Epilogue

25 2 9
                                    

De : V.Loss@mail.fr

A : Cass.S@mail.fr 

Objet : ... 

Cass,

J'ai écrit ce mail à l'avance, dans l'hypothèse où les choses se passeraient comme elles se sont passées. Ma seule angoisse était de ne pas pouvoir te l'envoyer à temps.

Si tu lis ce message, c'est que je suis morte, et je te prie de m'excuser pour cette phrase que tu as déjà dû voir dans nombre de livres. Mais les phrases les plus simples et les plus répétées sont souvent les plus vraies.

Que puis-je te dire ? Excepté que je suis désolée, encore et encore. Désolée de n'avoir pu prévoir ce qui allait se passer. Nous n'aurions pas dû nous jeter tête baissée ainsi. Et maintenant, je suis morte alors que je devais te parler de beaucoup de choses importantes.

Premièrement, et je te vois d'ici lever les yeux au ciel, j'aimerais te parler d'Adrian.

Tu dois te demander ce que je raconte. Laisse-moi t'expliquer. Imagine que la vie est une voiture. Tu es au volant, tu gères les vitesses, tu contrôles. Adrian a à peine touché son propre volant que la voiture a foncé droit dans un mur et que sa vie a volé en éclat. Et que fait-on, Cass, quand on n'a plus de voitures ? On en cherche une nouvelle. Le laisser entrer dans ta vie, c'est aller s'assoir à la place passager et lui laisser ton volant. Et qu'est-ce qui se passe ? C'est comme un jouet pour lui. Il s'amuse, il appuie sur tous les boutons possibles, il teste la vitesse maximale... puis il perd le contrôle et la voiture finit encastrée dans un mur, ta vie est foutue en l'air. Et toi, tout ce temps, tu étais assise à la place passager, en train de regarder, impuissante. Et là, tu auras beau le maudire, pleurer, le rejeter, le mal sera fait. Au fond, tout sera de ta faute. C'est toi qui lui as ouvert la portière.

Je ne te parle pas seulement d'amour. Je te parle de survie. Je ne pense pas qu'il soit intentionnellement mauvais... mais parfois, les sentiments qu'on ressent envers quelqu'un nous font oublier la raison. N'oublie pas qui il est. N'oublie pas qu'il a fait des conneries, qu'il en refera, et que certaines seront plus graves que d'autres. Ne t'attache pas trop à lui, ne te fie pas aveuglément, ne le pense pas irréprochable.

Je sais, tu dois me haïr, maintenant. Je suis morte et je continue de te donner des ordres et des conseils. Ne m'en veux pas pour ces derniers. Si tu refuses de les suivre, si tu penses que tu parviendras à survivre à tout ce bordel sans mes mises en garde, et bien soit. Dans ce cas, prend plutôt ce message comme une lettre que j'aurais dû m'adresser à moi-même il y a plusieurs mois, quand j'ai rencontré Adrian la première fois. Nous sommes tous les mêmes. Tous certains que nous sommes plus forts que les autres, plus aptes à réussir. Mais ce n'est pas le cas. Pas cette fois. Pas avec lui.

Encore une chose, Cass. Je n'ai aucun doute que Darius se sentira coupable s'il devait m'arriver quelque chose, quelle qu'elle soit. Il rejettera la faute sur quelqu'un pour échapper à la culpabilité qu'il ressentira. Il prétendra qu'il se moque de ce qu'il peut bien lui arriver. C'est faux, bien sûr. Il est trop fragile, j'ai terriblement peur de sa réaction. Veille sur lui, je t'en prie, veille sur lui pour moi.

Tu sais ce que tu as à faire à présent, pas vrai ? Tepeyollotl ne va pas attendre éternellement que tu reprennes des forces. Il possède toutes les cartes en main. N'oublie pas qu'à présent le processus est lancé, et que si quelqu'un a le pouvoir de le stopper en cours de route, c'est toi, et toi seule. Tepeyollotl et Tezcatlipoca veulent détruire, Cass, juste détruire le monde, et nous avec. Peu importe ce qu'on te dira, peu importe si Alexander veut te tenir à l'écart, en espérant que cela empêchera le cours des évènements. La prophétie, ta prophétie, est lancée. C'est à toi de sauver ceux qui peuvent encore l'être. Tu n'as plus beaucoup de temps. Laisse Alexander et Darius faire leur deuil et réorganiser leurs idées pour avoir la tête claire. Ils vont sans doute essayer d'arrêter les dieux sans ton aide, mais ils n'y parviendront pas. C'est toi l'élue. Leur charge est de t'aider, pas de prendre ta place.

Ce n'est pas terminé. Ne renonce pas, je t'en prie.

C'est tout ce que j'avais à te dire, Cass. Penses-y. Et j'espère que tu survivras jusqu'à l'année prochaine. Vittoria


Nahui Ollin - Le Cinquième SoleilOnde histórias criam vida. Descubra agora