Chapitre 2

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Jeudi, j'arrive quelques minutes avant les cours pour me placer au fond, je redoute le coup de ciseaux. Je reste vigilante. Caleb entre et me fait son sourire diabolique.
C'est officiel, je lui ai déclaré la guerre!!!

Il va faire de ma vie un enfer. Je reste sur mes gardes. Je regarde tout autour, j'en deviens parano. Mais rien ne se passe, il rejoint son groupe. J'ai obtenu un sursis. Le cours s'achève, je me précipite vers un endroit où me cacher. J'ai pris un sandwich pour éviter toute mauvaise rencontre. Quand j'ai fini de manger, je rejoins mon cours de l'après-midi, déambule dans les couloirs comme une âme errante.
Mais quelqu'un m'attrape le bras. Caleb.

— Alors on se cache?
— Non...Non pas du tout, je visite... Cette partie, je ne l'ai jamais vue.
— Visite hein?
— Oui, je crois que les ouvriers ont mis le paquet cet été, tu ne trouves pas?
— Dors !

Et je m'endors.

Je me réveille, je ne sais pas combien de temps, j'ai dormi. Je me relève et ce que je vois au sol me paralyse. Mes cheveux... il a pas fait ça. Si, il l'a fait, à voir la tête des étudiants qui passent et qui pouffent. Je ramasse la masse de cheveux par terre et je cours vers les toilettes les plus proches.

Mes cheveux... Il a saccagé mes cheveux. Je m'effondre. C'était la seule chose que mon père aimait chez moi. Je pleure... J'attache le reste . En sortant, Caleb ne rigole pas... Il est allé trop loin, je ne le regarde pas. J'ai la respiration lourde, les étudiants me dévisagent, mais là, je veux juste m'isoler. Je reste dans ma voiture, la porte fermée... et je pleure toutes les larmes de mon corps.

— Je suis désolée papa...
— Ce n'est pas ta faute. Je t'ai dit de ne plus te laisser faire!
— Je ne suis pas comme toi!
— Regarde ce qu'il t'a fait. C'est la fois de trop.
— Non papa s'il te plait reste .
— S'ils te voient parler toute seule, ils vont te prendre pour une folle.
— Ça m'est égal.
— Pas moi. Je reviendrai te voir quand tu seras seule.

Je secoue la tête.
Je me rends vers le coiffeur le plus proche. Elle pensait que c'était ma petite sœur qui avait fait ce carnage, je l'ai laissé le croire.  Elle réussit à arranger ce désastre, je me retrouve avec un carré, pour ratraper le devant, elle m'a fait une frange. Ce n'est pas si moche, mais j'ai déçu mon père.
Quand je suis rentrée à la maison, ma mère avait déjà mangé, elle a failli s'évanouir devant ma nouvelle coupe.

Je lui ai dit que je voulais du changement, avec mes yeux rougis, je n'étais pas trop crédible. Elle a fait semblant de me croire, elle trouve que ça me va plutôt bien. Demain, je vais devoir affronter les autres. Je veux qu'il me laisse croupir dans mon coin.  Mon père est passé me voir. Je crois qu'il ne se remet pas de ma nouvelle coiffure, il m'a rassuré, en me disant que ça repousse.

Le lendemain, je me réveille tant bien que mal. Je déniche un sweat et relève ma capuche sur ma tête. C'est le jour de la sortie, Caleb me réserve quelque chose de plus terrible que ce que j'ai vécu la veille.

Nous sommes dans le hall de l'université. Le professeur fait l'appel sur la liste des inscrits à cette sortie. Tout le monde est là, même Caleb. Pour le moment, il m'ignore. J'espère qu'il continuera, le temps de la visite, mais c'est peu probable. Dans le car, je me mets au fond, capuche sur mes cheveux et la tête sur la vitre du car. Un enfant blessé au crâne me salue, je lui souris, il sait que je le vois. Je les vois tous, je suis la seule à les voir, d'où la réputation de bizarre. Pour la plupart, je parle toute seule, ou je regarde dans le vide.

De mes neuf ans à mes treize ans, ma mère m'a emmené voir des tas de psychiatres, tantôt qui me diagnostiquent un trouble de la personnalité, tantôt un manque de confiance en moi. D'autres estimaient que c'est une façon de me protéger des autres. Alors à mes treize ans, j'ai arrêté d'en parler. Les psys m'ont alors fichu la paix. La seule personne qui me croit, c'est mon père, parce qu'il est mort.
Le bus démarre... Je mets mes écouteurs et j'écoute de la musique.  Le bus nous dépose devant le musée . Le professeur est dépassé, il essaye d'amener le calme pour se faire entendre. Nous sommes séparés en deux groupes, l'un sera avec le professeur, l'autre avec son assistant.

Caleb et moi sommes dans le même groupe. Je suis foutue. L'assistant commence la visite, je le suis au pas. Je ne veux pas finir en mauvaise posture, à cause de Caleb. L'assistant nous pose des questions sur les époques des sculptures exposées, je réponds à la plupart . J'aime l'histoire, c'est mon échappatoire. Il nous laisse quartier libre pendant trente minutes. Je m'éloigne du groupe, je suis attirée par un miroir. Il est magnifique. Il n'y a rien marqué dessus. Il doit dater du Moyen Age au cinquième siècle.

Un mort me dit de le suivre. Je lui dis non de la tête. Il me prend par le bras et me tire vers le miroir. Je vais percuter le miroir et détruire un objet historique. Je ferme les yeux... mais il ne se passe rien. Aucun choc, pas de bruit de verre qui tombe au sol. J'ouvre un œil et puis l'autre. Je suis dans une pièce, décorée dans un style d'époque. Quelqu'un me prend le bras, ça y est, je vais avoir des problèmes, ma mère va me tuer. Je ne pourrais jamais rembourser un objet d'une telle valeur. Je me retourne, Caleb. Oh non ...

— Tu t'amuses bien ?
— Qu'est-ce que tu fais là? Vas faire mumuse devant les tableaux!
— Je vois que ta petite coupe de cheveux te redonne confiance en toi.
— Et toi ton blond t'a ramolli le cerveau?
— Fais attention à ce que tu dis!

On entend une forte explosion, je suis projetée contre un mur. Je perds connaissance.
J'ouvre les yeux, j'ai un mal de crâne. Je me relève, je suis dans une plaine, un champ à perte de vue.

— Qu'est-ce que je fais là?

Où est Caleb? Il était avec moi quand il y a eu l'explosion. Je me pince pour vérifier que je ne rêve pas. Mais non, j'ai bien senti la douleur.

— Blanche-Neige s'est enfin réveillée?
— Caleb?
— Oui, c'est mon prénom.
— Ce n'est pas marrant! Tes blagues, je n'en peux plus! Tu m'as emmené où cette fois? Dans un trou perdu?
— Ah parce que tu crois que c'est une blague ?
— Tu as encore dû m'hypnotiser ou je ne sais quoi? Mes cheveux ne t'ont pas suffit? Et d'abord, pourquoi tu es habillé comme ça?
— Longue histoire!
— Tu vas prendre le temps de me la raconter!
— Marche, je t'expliquerai tout.
— Marcher où? Va chercher ta voiture!
— Tu vois une voiture à l'horizon?
— Non, mais je sais que tu as tout manigancé.
— Tu me fatigues! Il a fallu que je tombe sur elle!
— Que tu tombes sur moi? Tu fais exploser un musée, qui regorge d'œuvres qui ont une valeur inestimable. Tu me ramènes dans ce champ, habillé comme au 4ème siècle et tu te permets de te moquer de moi. Là, s'en est trop!

Je le plante là, je décide d'avancer loin de cet être arrogant et monstrueux. Je dois retrouver ma route et je ferai du stop.

— Tu comptes aller où comme ça?

Ne réponds pas! Ignore-le! Le goujat.

— Je ne suis pas un goujat Cosette! Tu ne sais pas à qui tu t'adresses!
— Je ne t'ai rien dit!Tu deviens parano mon pauvre!

Il me suit, j'accélère le pas...  Je me retourne, il est toujours là.

— Tu comptes me suivre longtemps? Va faire du stop de ton côté.
— Du stop aux quatrième siècle? Tu veux finir au quatre heures d'un chevalier?
— Très drôle!
— Je suis sérieux . Et puis merde. Vas-y fais ce que tu veux.

Il s'arrête et se pose sur un rocher. Tant mieux, je vais pouvoir me débarrasser de lui. Je marche dix minutes, j'arrive sur un chemin de terre. C'est bien ma veine, finir dans le fin fond de la cambrousse, je longe ce chemin . Au loin, un homme, habillé d'une armure, se déplace à cheval. J'ai dû atterrir dans un festival médiéval, je vais sûrement pouvoir rentrer chez moi.
J'interpelle le faux chevalier, il sort son épée et la braque sur moi.

Adela et le royaume perdu ( tome 1 et 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant