Laisse-toi faire...

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Les deux femmes étaient parties s'installer dans le petit salon après avoir fini leur repas. Elle s'étaient raconté les nouvelles, l'une avait parlé de ses affaires, l'autre de ses patients. Miranbeau avait ouvert une bonne bouteille pour l'occasion, car comme elle, Justine appréciait les bonnes choses. Au bout de plus d'une heure de conversation, Justine alluma une cigarette.

"-Bon, tu vas la chercher ? Finit-elle par demander un crachant une épaisse fumée.

Miranbeau acquiesça mais ne quitta pas son fauteuil pour autant.

-Je crois que je commence à comprendre, soupira Justine en analysant la femme d'affaire.

-Oh je t'en prie, ne joues à la psy avec moi, grogna Miranbeau.

Justine esquissa un sourire avant d'hausser les épaules.

-Je ne te pensais seulement pas capable de faire preuve de tant de retenue.

-Je te l'ai dit, je veux seulement prendre mon temps, elle n'était pas prête alors je n'ai pas insisté.

-Ça paraît évident, mais je jure que l'entendre de ta bouche relève du miracle, ironisa Justine.

-Que veux-tu... Soupira Miranbeau en se levant, je deviens peut-être un peu fleur bleue... Elle quitta la pièce en laissant la porte ouverte derrière elle. Juliette ? Appela-t-elle en bas des escaliers.

Bientôt, le plancher craqua à l'étage et des pas hésitants se firent entendre dans les marches.

-Viens par ici, ordonna Miranbeau en guidant la jeune femme jusqu'au petit salon où était installée Justine.

Héla jeta un regard terrifié à Miranbeau.

-Qu'est ce que vous... Articula-t-elle avant que sa voix ne s'étouffe dans sa gorge. Miranbeau s'était installée sur son fauteuil et la regardait avec une douceur qu'Héla ne lui connaissait pas.

-Vas'y, dit Justine d'une voix calme et posée, installe-toi n'aies pas peur...

Héla s'exécuta la boule au ventre. Elle ignorait ce que les deux femmes attendaient d'elle, mais elle craignait déjà le pire. Voulaient-elle la tuer ? C'était pour ça que Miranbeau était si douce à son égard tout à coup ?

-Allez chérie, détend-toi, il ne va rien se passer, l'encouragea Miranbeau. La femme d'affaire se leva et alla chercher un verre à la jeune femme. Elle le remplît avec l'une de ses meilleures bouteilles de wisky avant de le tendre à Héla. La jeune femme hésita, elle n'était pas à l'aise avec l'alcool, et l'idée de perdre le contrôle devant les deux femmes la terrifiait au plus haut point.

-Bois, lui conseilla Justine en lui faisant un clin d'oeil amical, Adèle risque de mal le prendre, c'est l'une de ses meilleures bouteilles.

Héla fît mine de ne pas avoir relevé, pourtant, il lui semblait ne jamais avoir entendu le prénom de Miranbeau auparavant. Adèle... Cela sonnait étonnement bien. La jeune femme trempa timidement le bout de ses lèvres dans le verre et fît de son mieux pour réprimer la grimace qui suivit sa première gorgée.

Miranbeau reprît sa place dans son grand fauteuil rouge et s'étira longuement.

-Alors il paraît que tu aimes la botanique ? Demanda Justine.

Héla hocha la tête.

-C'est bien, ironisa la médecin, je n'osais pas lui dire, mais le jardin est dans un piteux état... Je soupçonne même ses voisins de venir désherber pendant la nuit pour ne pas être envahi.

Héla réprima un sourire.

-Ne l'écoute pas, siffla Miranbeau, cette femme est une vraie vipère. Tu peux le dire tu sais ? Que tu es jalouse de mon jardin, et de ma maison même, ça ne t'arracherait pas la langue...

-Oh... La déco est bien trop austère, on se croirait dans un vieux château écossais, critiqua Justine qui s'était rapproché d'Héla l'air de rien. Elle avait même posé sa main sur la cuisse de la jeune femme qui s'était crispée à ce contact, mais avait fini par l'ignorer. Tu devrais lui dire, marmonna Justine à l'oreille d'Héla, peut-être qu'elle t'écoutera toi.

-Ne t'avises pas de critiquer mes goûts, la menaça aussitôt Miranbeau avec une pointe d'ironie. Héla, elle, sentait les battements de son coeur s'apaiser peu à peu. Plus le temps passait, et plus les taquineries entre Miranbeau et son amie la mettait à l'aise. Pour la première fois depuis son arrivée, la jeune femme se sentit presque... rassurée. Où du moins, elle ne sentait pas la menace d'une mort imminente planer au-dessus de ses épaules comme un oiseau de chasse au-dessus de sa proie.

Plus tard, c'est Justine qui se leva pour re-remplir le verre d'Héla, ensuite, Miranbeau s'en chargea, puis de nouveau Justine, jusqu'à ce qu'un voile très léger vienne valser sur la vision d'Héla. 

-Oh pauvre chérie... Grommela Justine, cette Lawrence ne sait pas à côté de quoi elle passe.

Héla haussa les épaules avec un sourire triste.

-Tu ne vas pas nous la jouer sentimentale aussi... Siffla Miranbeau qui s'était assise de l'autre côté Héla.

Il y eût un silence, et la jeune femme se sentit tout à coup mal à l'aise. Elle se releva, et sentit qu'elle avait déjà trop bu à la façon dont le sol semblait s'étirer sous ses pieds.

-Je suis désolée... Marmonna-t-elle, je vois bien ce que vous essayez de faire mais je n'en ai pas envie. Héla s'éloigna mais Miranbeau la retînt par le poignet.

-Nous ne faisons que discuter, je ne te forcerais à rien ce soir. Déclara Miranbeau. 

Justine se leva et alla allumer le poste de musique qui était posé sur le rebord de la cheminée éteinte. Un air de piano flotta dans la pièce et Héla reprît finalement sa place à côté de Miranbeau.

-Ne te tracasses pas, Souffla Justine suivant l'air de la mélodie, on est entre nous. En finissant sa phrase, la médecin vînt s'assoir à califourchon sur les cuisses de Miranbeau. Elle l'embrassa langoureusement. Lorsqu'Héla détourna le regard, Justine sentît Miranbeau sourire au bout de ses lèvres. 

-Allez... Grogna Miranbeau avec fièvre, ne me fais pas croire que tu n'aimes pas ce que tu vois...

-Je ne... Mais Héla ne parvînt pas à finir sa phrase, les battements de son coeur avaient redoublé d'intensité, et les picotements qu'elle ressentait dans son bas ventre la faisaient rougir de honte.

Le sourire de Miranbeau redoubla d'intensité, elle voulut attraper la main de la jeune femme, mais celle-ci se leva et s'éloigna de plusieurs mètres avant qu'elle n'ait pu le faire.

-Tu as le droit de ressentir du désir tu sais, Lança Justine à son attention, c'est humain, on ne contrôle pas ces choses là.

-Je ne ressens rien. Répliqua Héla d'un ton trop sûre pour être crédible. La médecin sourît mais n'ajouta rien de plus.

-Très bien... Souffla Miranbeau en enfouissant sa tête dans le cou de Justine. Elle la mordit férocement pour lui arracher un soupir alors qu'elle laissait ses mains se balader sous son tee-shirt. Justine gémit, sans doute un peu trop bruyamment pour que cela paraisse naturel  mais les deux femmes s'étaient entendues avec un regard, et elles savaient exactement où elles voulaient que ce petit jeu les mène.

Héla se retourna vers la cheminée aussi sec, et se mordit l'intérieur des joues en sentant les palpitations dans son ventre redoubler d'intensité. Miranbeau vît que les oreilles de la jeune femme avaient viré au rouge écarlate en relevant les yeux. Elle frissonna de désir, elle touchait au but.

-Je... articula Héla la voix presque aussi tremblante que ses jambes, je crois que je vais vous laisser. Sans attendre, elle se dirigea vers la porte. Pourtant, au moment ou elle s'apprêtait à l'ouvrir, la voix de Miranbeau la figea instantanément.

-Ou... Tu pourrais rester... Tu n'aurais qu'a... te laisser faire."

Madame MiranbeauWhere stories live. Discover now