Chapitre 27

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Mon rêve commença de la façon suivante :

J'étais dans la même salle sombre que la dernière fois, avec le même homme/dieu de la dernière fois. Cette fois, il était appuyé négligemment contre le mur, vêtu d'un jean noir et d'une chemise blanche dont les trois boutons du haut n'étaient pas attachés. Avec ce style de vêtements, il paraissait plus jeune. En fait, il me rappelait quelqu'un, mais je n'arrivais pas à mettre la main dessus.

- Cassandra, lança-t-il.

Même sa voix m'était familière, et ce n'était pas parce qu'il s'invitait dans mon quotidien tous les deux jours.

- Que me voulez-vous ? demandai-je d'un ton agacé.

Je n'avais pas peur. J'étais totalement déconnectée de la réalité, comme toujours dans ce genre de rêves, qui étaient de plus en plus fréquents.

Il rit et regarda un point derrière moi.

- Vous voyez ? Je vous avais dit qu'elle s'était endurcie.

Je fis volte-face. J'eus l'impression de recevoir un coup de poing dans le ventre, et ma bouche s'ouvrit sur un cri silencieux.

Mon père se tenait debout près du mur derrière moi, l'air épuisé, plus maigre que la dernière fois que je l'avais vu, les mains derrière le dos comme s'il était attaché, ce qui était sans doute le cas. Ma mère était à ses côtés, s'appuyant sur le mur pour ne pas tomber. Elle tremblait, je pouvais le voir à cette distance.

Je voulus crier leurs noms, mais d'autres mots sortirent de ma bouche :

- C'est vous. C'est vous qui les avez enlevés.

C'était évident, si évident. La vérité m'explosa à la figure, et je serais tombée si je n'avais pas été brusquement incapable de faire le moindre mouvement. Mes pieds étaient ancrés au sol. J'avais l'impression qu'on me donnait des coups dans le ventre sans discontinuer, et qu'une main invisible me serrait la gorge jusqu'à m'étrangler. L'air ne passait plus dans mes poumons.

- Maman ? appelai-je d'une voix faible, mais elle ne tourna pas la tête vers moi. Papa ?

- Inutile, ils ne t'entendent pas, fit le dieu d'un air ennuyé. C'est notre rêve, pas le leur.

Je me secouai et repris le contrôle. Je ne devais pas m'effondrer maintenant. Pas devant lui.

Jamais.

- Où sont-ils ? demandai-je d'une voix relativement calme pour la situation.

- Tu ne crois quand même pas que je vais te le dire, fit-il d'un ton réprobateur.

- Pourquoi les avez-vous enlevés ?

Il sourit et se rapprocha de moi. Je ne pouvais toujours pas bouger.

- J'attends quelque chose de toi, souffla-t-il.

- Qu'est-ce que c'est ?

Il me tapota l'épaule puis s'écarta.

- Une vie. Tout simplement.

- Vous voulez ma vie contre la leur ? répétai-je.

Il agita la main.

- Non, pas la tienne. Tu es beaucoup trop précieuse. Pour l'instant, tu m'es plus utile vivante.

J'ouvris la bouche pour parler, il ne m'en laissa pas l'occasion. Il claqua des doigts, ses lèvres s'étirèrent dans un sourire terrifiant, et tout devint noir.


Nahui Ollin - Le Cinquième SoleilWhere stories live. Discover now