33. Entre chiens et chats

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Une adorable petite chatte tigrée âgée de quelques mois à peine est roulée en boule au fond de la corbeille. 

Adorable, mais sauvage.

Ça ne me poserait pas plus problème que ça, si je ne détestais pas les chats.

Oui, je déteste les chats.

Impossible qu'il en soit autrement, avec Kurt et Georges. Ce sont de véritables monstres sur pattes : chaque fois que je suis sur le point de m'endormir, ils ramènent leurs sales puces dans mon lit pour réclamer des caresses.

Quoi ? C'est comme ça que la peste bubonique s'est propagée, vous savez !

Parfois, je regrette mes six mois de vie commune avec Gabin et sa maison calme, dépourvue du moindre félin. Il y est allergique – je ne risquais rien, chez lui !

Sans plus de cérémonie, Gérard s'empare de la poubelle et la secoue jusqu'à faire fuir la squatteuse. Le craquement qu'émet son dos lorsqu'il se redresse me fout la chair de poule, mais comme toujours, je suis la seule à l'entendre. Espérons qu'une offre « massage à volonté » est incluse dans la formule qu'il a souscrit à l'hôtel !

— Et toi, ma p'tite dame ? Qu'est-ce qu'tu vas traficoter, cet été ? s'enquiert-il une fois la bête extraite de sa cachette.

— C'est-à-dire que... je n'y ai pas encore réfléchi.

Autrement dit : rester larver à Crozon. Seule, avec un chien aveugle et un chat sauvage. Ça promet !

— Fais pas cette tête, mistinguette ! J'te laisserai de quoi t'éclater et acheter du poisson frais pour Minette. Elle est un peu difficile : y'a qu'le pesket qu'elle accepte de bouffer.

— Minette ? répété-je, perdue.

Pour toute réponse, Gégé me fourre la féline entre les mains.

Ah. C'est elle, Minette.

Plutôt logique, quand on y pense. Je tente de lui faire un câlin, mais cette peste préfère me saluer avec ses griffes.

— Aïe !

Tant pis. Pas de pesket pour Minette !

Gérard s'assied à la table de la salle à manger, sans pouvoir retenir un long et profond soupir. Il se demande sûrement si c'est une bonne idée de me confier ses animaux.

Et il a raison : ça ne m'aurait même pas traversé l'esprit, à sa place !

Le temps qu'il renonce à son voyage, j'étudie la pièce en détail, émerveillée par l'exacte concordance entre la fiction et la réalité. C'est comme si le vieux Schtroumpf s'était inspiré d'On the leaves of Autumn pour finaliser la décoration de sa cuisine.

Mais c'est impossible : la seule fois où je lui ai parlé de Wattpad, il a beuglé « Watt quoi ? » et ponctué sa phrase d'un « vous êtes bizarres, vous les d'jeuns ! ». Ça restera dans les annales de mes plus beaux fous rires en compagnie de Gérard, comme la fois où il a confondu une mamie toute ridée avec sa petite-fille de vingt ans.

À moins que ce ne soit une technique de drague...

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LES AMOURS ÉPONYMES 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant