7.

20.5K 2K 123
                                    


Ma djellaba traîne au sol et je la remonte légèrement en la coinçant dans l'élastique de ma culotte. Bon ok, ce n'est pas très distingué mais ça me permet de courir en toute tranquillité. Comment j'ai bien pu oublier ces satanées patates ? Je suis obligée de faire des frites pour accompagner mon poulet aux olives sinon je le vivrais vraiment mal. C'est une tradition chez moi, avec des frites sinon rien ! J'accélère le pas, je tourne une fois à gauche, puis une fois à droite et j'arrive droit devant l'épicerie. Je sais qu'il est 20h45 mais j'espère très fort qu'Omar est encore ouvert. Pourtant, je n'ai pas du espérer assez fort car la grille est descendue à moitié. Il n'est pas fermé, mais je ne peux plus rentrer. Merde. Fait chier. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir servir à Aïda ! Oui on mangera tard, mais là on ne mangera pas du tout ! Cet inconvénient a le don de m'énerver, et je fous un coup de pied dans cette foutue grille. Je ne blâme pas Omar, mais bien moi. Comment on peut oublier d'acheter des batata alors qu'on sait qu'on va faire un plat en contenant ? Qu'est-ce qu'il me manque dans la cervelle ? C'est plus une case là, c'est bien plus que ça. La bouffe c'est sacré chez moi, on ne peut pas faire les choses à moitié. Comme on le dit si bien, c'est soit tout, soit rien. Et il me faut des frites ! Je commence aussi sérieusement à me maudire car mon coup de pied, parfaitement inutile, a au moins réussi à me faire mal aux orteils.

Je sors mon téléphone de ma poche, et j'observe mon fond d'écran. 20h46. Aucun commerce n'est encore ouvert à cette heure-là. Avant de reprendre ma route jusqu'à chez moi, je défais mon chignon et tente de le refaire. Ma course l'a exterminé et les mèches qui me tombent dans les yeux me gênent. Alors que je suis en pleine concentration pour essayer de réussir à faire un troisième tour à l'élastique, un bruit assourdissant me fait sursauter.

La grille se lève avec une lenteur affolante. Un mec en sort, capuché et cerné, ça ne peut qu'être Oussama. Il pose un pied sur le trottoir avant de m'apercevoir, juste à côté de lui. Il ne devait vraiment pas s'y attendre car il sursaute en portant la main sur son cœur.

Ouss - Putain de bordel de merde !

- Wowww, zen !

Ouss - Mais ça va pas de sortir de nulle part comme ça !

- Bah alors, je suis si effrayante que ça ?

Je le taquine, et il m'offre un sourire.

Ouss - Ouais j'crois que.. Tu vois c'est en rapport avec ton faciès.

Il fronce le nez, comme en signe de dégout et commence à fourrer la clé dans la serrure de la grille pour la rabaisser.

- Est-ce que t'es en train d'insinuer que je suis moche à en faire peur ?

Ouss - Surement.

Je suis estomaquée. Quel goujat. Et ça me fait rire.

Ouss - Qu'est-ce que tu fous là Radia ? Tu devrais pas trop traîner ici.

Il lance un regard vers derrière avec un regard réprobateur avant de reporter son attention sur moi.

- Enfaite... Je voulais acheter des patates.

A ça non plus il ne devait pas s'attendre car il hausse les sourcils.

Ouss - Tu quoi ?

- Je... J'ai invitée Aïda à manger et.. Il me faut des patates.

Ouss - T'en a pas ?

- Si j'en veux, c'est sûrement parce que j'en ai pas.

Je murmure un « débile » inaudible.

Ouss - On ferme à 20h30.

- Techniquement vous êtes pas encore fermé là.

Ouss - Tu joues sur les mots.

- Ecoute je sais que j'abuse, mais je te paye le double de ton paquet si tu veux, mais lâche moi un filet de patate s'il te plaît.

Ouss - Et pourquoi je ferais ça ?

Bonne question. Il attend ma réponse avec son petit sourire narquois, me taquinant du regard.

- Parce que tu es gentil ?

Il éclata de rire, son rire résonna entre les murs de béton, il se répercuta et on l'entendait en écho. C'était étrange, mais pas déplaisant. Son rire avait quelque chose de contagieux et mes dents pointaient le bout de leur nez sans mon autorisation.

Ouss - On me l'avait jamais faite celle là.

- De quoi ?

Ouss - "T'es gentil".

- T'es méchant ?

Ma question sembla le déstabiliser puisqu'il mit quelques secondes avant de me répondre.

Ouss - J'en sais rien.

Ma curiosité est piqué vive, mais je n'ai pas le temps de poser plus de questions qu'il entre dans la boutique.

Ouss - J'ai plus de filets de 5kg, il me reste que des 10 kg, ça te va ?

- Euh... oui ?

Ouss - Très bien, de toute manière t'as pas trop le choix.

- Je te dois combien ?

Il ressort du magasin, et cette fois entre la clé pour de bon. La grille se referme, lentement, en faisant un vacarme à nous percer les tympans. Pendant ce temps, il se tourne vers moi, envoie ses yeux à la recherche des miens et nous nous fixons sans rien dire. C'est un moment gênant. Mais bien que mal à l'aise, je n'arrive pas à détourner le regard. Je suis trop attiré. Quand enfin la grille claque sur le sol, il me tend mon filet.

Ouss - Tiens.

- Je te dois....

Ouss - Attrape ! me coupa-t-il.

Mes doigts se coincèrent dans l'anse, sauf qu'au lieu de porter le sac, c'est le sac qui m'a porter. Bon Dieu, c'est lourd 10 kg ! J'imaginais pas que ça l'était autant ! Il faut pourtant que je garde une attitude sereine face à Oussama. Mais j'ai beau essayer, c'est trop dur. Je sais que j'ai un corps de lâche et que mes muscles sont faibles, mais me retrouver dans l'incapacité de porter des patates ça ne m'était encore jamais arrivé.


Garde la tête haute Radia, soit sereine et maître de ton corps. Surtout devant lui. D'un coup sec j'ai actionnée mon bras, sans pour autant lever ce fichu filet.

Je sentis d'abord son soupir dans mon cou, me chatouillant la nuque. Puis j'ai senti ses doigts attrapant les miens, les détachants délicatement de l'anse qui me les sciaient.

Ouss - Laisse-moi faire faiblarde.

La main sur la bouche, je l'embrassais doucement. Je fais toujours ça quand j'ai mal quelque part, une sale manie d'enfant. Il fit deux pas avant de se retourner vers moi.

Ouss - Tu comptes bouger un de ces quatre ou tu vas rester planter ici ?

Il se retourne de nouveau, la capuche sur le crâne, le sac de patates dans une main, la démarche sure. Je le suivais à quelques mètres de distance, trop gênée pour m'approcher plus près. Est-ce qu'il compte vraiment se taper 10 minutes de marches seulement pour déposer un sac de patates chez moi ? Non, non. C'est une blague. Je suis sûre qu'il me fait une blague. Pourtant les coins de rues défilèrent sans qu'il ne me laisse en plan. Il marchait en regardant droit devant, sachant parfaitement où il allait. Il m'aidait. Pour de vrai.

***

Bon là ça fait quatre mdrr je sais pas ce qui m'arrive je suis déchainée !!! Je m'arrête là pour aujourd'hui, lâchez moi des votes au moins pour l'effort que mes doigts viennent de faire mdr soyez pas radines. Bonne nuit ♥

« Soleil de mes nuits »Where stories live. Discover now