Césure.

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Césure.

Armes luminescentes. Éolienne d'amour.
Où puis-je te rencontrer ?
Poussière tu fus, poussière tu es.
Folie indécente. Mortelle adolescence.
Connais-tu la douleur du sacrifié ?
Plaie tu fus et plaie tu es.
Cœur damné, âme poétes-

JungKook soupire et raye le dernier vers de son poème. Il ne compte plus les pages barrées et chiffonnées de son cahier. Ce n'est plus un soupir mais un grognement qui s'échappe de sa bouche. Il pose sa tête sur la paroi en bois bleu à sa droite. Assis en tailleurs dans les sanitaires du lycée, il attend. L'endroit n'est pas fameux. Il cherchait l'inspiration et s'est enfui du troupeau. Finalement il ne l'a pas trouvée dans les toilettes. Les seules images qui traversent son crâne sont les couleurs insalubres et les graffitis écrits par ci par là. Des numéros de téléphone, des insultes, des déclarations d'amour et autres mots gravés sur une planche de bois éphémère.

« C'est laid » pense-t-il.

Alors il baisse les yeux vers le sol. Le carrelage blanc a jauni avec le temps. Il y a un ticket de bus dans le coin à gauche et un emballage de barre protéinée qui voyage vers la cabine d'à côté.

« C'est laid » pense-t-il.

JungKook est vite lassé de la cabine qu'il qualifie de contre-productive. Alors il prend ses écouteurs emmêlés dans sa poche et les branche. La musique ne résonne dans ses oreilles que lorsqu'il pousse la porte de sa cachette. Il y a un Seconde qui se lave les mains. Quand JungKook passe derrière lui, l'autre cesse de frictionner ses paumes et croise son regard dans le miroir. JungKook lui sourit et le gamin ne réagit pas. Le poète lève les yeux au ciel et sort des toilettes. Il plonge tête la première dans la marée humaine. Et tous les gens absorbent ses poèmes larmoyants pour lui en imaginer des plus heureux. Il ne mémorise pas les visages des personnes qui marchent autour de lui. Entre les casiers et les néons pas trop chers, il avance. La musique dirige le ballet et JungKook marche calmement. Il ne croise aucun regard, on ne lui adresse aucune parole, mais cette fois là est l'une des rares où JungKook apprécie les lycéens enragés qui jouent leur vie autour de lui. Mais cette fois là est l'une des rares où JungKook en est content. Alors il sourit.

Puis la sonnerie retentit. Les élèves s'activent. A côté d'eux, il se sent serein. Peut être ne l'est-il pas vraiment. Il s'en fout. JungKook avance, son carnet et ses poèmes raturés dans la main. Il tourne à droite pour rentrer dans sa classe de littérature. La seconde qui suit, TaeHyung traverse le couloir, passe à côté de la porte ouverte qui a englouti JungKook. Ils ne se sont pas vus. TaeHyung est parti rejoindre sa salle. JungKook s'est assis à sa table, a souri à Namjoon et a rangé son carnet. Ils n'ont rien dit, rien vu. Mais ça s'est bel et bien produit. Et bien que personne ne l'ait perçu, leurs âmes poétesses se sont frôlées. Et elle se sont éloignées. Sans rien dire.

Peut être que dans une autre réalité où JungKook marche légèrement moins vite, leurs regards se sont croisés.

Âmes Poétesses - TaeKookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant