➳Brisée

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J'avais l'impression que le monde tournait au ralentis. Mon esprit était sur pause. J'avais l'impression qu'on m'arrachait le cœur à main nu. Les hurlements horrifiés de June et Sam résonnèrent comme un écho lointain. Je m'écroula au sol en sentant mes larmes couler, je n'arrivais plus à respirer c'était affreux. Ma tête tournait et j'avais la sensation que le monde s'écroulait. Mon regard fut attiré par un papier près de leurs corps, je rampa jusqu'à celui-ci et je le déplia.

"Tu n'aurais jamais dû nous défier"

— Non...murmurai-je.

Ils étaient mort à cause de moi. Parce que j'avais résisté aux rebelles. Sans pouvoir me contrôler un cri perçant sorti de ma gorge. Un cri de douleur à se fendre l'âme, c'était un cri autant de désespoir que de rage. Au même moment les vitres éclatèrent et le vent se mît à souffler plus fort. La terre se mise à trembler et des fortes secousses détruisirent les seules choses qui n'étaient pas encore cassées.

J'entendais vaguement les voix de mes amis qui me suppliaient d'arrêter mais je ne pouvais pas. J'étais déjà loin dans un endroit froid et sombre où il n'y avait plus que moi et mon cœur en miette. Les éléments qui se déchaînaient autour de nous reproduisaient bien se qu'il se passait à l'intérieur de moi, une tornade. Mes larmes atterrissaient sur le corps blafard de ma mère et mes genoux pataugeaient dans une mare de sang, leur sang.

Le soleil qui m'étouffait il y a quelques minutes avait laissé place à des nuages gris et une averse monstrueuse. Un éclair déchira le ciel et je ferma les yeux en essayant en vain de me dire que tout ceci n'était qu'un cauchemar. Je sentais que les murs commençaient à s'effondrer autour de moi mais je n'arrivais plus à bouger ni à reprendre le contrôle. Mes parents sont morts...Mes parents sont morts...Ceux qui m'ont élevés, ceux qui m'ont appris à faire du vélo, ceux qui m'ont toujours encouragés à suivre mes rêves. Ils sont morts à cause de moi. Parce que je suis un monstre. Parce que je n'ai pas été capable de les protéger...

Stop ça fait trop mal...

Je n'arrive plus à respirer...

J'ai envie que ça s'arrête...

Je sentais le sang qui s'écoulait de mon nez. Je sentais deux bras me secouer pour que je reprenne conscience. J'ouvris brusquement les yeux vers Charlie qui avait une expression terrifié sur le visage. Celui-ci me souleva pour que l'on parte mais je me débattais comme une folle pour ne pas les laisser.

— Lâche moi je ne peux pas partir ! hurlai-je.

Mais il ne m'écoutais pas et il me prit pour qu'on parte de l'immeuble. Le tremblement de terre avait cessé mais la pluie tombait si fort que lorsque les gouttes atterrissaient sur moi c'en était presque douloureux. On atteint rapidement la Jeep avec June et Sam devant nous. Charlie m'obligea à rentrer à l'arrière de la voiture alors que je ressemblais à une vraie malade. J'avais envie de tout brûler et aussi de pleurer toutes les larmes de mon corps à la fois. Enfin à l'abris, Sam démarra pendant que j'hurlais encore.

— Pourquoi ? Pourquoi on est partit ? Je ne peux pas les laisser comme ça ! Il faut...enterrer les corps et...et prévenir des gens et...

Charlie me coupa en me prenant dans ses bras. Je le serra de toutes mes forces reprenant le contrôle de mes pouvoirs. J'ai pleuré pendant tout le trajet, Charlie m'a consolé mais même si j'avais repris le contrôle je n'allais pas mieux. J'avais l'impression de me noyer dans ma propre souffrance, encore et encore...Chaque minute était pire que la précédente. Chaque fois que je fermais les yeux je les voyais, morts et se baignant dans leur propre sang. Leurs yeux ouverts et encore brillant de peur. Les vêtements de Sam étaient couvert de leur sang et je n'avais qu'une envie, les brûler. Personne n'a parlé dans la voiture, l'unique chose audible était mes sanglots ainsi que mes cris de souffrance...

***

Revenue au camp je sortis de la Jeep sans les attendre et je marcha seule devant. Mes yeux étaient bouffis et rouges mais au moins les larmes avaient cessés de couler. Pour l'instant en tout cas. Sans même m'en rendre compte je m'étais mise à courir.

— Eden attends ! criait Charlie.

Mais je ne voulais pas les attendre, je courrais entre les arbres habilement les gouttes de pluie mélangées aux rafales de vent me fouettaient le visage, tous mes muscles me brûlaient et ma respiration était saccadée. Même si j'entendais leurs pas derrière moi je ne m'arrêtais pas. Je voulais juste être seule...En rentrant au camp quelques personnes se retournèrent sur mon passage mais je n'y prêta pas attention et je me décida à courir directement vers la cascade. Là-bas mes pas me guidèrent automatiquement vers la grotte.

À l'intérieur je m'écroula contre une pierre en fixant la cascade d'un œil absent. Maintenant je me sentais juste...vide. Je me sens comme une coquille vide ou encore comme un zombie qui errerait sans but avec l'âme et le cœur piétiné. Je pleura encore, mais cette fois-ci mes larmes étaient silencieuses. Je n'avais jamais perdu aucune personne de mon entourage donc je n'avais jamais éprouvé ce manque, cette impression d'être déchirée de l'intérieur. Je ne sais pas combien de temps je suis restée comme ça mais quand j'entendis une voix je revins brusquement à la réalité.

— Eden ?

Je me tourna vers Jay qui me toisait. En me relevant ma tête tournait légèrement sûrement dû au fait que ça faisait plusieurs heures que je n'avais rien avalé.

— Ça fait des heures qu'on te cherche partout Ace était au bord de l'infarctus !

Je ne répondis pas même si j'aurais probablement ricané dans d'autres circonstances.

— Qu'est-ce qu'il t'es arrivée ? Charlie nous a seulement dit que tu étais bouleversée et que c'était important de te retrouver parce que tu pouvais encore perdre le contrôle. Je n'ai pas tout compris mais j'étais certain que tu serais ici...Attends t'as pleuré ?

J'hocha mollement la tête ne voulant pas parler. Quand il voulut avancer vers moi je recula en me rappelant des événements de la veille. Il s'arrêta en prenant conscience de ma peur.

— Je ne vais rien te faire, je veux juste t'aider.

C'est bien Jay en face de moi ? D'accord je ne le connais pas très bien mais de ce que j'ai pu constater m'aider n'avait pas vraiment l'air de le ravir avant. Est-ce qu'il essayait d'être...gentil ?

— Dis moi...Qu'est-ce qu'il s'est passé ?continua t-il d'une voix douce et qui étrangement m'apaisait.

— Mes...mes parents ils...les rebelles...et moi je les ai vu la gorge tranchée et à...cause de moi...

Ma phrase n'était pas vraiment compréhensible mais je su à l'expression décomposé de son visage qu'il avait compris. En à peine quelques pas il était déjà près de moi à m'entourer de ses bras chauds et rassurants. Je ne devrais pas apprécier ça, je ne devrais pas me sentir mieux pourtant c'est le cas. Je m'accrochais à lui comme à une bouée de sauvetage qui me sauverait du torrent de souffrance qui me noyait il y a seulement quelques minutes, ou heures. Mes bras étaient autour de son cou tandis que les siens étaient sur ma taille et pendant une seconde, rien qu'une seconde la douleur disparut.

— Je suis désolé, l'entendis-je me souffler à l'oreille.

Son odeur de fraîcheur et de bois me parvint comme une bulle qui m'envelopperait dans un autre monde.

— Ne me lâche pas, dis-je dans un murmure désespéré.

J'avais juste besoin de l'avoir avec moi, que sa chaleur m'entoure encore un peu.

— J'en avais pas l'intention, rétorqua-t-il à mon plus grand bonheur.

À cette instant j'oubliais tout. La crainte qu'il m'avait inspiré pas plus tard qu'hier. L'agacement et la colère qu'il avait suscité en moi pendant cette semaine. La curiosité que j'avais ressentis lors de notre première rencontre. Là, je fermais juste les paupières pour profiter de ce moment loin de tout...

Les éléments[EN CORRECTION]Where stories live. Discover now