MOUVEMENT N°8

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𝐋𝐄𝐒𝐋𝐘𝐄


Ces trois jours étaient passés plus vite que je ne l'aurais pensé. Je n'avais fait que travailler car nous n'avons pas eu cours de danse et que je n'avais aucun moyen de communiquer avec mon partenaire au cas où si, l'un de nous, voulait qu'on se voit. J'aurais pu penser que ça ne me gênait pas, mais je me mentais à moi-même. 

Comme toujours. Ce devait être ma spécialité. Mais si nous étions dans cette situation, ce n'était pas que de ma faute. Mais de la sienne aussi. Il ne m'a pas demandé mon numéro, non plus. Bon, peut-être que je ne lui aurais pas donné, mais ce n'est qu'on contretemps. S'il tenait tant que ça à collaborer avec moi, il aurait tout fait pour que ce soit le cas. Peut-être qu'en fait, j'étais en train de devenir la seule qui s'intéresse vraiment à ce qu'on fait. Ou qu'avec moi, il est, pour je ne sais quelle raison, plus timide qu'avec ses amis. 

Je n'ai rien d'inquiétant, et n'ai pas encore mangé quiconque, pourtant. 

Il est vrai que je ne me suis pas montrée super accueillante à son égard, mais je reste toujours sur mes arrières. Ce n'est pas forcément contre lui. La perfection est ma seule solution. Si je ne réussis pas en danse, ou au lycée, je me déteste de longs mois, sans aucune raison. Il faut que tout soit parfait, que mes mouvements soient le plus possibles coordonnés avec la musique et que je puisse danser les yeux fermés ou même dans mes rêves. Si ceci ne se produit pas, mes parents peuvent être sûrs que je ne vais pas rentrer à la maison tant que je ne serais pas fière de moi. 

Peut-être est-ce mon passé qui me fait penser comme tel. Ou peut-être est-ce seulement le fait que, comme il me l'a si bien fait remarquer, je ne vis pas assez. 

Je n'ai aucune autre raison, que la danse, de sourire. À part mes amis et ma famille. Aller en cours m'ennuie plus qu'autre chose, je ne sais jamais quoi faire quand je n'ai plus rien à faire. Et puis sortir n'a rien d'intéressant quand danser est ma passion. 

Ce qui me fait le plus mal, c'est que seul un inconnu s'en soit rendu compte. 

Pour mes pères, c'est normal. Ils m'ont toujours connu comme cela. Se sont même eux qui m'ont incitée à toujours viser plus haut qu'on nous le demandait. Ils me disent que « Ce n'est qu'en pensant que l'on peut mieux faire, qu'on ressent l'envie d'aller plus loin. » Je n'avais jamais vraiment réfléchi à ça, mais ils ont de loin raison. 

Que se passe-t-il quand je ne peux penser à mieux vivre ? Rien ne me permet aujourd'hui de dire haut de fort que j'ai trouvé une nouvelle raison à ma vie ici. Pourtant, je peux être sûre que mes pères se battraient pour que j'en trouve une. Ou même plusieurs. Du moment que je reste celle que je suis pour eux et que je ne décide pas d'investir dans du tricot et des Lego. Ils trouveraient peut-être ça drôle. Mais seulement quelques secondes, avant de me rire au nez, en fronçant à l'unisson les sourcils. 

Penser à cela ne me menait à rien, je le sais plus que bien. Mieux que mes tables de multiplication, du moins. Ce n'était pas de ma faute si moi et les maths ça faisait deux ! S'il y a bien une chose que je sais aussi, c'est que pour danser, je n'avais pas besoin de savoir que trente-quatre fois huit ça faisait deux-cent soixante-dix-huit. A moins d'être bourrée, mais encore, boire n'était pas ce qui me plaisait le plus. Peut-être qu'un jour, je me rendrais compte que c'est la seule chose dont mon esprit a besoin. Je souhaite que ça ne traverse jamais ce dernier. 

En me concentrant sur l'horizon devant moi et plissant les yeux pour être sure de moi, je remarquai une silhouette qui m'étais familière. Son sac en bandoulière pendant sur son épaule, il marchait face à moi. Je me mis à sourire immédiatement. 

À l'unissonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant