ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟚𝟞

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Sébastien ne m'a pas tenu rigueur du fait que je ne puisse pas le voir ces derniers jours. Il s'est lui-même retrouvé bien occupé entre ses rendez-vous et les heures de garde qu'il a enchaînées. On a fini par ne plus se croiser qu'en coup de vent, quand il récupérait son fils à la piscine.

Aujourd'hui ne déroge pas à la règle.

— Je te promets que j'essaierai de faire en sorte qu'on se voit bientôt, me jure-t-il. Entre mes horaires et tes disponibilités, c'est devenu compliqué, mais on va trouver.

— Je te fais confiance. Mais tu sais, je ne suis pas particulièrement pressé.

— Tu m'as écouté la dernière fois quand ça n'allait plus trop. Je te dois bien ça.

— Tu m'as bien laissé me plaindre aussi. On est quitte là-dessus.

Je jette un coup d'œil en direction de sa voiture et remarque le léger agacement de son fils adossé contre celle-ci.

— Je crois qu'Ulrick t'attend.

Sébastien observe derrière lui et sourit à l'adolescent, sans pour autant le rejoindre.

— C'est amusant de voir les rôles inversés.

— C'est toi qui es devenu l'enfant ingérable.

— Tout de suite les grands mots !

— J'ai l'image de toi recouvert d'un pull de Noël bien ancré dans ma mémoire, mimé-je en indiquant ma tempe

— Ne me rappelle pas cet écart. Je vois encore mon fils pleurer en me voyant avec...

— Je plains ce pauvre garçon !

Sébastien rit timidement et croise les bras sur sa poitrine. Je remarque que la distance qu'il met entre son fils et lui est purement volontaire.

— Papa ! l'appelle Ulrick à l'autre bout du parking. Je te signale qu'on a rendez-vous dans une demi-heure !

— Ton fils te rappelle à l'ordre, m'amusé-je. Tu devrais y aller avant qu'il te tire par les oreilles.

— Décidément, c'est le monde à l'envers.

Il me souhaite une bonne fin de journée et retrouve son fils, qui soupire lourdement en le voyant enfin revenir vers leur voiture. Ça me paraît souvent bien compliqué d'élever un adolescent. Je ne gère le groupe que quelques heures par jour et c'est déjà bien assez. Je salue le courage et la persévérance de Sébastien pour le faire tous les jours. Heureusement qu'il n'en a qu'un.

Je m'apprête à rentrer dans le bâtiment pour récupérer mes affaires et remarque un des jeunes assis sur le rebord en béton.

— Thomas ?

L'adolescent sursaute et passe le revers de sa main sur ses joues. Je jurerais l'avoir vu pleurer.

— Tu vas bien ?

— Ouais... C'est juste une connerie, m'explique-t-il en soulevant son téléphone.

C'est très certainement le pire menteur que j'ai vu. Je m'assois à côté de lui et il ne cherche pas à me repousser.

— Si tu cherches à me faire parler, ça marchera pas.

— Tu sais que je ne forcerai à rien.

Voyant que je ne l'oblige pas à me parler, il s'affaisse un peu plus. Thomas n'a jamais été le garçon le plus avenant du groupe. Il n'y avait qu'Antonin qui lui permettait de s'ouvrir un peu plus aux autres, mais depuis quelque temps, ils sont devenus si distants que je doute de les voir se réconcilier un jour.

AubadeWhere stories live. Discover now