CHAPITRE 1 - 
APRÈS TOUT, POURQUOI PAS ?

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Londres, 1 septembre

Clark

- Jim ! je m'indigne.

- Quoi ? Je dis juste que si tu as besoin d'argent, j'ai du boulot.

- Je respecte les prostituées mais je n'en deviendrais pas une.

- Ho ça va. C'est simplement accompagner des mecs bourrés de fric à des soirées chic.

Je pose rageusement le maillet que j'ai entre les mains sur la table. Tous les outils sautent comme s'ils avaient peur de ma réaction. Quel euphémisme. Je me retrouve avec un compte à découvert et c'est eux qui ont peur.

- Tu mets une robe avec un petit décolleté, tu acceptes qu'ils posent leurs mains sur ton cul pendant quelques heures et en échange, tu picoles du vin haut de gamme, tu bouffes comme une princesse et tu passes un bon moment.

- Et ton bar, il ne peut pas me prendre comme serveuse ?

- Kent, je t'aime mais même en te prenant un mois, je ne couvrirai pas tes dettes.

Quel plaie ce monde ! J'ai besoin d'argent pour un loisir qui pourrait me rapporter gros mais en attendant, je suis à découvert jusqu'à la fin du mois et je refuse de demander à Eilen ou Jimmy de m'avancer même si je vois qu'ils font déjà des efforts.

- Bon, combien je peux gagner en une soirée ?

- Deux loyers.

- Bordel. De. Pierre. Tu es sûr qu'ils ne font que toucher mon cul par-dessus ma robe ?

- C'est toi qui pose tes conditions.

Je coince mon portable entre mon oreille et mon épaule et regarde le bloc de pierre qui se trouve au milieu de l'atelier. Deux loyers. Je pourrais continuer ma sculpture et espérer qu'elle soit prête à temps pour l'exposer dans la galerie de Mika. C'est ma seule opportunité du moment pour vendre une de mes pièces. Je pourrais peut-être vivre deux, trois voire six mois tranquillement.

- Bon, envoie ton site, je vais y réfléchir, je conclus.

- Si tu le fais, dis-moi quel soir que je puisse me libérer et venir te secourir à tout moment.

- C'est ça.

Je raccroche et laisse tomber mon téléphone dans la poche de ma blouse blanche. Comment j'ai fait ? J'ai vécu une vie de rêve pendant mes études, ma grand-mère a accepté de m'aider financièrement pendant cinq ans mais après, j'ai tellement couru après mon indépendance que ça va faire cinq ans que j'enchaîne les petits boulots pour payer mon loyer et mes sculptures. Surtout mes sculptures.

Mon portable vibre et je choisis de laisser le message en suspens. Je n'ai pas besoin de m'inscrire aujourd'hui sur son site. Je peux encore réfléchir, avoir une idée lumineuse ou trouver une alternative.

- Alors, cette sculpture ? J'aime bien.

Mika arrive par la porte vitrée. Son atelier est une bénédiction des dieux. Situé dans l'arrière du bâtiment de sa galerie dans le quartier de SoHo, je sens que si j'ai une opportunité de vendre à un prix fort, c'est ici.

Je le laisse faire le tour de la statue en marbre pendant que je range le matériel. Pourquoi est-ce que j'en mets partout à chaque fois ? Entre le burin, le maillet, la pointerolle et toute la poussière accumulée en une session de taillage, j'arrive à me perdre.

- Ça change, j'ai bon espoir de la vendre.

- Je vais aller déposer un cierge et prier tous les dieux alors.

Ruthless ThornOù les histoires vivent. Découvrez maintenant