19. Nous les trompeurs

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Gast ar c'hast ! C'est qu'ça se galoche, par ici ! 

J'ouvre des yeux grands comme des soucoupes, incapable de penser, encore moins réagir correctement.

— Ces d'jeuns, j'vous jure... continue Gérard. Pire que des escargots sans coquilles !

Arielle aime Gabin. Ça, je l'ai toujours plus ou moins su. Ses marques d'affection étaient trop manifestes pour que je parvienne à les ignorer, même quand je le voulais terriblement.

— Des limaces. On appelle ça des limaces, rectifié-je d'une voix blanche.

Mais que Gab' aime Arielle, ça, ça pique.

Fort.

Comme de la moutarde.

— Em', hoquette-t-il, à bout de souffle. Ce n'est pas ce que tu crois.

— Bah, ça m'a l'air plutôt clair, mon minot : tu viens de t'taper cette vieille pie mal sapée, rétorque le vieux Schtroumpf en coulant un regard mauvais dans sa direction.

Mon ex recule d'un pas, effrayé par son strabisme menaçant. Arielle, quant à elle, arbore un sourire satisfait, ravie d'avoir enfin mis le grappin sur l'homme qu'elle convoitait depuis deux ans maintenant.

— Ce que je crois, c'est que tu te fous de ma gueule depuis des mois, murmuré-je en peinant à retenir mes larmes.

Pour moi, c'est le choc. La sidération. Les derniers sentiments que je nourrissais pour Gabin explosent dans mon cœur comme des bombes à retardement.

J'avais beau m'en douter, l'impact est brutal.

J'ai mal.

— Je vais tout t'expliquer, promet-il en attrapant mon poignet.

Ce contact suffit à me sortir de ma léthargie. Je me dégage violemment, jusqu'à heurter le portemanteau près de l'entrée.

— Je te jure qu'on n'a pas...

— Je pense que c'est préférable que tu déposes les affaires chez mes parents, le coupé-je brusquement. Je... j'ai besoin de prendre l'air.

Et je me rue à l'extérieur, Gérard sur les talons. Impossible de rester une seconde de plus dans la même pièce que ce débilos.

J'aurais dû le voir venir, vraiment. Rozenn m'avait prévenue, Bleuenn aussi, et même mes rêves ne cessaient de me lancer des avertissements réguliers au sujet d'une réalité qu'aucun mensonge, aucune illusion n'a pu conjurer : Gabin m'a trompée.

Même si nous ne sommes plus ensemble, oui.

Au fond, je savais qu'il était infidèle. Le problème, c'est que je ne l'admettais pas.

Résultat : Gabin s'en est chargé pour moi.

— Pouah ! Vous m'aviez pas dit que vot' fiancé était un chaud lapin, marmotte le vieux Schtroumpf en mettant le contact. Vous auriez dû poireauter jusqu'à vot' mariage pour le planter devant l'autel. Ça lui aurait fait une belle jambe, à ce fripon !

Je m'écroule sur le siège passager, incapable de lutter plus longtemps contre les sanglots qui se forment au fond de ma gorge. Je pensais m'en être plutôt bien sortie, jusqu'à présent, mais la trahison de mon ancien petit ami ne fait que révéler à quel point j'étais, suis et resterai une sombre quiche.

Sans lardons, sans saveur, et avec une pâte feuilletée aussi molle que ma vie.

En un mot : dégueulasse.

Gast ! Voilà vot' Don Juan qui rapplique ! Vous voulez que j'lui balance mon dentier dans la tronche ?

— Gast ! Voilà vot' Don Juan qui rapplique ! Vous voulez que j'lui balance mon dentier dans la tronche ?

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LES AMOURS ÉPONYMES 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant