MOUVEMENT N°2

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𝐋𝐄𝐒𝐋𝐘𝐄

𝐌𝐀𝐈𝐍𝐓𝐄𝐍𝐀𝐍𝐓.



Mes yeux portés vers le ciel, je rêve. Sans savoir de quoi. Mes cours de maths étendus sur mon bureau me jugent, mais je ne m'en préoccupe pas. Quoi qu'ils décident de me dire, ils ne me feront pas changer de position. Pas même un torticolis peut m'en empêcher. C'est comme cela que je passe la moitié de mes journées. Peut-être que je perds mon temps, mais ce dernier ne sert à rien s'il n'est pas usé de la sorte.

Je m'imagine plus âgée, belle et talentueuse. Je m'imagine heureuse d'être celle que j'ai pu devenir. Sûrement pas la meilleure Leslye, mais celle que mon cœur veut. Il est rempli de folie et d'amour. Pour les autres et pour moi. Mes pointes sont toujours à mes pieds et mon tutu autour de ma taille. Des cris de joie proviennent de devant moi. Mes pères sont là, accompagnés de Lauris. Le grand sourire qui couvre chacun de leur visage me rend fière. Ils le sont de moi, pourquoi ne puis-je pas l'être en retour ? Il n'y a bien que dans mes rêveries que ce genre de réflexion vient à moi.

D'habitude, je ne le suis pas : fière de moi. Et je n'en ai pas honte. J'ai une bonne raison à cela. Je sais que je peux mieux faire, que la perfection que je souhaite plus que tout atteindre, sera un jour derrière moi. Car une nouvelle se sera présentée à moi, me suppliant de la prendre dans mes bras et de la laisser m'enivrer. Comment pourrais-je le lui refuser ? Pourquoi le lui refuserais-je ?

Me rendant compte que ceci ne sert à rien, et que penser à un futur qui ne m'appartiendra peut-être jamais n'est pas la bonne solution pour vivre pleinement dans le présent, je m'empare de mon crayon gris, de ma calculatrice et reconnecte mon cerveau de mathématicienne en herbe. Je calcule et recalcule, trace des figures toujours plus basiques les unes que les autres. Les mathématiques sont platoniques aujourd'hui. Quand je fini enfin les quelques exercices que j'avais à faire, je m'adosse à ma chaise de bureau, admirant mon cahier qui s'est peint de nombres et de traits. Malgré toute la bonne volonté que je peux y mettre, faire ceci ne me mène à rien. Je préfèrerais de loin danser ou même analyser.

Au moment où je range mes affaires dans mon sac de cours, Lauris crie mon prénom. Je grince des dents, me préparent au pire. Il déboule dans ma chambre, prenant quand même la peine de retenir la porte pour ne pas qu'elle claque contre le mur. J'essaie de retenir mon sourire ironique, mais quand je le vois le dos tourné en train de refermer la porte, je craque. Quitte à ce qu'il m'en veuille pour quelque chose, vaut mieux que ce soit maintenant. Lauris avance vers moi, le visage sérieux, une bouteille presque vide dans la main. Il s'est mis à boire ou je rêve ?

— C'est toi qui as bu mon jus de pamplemousse ? m'accuse-t-il en mettant en évidence la bouteille en plastique.

Je manque de m'étouffer et il le remarque. Je cache alors ma bouche derrière ma paume.

— Lauris, dis-je, plus calme, tu es le seul imbécile dans la famille à boire ce truc dégueulasse. Tu crois vraiment que je vais m'amuser à faire passer cette substance que je n'ose même pas sentir dans ma gorge ?

Il hoche la tête et je penche la mienne. Bon ok, j'en suis capable, c'est vrai.

— Ce n'est vraiment pas sympa.

— Mais ce n'est pas moi ! m'offusquais-je.

— Qui est-ce alors ?

— Un cambrioleur, sûrement.

Je ne sais dire qui est le plus imbécile, entre lui et moi, à ce moment précis.

— Les cambrioleurs ne volent pas les jus de pamplemousse.

À l'unissonWhere stories live. Discover now