. Pamela avait tenté de la rassurer en affirmant que Cletus devait avoir ses raisons, et que cela ne durerait pas. Pourtant, cela ne l'avait absolument pas apaisée, bien au contraire.