Chapitre 28

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Je me suis un peu coupé du monde extérieur depuis que je suis de retour ici. J'ai enclenché la fonction de rejet d'appels de mon téléphone sauf pour l'avocat. Je n'ai pas envie d'être emmerdé. Quoique je doute qu'on se tracasse pour moi. Je reste à l'intérieur à tout nettoyer et m'applique à faire briller le mobilier comme à l'époque. Ce n'est pas chose aisée mais j'y arrive. Avec l'aide de mon voisin, la façade redevient plus propre et les volets sont repeints. Peu à peu, la vie reprend son cours dans la petite maison.

Je n'ai pas lu les autres lettres qui sont dans la chambre de mon père. Rien que ce que j'ai vu me confirme qu'il m'aimait même si je n'en avais jamais douté. Je ne suis pas intéressé par ce que la femme qui m'a mis au monde avait à dire. Je pense qu'il serait content de voir que je reprends enfin en main notre logement. Si j'avais su, j'y serais revenu bien avant.

J'ai lu quelques courriers de Parker aussi. Je n'aurais jamais dû le faire. Ça me brise le coeur. Parce qu'il était vraiment mal. Autant que moi. Rien qu'avec des mots, j'ai ressenti à quel point il avait envie de faire quelque chose, comment il se sentait impuissant et surtout j'ai compris que si lui m'avait manqué, mon absence avait été toute aussi douloureuse pour lui. Nous étions bien. Devenus plus. Et aujourd'hui, nous ne sommes plus rien. Je préfère ne pas ouvrir les autres. Ça ne sert à rien. Je me fais du mal en pensant à ce que nous aurions pu être tous les deux. La solitude que j'ai toujours connue devient plus difficile à supporter après le temps passé à ses côtés.

J'utilise mon ancienne chambre. Il n'y a qu'une seule nuit, celle où j'ai fait un cauchemar, que je suis allé dans le lit de mon père. C'est idiot, il n'est plus là et je suis un adulte maintenant mais le fait d'être ici m'a rassuré. J'ai pu me rendormir paisiblement. Tout ici me rappelle que je l'ai perdu trop tôt mais en même temps je n'ai que de bons souvenirs entre ces murs. Seulement, je m'apercois que même si j'aime cette maison, je ne suis plus aussi heureux qu'au début de l'avoir retrouvé.

C'est difficile à dire. Je suis tellement dur à comprendre. Je me fatigue moi-même. Quand je me suis dit que j'allais réaliser mes rêves, je le croyais. Seulement, j'avais toujours pensé à quitter cette ville et me trouver une vieille maison en campagne. Une demeure à retaper de mes mains et dans laquelle je pourrais m'installer pour enfin réaliser mes projets de bande-dessinée. J'aimerais le faire. Fuir cet endroit. Vivre une nouvelle vie dans une ville où on ne me connait pas. Seulement, est-ce que mon père aurait voulu que je me sépare de la maison ?

-Je pense qu'il t'aurait poussé à faire ce dont tu as envie, me dit monsieur Carlson alors qu'il m'aide pour le jardin.

-Et la maison ?

-Tu peux la garder si l'envie te prend de revenir ou la vendre tout simplement.

-Il l'aurait accepté ?

-Évidemment. Il aurait tout accepté du moment que tu es heureux.

-Merci.

-De rien petit Travis.

Je grogne juste pour la forme. Le fait qu'il m'appelle encore comme quand j'étais gosse me fait plaisir. On dirait que c'est un peu comme un grand-père pour moi. Il est cool, il est drôle, il est d'une oreille attentive et en plus, il me file de la bière. Que demander de plus ?

Il regagne sa maison quand il est fatigué. Je l'y oblige presque. J'ai depuis quelques jours tendance à oublier que c'est un homme âgé. Il semble tellement vigoureux mais il ne faut pas qu'il en fasse trop. Je m'en voudrais s'il se faisait mal. Je termine donc tout seul puis rentre prendre une bonne douche bien chaude. Je gémis comme un dingue sous l'eau. J'ai les muscles complètement noués. Si j'étais comme les autres et surtout si j'avais quelqu'un, je réclamerais un bon massage. Seulement, je suis seul donc je laisse le jet détendre mon corps le plus longtemps possible. En fait jusqu'à ce que je pousse un cri peu viril quand elle devient gelée. Quel abruti !

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