52. La poêle de notre amour

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Une heure plus tard, dans le salon de Gérard...

Qu'on soit clairs : après notre échange à cœur ouvert sur la plage, Gabin aurait pu, aurait rentrer chez lui. 

Pourtant, ce débilos a préféré camper sur mon canapé en zappant entre les différents programmes télé. 

Il m'a demandé s'il pouvait rester dormir ici cette nuit, et j'ai accepté, après lui avoir fait jurer puis cracher qu'il se carapaterait aux premiers rayons du soleil.

Je n'avais plus la force, plus l'énergie de le foutre dehors. 

Demain, peut-être, mais tout ce que je veux, là, tout de suite, maintenant, c'est dor...

— Em'. 

... mir. 

— EM'. 

Je me redresse en bougonnant, mécontente d'avoir été tirée de mon sommeil.

— Je piquais du nez, là. 

— T'as tapé ta meilleure sieste sur mon épaule, surtout ! rétorque Gab' en pointant la télécommande vers l'entrée. Y'a un type chelou qui fait des allers-retours sous le porche, depuis tout à l'heure.

Il ne m'en faut pas plus pour lever mes fesses du sofa et trottiner jusqu'à la porte. « Un type chelou », dans sa bouche, ça peut très bien désigner le père Noël ou Maxence. 

Dans les deux cas, cette perspective m'enthousiasme assez pour que j'achève de me réveiller.

Malheureusement, je déchante vite en découvrant un homme que je ne connais ni d'Ève, ni d'Adam, l'air peu amène et les sourcils froncés, nonchalamment adossé contre la rampe d'escalier qui mène au jardin.

Qu'est-ce qu'il fait là, lui, avec ses beaux yeux noirs et ses bottes de pluie définitivement trop grandes pour lui ?

— Bon... bonsoir ? lancé-je sans grande conviction. 

Gabin rapplique aussitôt, alerté par les tressautements de ma voix. Notre visiteur nocturne ne m'inspire pas du tout confiance.

Il est incapable de choisir des chaussures à sa taille, déjà.

— Vous êtes qui, vous ? tance mon ex en posant une main protectrice dans le bas de mon dos. 

Je lui aurais probablement collé une paire de baffes, en temps normal, si je n'avais pas effectivement besoin d'être rassurée. Je peux me débrouiller toute seule, mais mon interlocuteur masculin n'est peut-être pas du même avis, malheureusement.

Vous, vous êtes qui ? réplique-t-il. Vous n'avez rien à faire ici ! 

Ça, c'est la meilleure !

— Eh ! Ma copine a une très bonne raison d'être là, clochard. Elle garde la maison de son pote pendant son absence. 

Je ne sais pas ce qui me choque le plus : que Gabin me présente encore comme sa « copine », ou qu'il évoque le gars qui a pissé sur son paillasson.

— Et moi, je suis Thierry Jaouen-Manioc, décrète l'intrus.

Cousin des carottes, fan de Koh-Lanta, et...

Thierry ! m'exclamé-je. Sa saleté d'gendre !

... saleté d'gendre de Gégé.

Gab' et lui me dévisagent tous les deux, sans comprendre. 

— Gérard parle beaucoup de vous, vous savez, continué-je en l'invitant à entrer. Il trouve que vous êtes radin et aimerait bien que vous lui offriez plus de boîtes de chocolat à Noël, mais...

LES AMOURS ÉPONYMES 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant