Semaine 33 - 2/2

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Note de l'auteur : Chacun de mes personnages possède normalement sa propre police d'écriture. J'ai adapté ce chapitre pour Wattpad de la façon suivante : les paragraphes en italique sont écrits par Alona, les autres par Samuel. Bonne lecture !

Lettre d'échange

Je ne suis pas très douée pour discuter. Tu tentes parfois de le faire avec moi, mais je ne sais que rester silencieuse. J'ai essayé, mais sans la règle 10, je n'arrive pas à te parler réellement de moi. Il y a tellement de choses que j'aimerais te dire et de questions que je voudrais te poser, mais les mots se bloquent toujours dans ma gorge quand je me trouve en face de toi. Pourtant, il y en a beaucoup qui passent dans ma tête. Est-ce que tu veux bien parler avec moi sur cette feuille ? Tu m'as déjà dit que tu ne savais pas si j'étais importante pour toi, mais j'ai vraiment besoin de savoir. Qu'est-ce qu'Alona signifie pour toi ? Qui suis-je pour toi ?

Cela ne me dérange pas de discuter avec toi par écrit. Concernant tes questions, je ne connaissais pas ton prénom avant de te rencontrer. Il n'est donc associé qu'à toi dans mon esprit. Je te perçois comme une jeune fille intelligente qui n'a pas eu de chance dans la vie. Je suis aussi conscient que tu voudrais lire que je tiens à toi, mais je ne souhaite pas te mentir. La vérité, c'est que je ne crois plus être en mesure de laisser qui que ce soit se faire une place dans mon cœur depuis maintenant bien longtemps.

Pourquoi est-ce qu'il n'y a plus de place pour les gens dans ton cœur ?

Enfant, je n'ai pas eu la chance de grandir dans une famille aimante alors j'ai sans doute cherché toute ma vie un groupe auquel appartenir et qui pourrait porter ce nom. Quand Julie et Aurore sont parties, j'ai perdu ce que j'avais trouvé de plus précieux. Les années suivantes, j'ai sombré toujours plus profondément, mais je n'ai jamais eu le courage de les rejoindre. Ce jour-là, je crois que je suis mort avec elles et que mon cœur a tout simplement éclaté en morceaux, car c'était trop douloureux à supporter pour moi. Je n'aurais pas dû survivre aussi longtemps, mais je n'ai jamais pu accepter ce qui leur est arrivé. Je pense que mon cœur s'est alors gelé au moment il se brisait et que ces deux vies que je conserve en moi sont les uniques choses qui le maintiennent encore dans cet état.

On pourrait peut-être le réparer ? Je t'ai aidé à aller mieux la nuit où tu pleurais, non ?

C'est vrai et j'apprécie ton geste, sincèrement. Je crois toutefois que la question n'est plus de savoir si mon cœur est réparable ou non, mais plutôt quand il sera enfin libre de poursuivre la course qu'il a entamée il y a six ans. Je dis détester les fantômes, mais la vérité, c'est que j'en suis probablement devenu un qui erre depuis maintenant trop longtemps. Année après année, j'observe ce monde tourner de plus en plus loin de moi. J'ai acquis l'intuition certaine que mon temps est compté et ce sentiment n'a fait que grandir depuis cet été. Même si je le pouvais, je ne souhaiterais pas réparer ce qui est brisé en moi. Mon seul désir demeure de rejoindre enfin ma femme et ma fille, peu importe l'endroit où elles se trouvent. J'ai déjà un pied dans l'autre monde et je n'attends qu'un moment de paix pour achever le pas qui m'en sépare encore. C'est pour cela que tu ne devrais pas t'attacher à moi. Tu finiras inévitablement par en souffrir tôt ou tard.

Pourquoi est-ce que tu ne me mens jamais ?! Même quand tu sais que je vais souffrir de ta réponse, tu ne me mens jamais ! Pourquoi tu me dis toujours la vérité ?!

Je suis vraiment désolé, Alona. Tu aurais sûrement préféré que quelqu'un d'autre vienne te chercher ce jour-là. Je suis navré que tu sois tombée sur moi. Je te laisse tranquille.

Je suis désolée de m'être emportée. Je ne recommencerai pas. S'il te plaît, est-ce que tu veux bien encore parler avec moi ?

Je suis parti marcher parce que je t'entendais pleurer de l'autre côté de la porte. Je ne voulais pas te blesser davantage et je pensais que tu avais besoin d'être seule. Je sais que je ne suis pas celui qui devrait prendre soin de toi. En toute franchise, je me suis déjà demandé un nombre incalculable de fois si je n'aurais pas mieux fait de t'emmener dans un hôpital ou te confier à des autorités compétentes qui t'auraient permis de rentrer enfin chez toi. Encore aujourd'hui, je ne sais pas vraiment pourquoi j'ai choisi de m'occuper de toi moi-même alors que je ne parais pas capable de le faire correctement. Ce n'est pas de moi dont tu as besoin, mais de ta famille, d'un psychologue et de gens qui t'aiment. Tu peux sûrement trouver bien mieux ailleurs et tu n'es pas obligée de rester ici.

L'Appel du ColibriWhere stories live. Discover now