Chapitre 4: Partie I:

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Chapitre 4: La source d'argent

         La nuit avait beau être froide, elle étouffait. Bien que la brûlure de sa marque s'était apaisée, elle ne s'était toujours pas éteinte. Tout comme il reste des braises dans un feu, des ondes de chaleur demeuraient logées à la base de sa nuque. Tirant sur les rênes d'Éclipse, elle la força à ralentir. Une fois au pas, elle la dirigea vers le couvert d'un bois. Frottant distraitement sa nuque, elle jaugea du regard les environs. Les plaines se découpaient entre différentes haies et forêts. Il y avait beau y avoir des champs, les arbres ne demeuraient jamais très loin. Ce qui était presque un soulagement pour la jeune femme. Cependant, cela coupait aussi sa vision.

Fermant les paupières, elle se força à respirer calmement. La respiration de sa jument était aussi hagarde que la sienne. Après deux jours d'intense chevauchée, cela pouvait largement se comprendre. Éclipse était endurante. Très endurante mais elle ne pouvait pas non plus faire l'impossible. Elle aussi était un être vivant avec des besoins. Et aujourd'hui, toutes deux avaient besoin de repos. Elles avaient besoin de se laisser aller, juste un petit peu. Pénétrant sous le couvert des arbres, Iria leva la tête pour observer cette couverture végétale. L'une des seules protections qu'elle aurait cette nuit. Le ciel se devinait à peine derrière cette barrière. Relâchant sa prise sur les rênes d'Éclipse, la jeune fille la laissa se mouvoir avec une liberté presque totale entre les arbres. Les troncs proches étaient trop serrés pour laisser passer un groupe de cavalier. Cependant, un cheval seul pouvait aisément s'y aventurer. Se collant tout contre la crinière de sa jument, Iria lui faisait confiance pour la guider. Des branches basses effleuraient souvent sa tête. Elle percevait le bruit des brindilles qui se cassaient sous les pas puissants de son amie.

Refermant ses paupières, elle se concentra sur ses perceptions et laissa la rude tâche de les mettre en sûreté à sa jument. Les yeux clos, Iria avait presque l'impression de dériver dans une mer de sons. Se concentrant sur son ouïe, elle sentit son énergie affûter progressivement cet unique sens. Chaque pas de sa jument lui parut soudainement encore plus lourd et plus fort. Marcher aux cotés d'un géant aurait alors eu le même effet. Rejetant cette perception-ci, la sorcière essaya de se projeter plus loin. C'était d'autres bruits qu'elle essayait de percevoir. C'était d'autres choses qu'elle cherchait à entendre. Comme si son sens s'allongeait, Iria entendit brusquement toutes sortes de sons. De l'eau qui s'écoulait aux frottements presque silencieux de certains mammifères. A cet instant-là, plus rien ne lui échappait. La jeune femme soupira rassurée. Il n'y avait aucune autre respiration humaine dans les parages. Elles étaient seules dans ce bois. Enfin, peut-être pas si seules étant donnée que la vie animale fourmillait dans le coin.

Relevant la tête, Iria étudia silencieusement les environs. Les arbres étaient toujours aussi serrés autours d'elle. Cela pouvait être à la fois une protection et une menace. Elles devaient pouvoir fuir rapidement en cas de problème. En même temps, plus il était difficile de s'enfoncer dans ce bois, plus elles y seraient introuvables. Frottant avec tendresse les poiles de sa jument, Iria l'encouragea à un dernier effort.

        Cavaler dans tous les sens. Chevaucher toujours plus vite, toujours plus longtemps. Galoper à vive allure était d'ordinaire un plaisir pour lui. Pourtant, aujourd'hui, cela s'apparentait plus à de la torture. La fille lui avait échappé. Encore.

C'était ce ''encore'' qui le mettait hors de lui. Comment avait-elle pu s'enfuir alors qu'ils étaient si proches? Comment avait-il bien pu la rater?

Avisant d'un regard les deux cavaliers qui le suivaient, il sentit l'agacement le submerger à nouveau. Bon sang! Mais qu'est ce qu'il avait fait pour mériter ça? Les capes noires fouettaient rageusement l'air alors que les cheveux fendaient avec énergie les champs environnant. Erwan supportait de moins en moins la présence des autres sorciers. Ces derniers n'avaient mis qu'une bonne journée pour le rejoindre alors que lui s'était déjà lancé à la poursuite de la fugitive. Cette fille l'énervait. Il la haïssait tellement qu'il n'avait plus qu'une envie, l'attraper et l'empêcher de fuir à nouveau. Il souhaitait presque désespérément la capturer. A cause d'elle, il venait à douter de lui. Pire, il commençait à croire que jamais il ne pourrait la saisir. Ce qui était impensable. Il devait la capturer autant pour panser son égo blessé que pour satisfaire son maître. Elle ne devait plus lui échapper.

Malédiction de sang (en suspens)Where stories live. Discover now