15bis - Romance surprise

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Ashley n'avait aucune imagination.

Certes, avec son caractère pessimiste, il avait tendance à s'inventer, afin de se préparer à l'éviter, le pire qui pourrait arriver quotidiennement (et qui, finalement, à son plus grand étonnement, ne se produisait pas) ; mais dans son cas, étant donné toutes les mauvaises expériences vécues à son jeune âge, on devait parler de données empiriques plutôt que d'imagination.

Un peu moins de deux mois après leur premier baiser, il apprit par hasard que le dix-septième anniversaire de Maewon arriverait quelques jours plus tard. Il se dit que son statut de petit ami officiel l'obligeait à lui organiser une fête. Avant qu'il n'ait eu le temps d'initier une discussion avec les camarades dont son copain était le plus proche, le meilleur ami de Maewon – un humain prénommé Fenix, avec lequel le semi-elfe avait, ironiquement, sympathisé dès son arrivée à l'Université – vint inviter Ashley à la fête surprise qu'il était en train de préparer pour l'événement.

Tout était quasiment réglé : la date décidée pour la sauterie était, logiquement, le jour de congé suivant la date d'anniversaire afin de permettre à tous les invités de se libérer. L'achat du cadeau commun, un nouveau téléphone portable, pour lequel Ashley contribua généreusement grâce au pécule amassé par ses ventes de potions, devait avoir lieu bientôt, et Fenix s'en chargerait. La dizaine d'invitations avaient bien sûr déjà été lancées, et toutes les réponses avaient été positives : tous les invités appréciaient beaucoup le semi-elfe.

Pour un adolescent de son âge, Maewon avait un groupe de connaissances de taille moyenne, mais contrairement à ceux qui entretenaient des liens superficiels, il était très aimé de ses amis grâce à son humour et ses gentilles attentions pour chacun.

Même le lieu et le menu des réjouissances étaient fixés : en début d'après-midi dans un restaurant à Arkania que Maewon appréciait pour ses bons plats simples et son décor sobre, une salle ayant été privatisée pour l'occasion.

L'un des points forts d'Ashley était la planification, mais il n'y avait plus rien à coordonner pour l'anniversaire. Son rôle dans l'affaire consisterait uniquement à emmener le héros du jour à la fête, en lui cachant le but du déplacement. Un autre qu'Ashley se serait senti exclu de l'organisation, il éprouva uniquement la déception d'être arrivé trop tard.

Très motivé à faire plaisir à son petit ami, il décida de préparer quelque chose de romantique à la date exacte d'anniversaire. Seulement, comme expliqué plus tôt, il n'avait aucune imagination.

Habitué aux techniques de recherches pour ses études, il appliqua la même routine pour la surprise qu'il voulait préparer : lire de la documentation, prendre des notes, organiser les idées de façon cohérente, et conclure. À la seule pensée du mot « conclure », ses joues et ses oreilles prirent une teinte légèrement rouge.

La documentation était toute trouvée : le livre préféré de Maewon, une romance écrite il y avait plus de 150 ans, extrêmement bien rédigée mais aux situations dignes du pire cliché existant sur l'amour éternel. La première fois qu'Ashley l'avait lue – par curiosité après que son ami, qui n'était pas encore son amant, lui eut parlé de cette histoire – il s’était senti mal à l'aise, comme souvent lorsqu'il ne comprenait pas une situation tout en devinant qu'il était en train de rater un point important. Plus tard, il avait appris que le but de cette recommandation avait été de lui faire comprendre l'intérêt qu'il suscitait. Cet éclairage ne l'avait pas plus aidé à comprendre le bouquin.

Il l’avait relu peu après leur première sortie en couple, en avait assimilé un peu mieux le sujet, tout en ne voyant toujours pas le lien avec ses propres circonstances.

Sa troisième exposition à cette œuvre fut plus studieuse : il parcourut en diagonale les quelques 300 pages de l'intrigue, pour recopier tous les gestes exécutés par le héros de l'histoire pour la dame de son cœur, afin d'en reproduire certains avec Maewon. Il évita tout de même de noter "étendre son manteau à terre pour lui éviter de salir ses souliers" ; il n'y avait absolument rien de pertinent à ça.

La prunelle de vos yeux - Tome 1 : RévélationsOnde histórias criam vida. Descubra agora