53 | Katrina

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La fille qui se tient face à nous ne correspond pas à mes attentes. Dans mon imagination, son visage était pâle et son regard ébène et vide. Dans la réalité, elle dispose du type de chevelure rêvé : une crinière bouclée couleur caramel, une peau mate et constellée de discrètes tache de rousseur et un regard qui me cloue sur place. 

—  Salut. 

Tout le beau discours que j'avais préparé est envolé tant cette fille m'intimide. 

—  Vous êtes qui, vous deux ?

Même ma caractérielle de cousine serait bien incapable de prendre les devants et d'expliquer la raison de notre présence. Elle-même ne connaît pas toute l'histoire et ne sait pas pourquoi j'ai tant voulu rencontrer Katrina. 

— Je m'appelle Kendall et elle, c'est Eleanor. Je suis élève au lycée Turnwood.

Lenny affiche une grimace en m'entendant utiliser son vrai prénom mais ce n'est rien comparé à l'expression qui prend possession du visage de Katrina et de son père. Jamais je n'aurais dû préciser de quel lycée je viens mais c'était un pas nécessaire à franchir. 

—  Vous n'êtes pas les bienvenues ici, aboie son père. 

—  Je.. je suis une amie de Betty. 

Ma tentative est désespérée et c'est plutôt minable d'utiliser mon amitié avec la blonde pour parvenir à mes fins. Pourtant, ça fonctionne puisque la colère qui déforme les traits de Katrina se radoucit un peu. 

—  Tu es vraiment une amie de Betty ? 

—  Oui. Je.. j'aimerais te parler. 

—  Lui parler ? répète sèchement son père. Il n'en est pas question. 

—  Papa, le coupe alors Katrina. Laisse moi gérer, d'accord ? 

Si on se fie au faciès de cet homme, on pourrait affirmer que la seule chose qu'il désire, c'est de nous claquer la porte au nez et de préserver sa fille de tout contact extérieur. Pourtant, il bat en retraite avec réticence. 

—  Entrez, nous invite la brune.

Le fait qu'elle se soit opposée à son paternel ne signifie apparemment pas qu'elle éprouve une once de sympathie pour nous. C'est tout le contraire. Lorsqu'elle s'écarte pour nous laisser franchir le pas de la porte, elle nous dévisage comme si nous étions des lépreuses. 

Lenny me lance un regard du style dans-quelle-situation-tu-nous-as-fourrées avant de me suivre dans l'appartement. Nous atterrissons dans un couloir étroit où sont alignés plusieurs bacs à chaussure. Du coin de l'œil, je distingue une cuisine mais Katrina nous guide au salon où, au fond, se trouve une porte qui mène, je suppose, à sa chambre. 

Un tas de sensations indescriptibles déferlent en moi. L'excitation, la peur, l'angoisse... j'ai tellement entendu parler de cette fille qu'elle est mon esprit un secret impossible à percer. Et voilà que je me retrouve à entrer dans sa chambre.  

Sans le vouloir, je regarde Lenny avec embêtement. Je ne serai jamais arrivée ici sans elle mais maintenant que Katrina est à portée de main, je ressens le besoin d'être seule avec elle. Après tout, le sujet principal que je souhaite aborder est le Temptation's Game et ma cousine n'est aucunement au courant pour le jeu. C'est égoïste, je le sais. 

Ma culpabilité se renforce lorsque Lenny, qui me connaît assez pour décrypter mes expressions faciales, lance : 

—  Je vais rester ici, ok ? Vous devez avoir des choses à vous dire. 

Katrina plisse les yeux comme pour se demander ce qu'on peut bien avoir à se dire. Quant à ma cousine, elle a l'air tout sauf ravie de devoir se coltiner le père désagréable mais elle m'adresse un petit sourire résigné. Je la remercie du regard. 

A DANGEROUS GAMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant