Chapitre 6 : Partie III

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Silencieuses, et avec lenteur, les larmes glissaient sur la peau d'Iria. La Protégée n'avait même pas eu la force de soulever une de ses paupières. Elle n'en avait pas besoin de toute manière. Il était parti. Elle le sentait. Il n'y avait plus que le feu pour réchauffer la maigre bâtisse, pour la réchauffer elle. Les yeux clos, elle ne sentait plus ce regard lourd, horripilant et surprenant. Elle se sentait plus observée. Mais ce n'était pas pour autant qu'elle se sentait mieux.

Ses membres brutalisés continuaient à pulser de souffrance. Ses tympans vibraient comme silencieusement. Elle sentait juste leur bourdonnement. Un son et une sensation qui ne faisaient que lui donner l'impression de se trouver à nouveau les pieds dans le vide, le vent s'enroulant autour d'elle et lui hurlant de lâcher prise. Et il y avait ces autres sons. Son cerveau ne pouvait s'empêcher de lui repasser encore et encore leurs échanges. En échos lointains et désordonnés, ils l'attaquaient telle une multitude d'abeilles.

Iria tenta de lever ses mains. L'adolescente ne voulait plus que faire taire tous ces bruits. Elle ne souhaitait plus que presser ses paumes sur ses oreilles et s'épancher allégrement dans le silence. Sauf que les liens qui l'entravaient étaient toujours présents. Ils étaient toujours là, bloquant le moindre de ses mouvements. Ils étaient toujours là telle une marque au fer rouge pour lui rappeler sa position, sa place désormais.

La jeune fille hésitait entre hurler jusqu'à s'en exploser les poumons ou simplement se laisser aller au désespoir.

C'est alors que doucement, le feu sembla perdre en intensité et en chaleur. Iria le perçut sans vraiment y porter attention. Les flammes s'étouffaient sans doute sur elles-mêmes puisque le sorcier s'était éloigné. A moins qu'une autre personne n'approche.

Lui faisant écho, des raclements se firent entendre. Distraitement, l'adolescente fronça les sourcils avant de parcourir la pièce des yeux. Le feu avait bien perdu en force. Mais il n'y avait nulle trace de l'origine de ces bruits. Iria avait beau chercher, il n'y avait même pas l'ombre d'un rongeur dans la maisonnette. A fleur de peau, elle crut avoir rêvé.

Avant que les raclements ne recommencent. Surprise, la jeune fille l'était. Cependant, à cet instant, ses instincts étaient plus forts que ses sentiments. Fouillant de nouveau les coins et le recoins de la salle, elle n'aperçut rien de plus. De là où elle était, elle ne voyait pas toute la bâtisse mais elle en voyait assez pour être sur que ces sons ne provenait pas de l'intérieur. S'il y avait un danger, il fallait qu'elle l'identifie pour pouvoir s'en protéger. C'était ainsi qu'elle fonctionnait. Mais actuellement, elle ne voyait rien d'étrange, rien qui pourrait expliquer ces bruits.

Se tournant sur le flanc, l'adolescente tenta de se redresser sur un coude. La tentative fut périlleuse, néanmoins, elle réussit tout en évitant de s'étaler sur le sol. Son regard capta alors un éclat. Les flammes avaient beau diminuer, elles ne continuaient pas moins à éclairer jusqu'aux branches de l'autre coté des vitres poussiéreuses. Et derrière l'un de ces carreaux encore intacts, deux iris jaunes luisaient.

-Ed!

Le cri soulagé lui échappa sans qu'elle ne s'en rende compte.

Se redressant, l'animal dévisagea la Protégée d'un œil critique.

-Moins fort Iria.

Il se retourna pour guetter l'obscurité avant de revenir vers elle. Elle le vit allégrement lâcher un soupir.

-Je ne peux même pas te laisser une journée toute seule sans que ça ne vire à la catastrophe!

A l'écoute de ses mots, l'adolescente eut envie de nier tout en sachant qu'il y avait une part de vérité. Sous le regard acéré du chat, elle ne put qu'étouffer ses nouvelles plaintes.

Malédiction de sang (en suspens)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant