Chapitre 25. Mon rêve, ma fierté.

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Le port se dresse devant moi, à la lueur des étoiles, les bateaux se balançant doucement. C'est ici que je vais passer ma nuit, sur le pavé humide. 

Soudain un carrosse tiré par deux magnifiques cheveux baie lancés à pleine allure fonce droit sur moi. Je m'écarte, méfiante, quand le cocher fait ralentir les deux animaux qui, essoufflés, crachant des panaches de fumée blanche dans la nuit froide, s'arrêtent à deux pas de moi. Ce carrosse me dit quelque chose...Et ces chevaux ! Je caresse l'encolure du premier : 

-Merlin ? Je fais, perplexe. 

Une femme, très élégante dans se longue robe bouffante bleue sombre, quitte la voiture avec grâce. Un manteau aux larges manches repose sur ses épaules. Ses cheveux blonds, quelque peu gris, sont coiffés en haut chignon. Je n'aie à peine le temps de voir son visage qu'elle me saute au cou.

-Ma chérie ! S'écrie-t-elle. Tu es vivante !

-Mère ? Je demande, stupéfaite.

Elle s'écarte et me dévisage, ses yeux débordants de larmes :

-Mon Dieu comme tu es maigre ! Et tes cheveux ! Seigneur ! Que t'ont-ils fait subir ?

Je cligne des yeux, perdue. Quand une deuxième femme, très mince, habillé de rubans et dentelle, descend à son tour de la voiture, tenant la main d'un homme paré royalement.

-Céline ! S'exclame Joséphine, aux anges.

Elle me serre contre elle et je n'ose faire le moindre geste.

-Co-comment es-ce possible..? J'articule désorientée.

Ma mère me caresse le visage, souriante. Des cernes creusent son visage ; comme elle a vieilli ! Combien de temps me suis-je absentée ? 

-Nous avons parcouru la France, paniqués à l'idée de d'avoir perdu ! Fait ma sœur. 

-Nous sommes en Espagne...Je bafouille, toujours sous le choque.

-Nous avons envoyé tellement de courriers de recherche, que ce matin, alors que nous nous rendions à Saint Jacques de Compostelle pour prier, un marin nous a fait savoir qu'un bateau en direction de la Corogne transportait une jeune française ! Nous n'avons pas perdu une minute !

Joséphine a le souffle coupé. Visiblement nous sommes toutes les trois atterrées. Je regarde l'homme qui accompagné ma sœur. C'est son fiancé, sans aucun doute. Le frère de M. Nighton. C'est seulement maintenant que je peux comparer leur visage. André est plus bel homme avec ses aires de guerrier. 

-M. Nighton ? Je l'interroge.

-Appelez moi Henri, Céline. Je suis votre beau frère dorénavant.

-Vous...Vous vous êtes mariés ? Je lance, surprise.

Joséphine m'attrape la main :

-Pardonne moi ma chère sœur ! J'aurais tellement aimé que tu puisse être là parmi nous !

-Montons dans le carrosse, intervient ma mère, il fait froid et tu dois être exténuée.

-Non ! Je dois rester ici !

Et je me rends compte à quel point je me suis embarquée dans des aventures incroyables alors qu'elles sont restées dans leur salon à boire de la tisane.   

-Tu ne croies pas que tu es parti assez longtemps ? Soulève ma mère en me prenant le bras.

Je me dégage et à cet instant se crée un mur entre nous. Je ne suis plus Céline de Montfort. Je suis une autre personne. J'ai choisi cette vie parce que je souhaitais quitter l'autre. Tout ne sera plus jamais comme avant. J'ai choisi la même voix que mon père...

-Je dois rester ici, dis-je fermement.

-Mais pourquoi ? Me demande Joséphine.

Comment leur expliquer en quelques mots une histoire qui inspirait un roman de mille pages ? 

-Henri, dis-je, votre frère André est coincé sur une île, à une journée d'ici, entre les mains d'un fou furieux. Une chaloupe a été envoyée. Elle doit revenir à l'aube. 

-André est parti à bord de L'Espadon il a de nombreux mois en compagnie du Capitaine Brick...Murmure-t-il les sourcils froncés. Ne voulant pas être présent lors de mon mariage.

-Et je me suis faite engagée en tant que marin à bord du même bateau.

Tous me fixent, les yeux écarquillés.

-Toi ? Fait ma mère. Toi ? Marin ? Pourquoi diable aurais-tu fait cela ? 

-Parce que j'aime l'Océan et que je rêvais de naviguer.

-Et as-tu réalisé ce rêve ? M'interroge Joséphine, une étincelle de fierté pétillant au fond de ses prunelles. 

Je lui sourie, mon cœur débordant d'affection envers elle. Elle s'en été doutée mais elle n'avait rien dit. 

-Oui, je lui répond avec honneur.










A bord de l'Espadon.Where stories live. Discover now