4 - Coup de blues

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Maddie et Élise étaient en pleine conversation lorsqu'on frappa à la porte. Une jeune femme souriante apparut dans l'entrebâillement.

— Mesdemoiselles, merci de vous rendre dans la salle de conférence au rez de chaussée !

Elle disparut aussitôt et Maddie l'entendit toquer et répéter la même chose à la chambre voisine.

Les deux nouvelles colocataires allèrent ensemble au lieu de rendez-vous où régnait un intense brouhaha. Une centaine de personnes s'y trouvait déjà. Élise prit Maddie par le bras et se précipita vers deux sièges libres. Bien assises, elles continuèrent la discussion entamée dans la chambre.

Maddie était ravie, Élise était encore plus agréable et sympathique que ce qu'elle aurait pu espérer.

Une voix aigüe résonna dans le micro.

— Bienvenue à Felice !

Un concert de sifflements de d'applaudissements retentit. Celle qui était passée dans les chambres se présenta comme Heather Blake, la responsable du dortoir des premières années. Lors des trente minutes qui suivirent, elle détailla le fonctionnement et les règles de la résidence.

Maddie resta difficilement attentive à ce que racontait Heather. Sa voix était si douce que cela la berça. Elle sombra rapidement dans le sommeil et n'en émergea que quand elle sentit une main atterrir sur son épaule.

— Maddie ?

Elle souleva ses paupières alourdies. La lumière artificielle l'aveugla.

— C'est fini, tu viens ? chuchota Élise.

— Déjà ? J'ai rien suivi, marmonna Maddie.

— T'inquiète ! Je te ferai un debrief si tu veux.

La présentation s'était achevée depuis quelques minutes et les discussions allaient bon train entre les nouveaux étudiants présents. Maddie se frotta les yeux. Le voyage l'avait épuisée et la journée du lendemain promettait d'être chargée. Elle avait hâte de se coucher.

Elle se leva et suivit d'un pas lent sa colocataire. Un hurlement strident lui vrilla les tympans alors qu'elle approchait de la sortie. Deux filles bras dessus bras dessous se ruèrent sur Élise.

— Oh mon dieu, ÉÉÉÉÉÉlise ! hurla la plus blonde des deux en lui sautant au cou.

Élise lui rendit son étreinte.

— C'est trop bien qu'on se retrouve ! ajouta l'autre en trépignant.

Maddie resta en retrait et les observa. Ces deux filles transpiraient l'argent. Tout chez elles respirait le luxe ; depuis leurs vêtements haute couture en passant par leurs sacs griffés, leurs bijoux de valeur ou encore leurs chaussures de marque.

Maddie bailla. Pas franchement passionnée par les retrouvailles qui se déroulaient sous ses yeux, elle fit signe à Élise qu'elle montait et quitta la salle.

En arrivant dans la chambre, Maddie fit face au désordre ambiant ; des vêtements étaient éparpillés un peu partout, des piles de sacs et de cartons s'élevaient ici et là. Elle n'avait pas la force de s'en occuper. Elle attrapa une serviette, sa trousse de toilettes, son pyjama et se rendit dans les salles de bains communes. Elle fut rassurée sur un point : elles étaient propres.

Maddie sursauta en tombant nez à nez avec un garçon vêtu d'une simple serviette nouée autour de la taille. Elle réalisa concrètement ce que signifiait « dortoir mixte » et par conséquent « salle de bain mixte ». Elle s'enferma dans une cabine individuelle et se réfugia sous l'énorme pommeau fixé à deux mètres de hauteur. Elle savoura la sensation de l'eau fraiche contre sa peau et resta de longues minutes sous le jet, la tête en avant et les yeux fermés. Elle ne pensait plus à rien.

En sortant de la douche, elle passa un tee-shirt léger et un short de pyjama avant de se planter devant un miroir. En se brossant les dents, elle songea à l'été qu'elle venait de passer et combien le temps avait filé. Ces deux mois avec Anthony avaient été merveilleux. Ils avaient voyagé, de la mer à la montagne, en passant par la campagne. Ils avaient même campé ! Les images défilèrent dans son esprit, aussi réelles que si elle y était de nouveau. Son cœur s'emballa. Ce qu'il lui manquait ! Pour Maddie, ne plus être quotidiennement avec lui était une épreuve. Au lycée, c'était simple, ils étaient ensemble constamment. Ils n'avaient même pas le temps de se manquer. À cette idée, elle soupira et retourna dans la chambre.

Elle se dirigea vers son lit et habilla de draps propres le matelas nu. Elle s'y assit, les coudes sur les genoux, le menton dans les mains et le regard vers la fenêtre, vers le crépuscule. Un pesant sentiment de solitude s'emparât d'elle et elle sentit son cœur se serrer. Elle s'allongea sur le côté et se recroquevilla. Cette séparation était bien plus dure que ce qu'elle avait imaginé. Aux bords des larmes, elle ressentait un vide douloureux.

Quand Élise fut de retour, elle trouva sa colocataire en boule sous la couette. Elle ferma un peu trop vivement la porte et le bruit sortit Maddie de ses pensées. Elle leva la tête du coussin qui sentait bon l'odeur de chez elle.

— Tu te couches déjà ? s'étonna Élise.

— Le voyage a été vraiment long tu sais, expliqua tout bas Maddie.

Élise la regarda d'un œil bienveillant.

— Je comprends. Au fait, tu t'es échappée avant que j'ai le temps de te présenter ! Les deux folles de tout à l'heure, c'est Kristen et Meredith, elles étaient dans ma classe au lycée. Elles m'ont prévenue que sur tout le campus ce soir, on fête le début du semestre ! C'est génial, non ?

Son enthousiasme n'était pas contagieux. Maddie n'avait pas le cœur à s'amuser. La fatigue serait la meilleure des excuses.

— C'est vrai ? Je suis trop claquée, je tiens même pas debout.

Élise vint lui serrer le bras avec compassion.

— C'est pas comme si on faisait jamais la fête à la fac ! Des soirées on va en faire un paquet !

Maddie acquiesça de la tête. Oh ça, elle n'en doutait pas une seule seconde.

Élise s'éclipsa de la chambre et revint quelques minutes plus tard, une serviette entourant son corps. Elle fouilla parmi ses innombrables vêtements pour choisir sa tenue. Elle enfila des talons aiguilles et une robe moulante courte.

Habillée de la sorte, Maddie s'imaginait vulgaire au possible. Ce n'était absolument pas le cas d'Élise. Elle était simplement classe.

Elle vint s'agenouiller au pied du lit de Maddie et chuchota.

— Demain, on s'occupe de faire un truc sympa sur la porte pour écrire nos noms, ok ? Et on personnalise tous ces murs moches, hein !

Maddie lui sourit et opina. Avec un clin d'œil complice, Élise trottina hors de la pièce et claqua la porte. Et puis, le silence.

Maddie bascula sur le dos et inspira profondément. Une vague de mélancolie la submergea. Elle ne voulait pas appeler Anthony et l'inquiéter en s'effondrant au bout du fil. Le cœur lourd, elle pianota un message rassurant à l'attention de sa mère puis fit de même pour son petit-ami.

Épuisée mais l'esprit en tumulte, le sommeil ne la gagna pas. Elle entendit les gens faire la fête jusque tard dans la nuit. De partout éclataient des cris, des rires et de la musique.

Lorsqu'Élise rentra sur la pointe des pieds, la fatigue avait enfin eu raison de Maddie et de ses multiples pensées. Elle dormait à poings fermés.


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