Antithèse.

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Antithèse.

Sous nos yeux, passagère,
La nuit tombe, étrangère

La nuit a recouvert le partout. Fraîche mais pas froide. Complexe mais pas malade. C'est la nuit qui revient à chaque fois. Tends les doigts pour la toucher, sa couleur mystique et ses étoiles étalées. Elle se tait, elle est là. Elle s'est précipitée par la première embouchure, a sauté sur le quai pour s'afficher à leurs bras, même en plein jour, même quand ils n'en veulent pas. C'est la nuit qui les a avalés. C'est la nuit qui se tait. Elle est là. Elle glisse et s'éclipse dans l'air succombant. On respire les effluves du printemps. Elle noie les couleurs et contourne les halos blancs. Elle est là. Et c'est grâce aux lampadaires dans la rue qu'on l'aperçoit. TaeHyung est assis contre la fenêtre grande ouverte. Il regarde la nuit et la nuit le regarde. C'est une confrontation impétueuse. Et TaeHyung n'essaie même pas de gagner, n'a jamais essayé.

Il est assis par terre, entre la fenêtre et la cheminée condamnée. Il y a une drôle d'odeur chez Hoseok, qui plane et qui les aspire. Elle n'est pas désagréable, mais TaeHyung la trouve drôle. Sans savoir pourquoi. Il n'y a pas beaucoup de meubles dans l'appartement. Il y a des grandes lampes posées par terre et de ses grandes lampes sont projetés des rayons jaunes, presque oranges. Et entre les quelques fauteuils, on trouve des cartons renversés, des livres retournés. Ça sent le vieux et l'oublié. C'est sûrement ça qui lui plaît. TaeHyung ne peut plus entendre la nuit, car il y a des gens qui crient. Depuis quelques minutes, il ne bouge plus, il contemple, fasciné. Il est là parce que Hoseok l'a invité et qu'il n'aurait pas pu dire non. Et il n'y a pas d'autres raisons. Il se lève et reste immobile à deux pas du canapé. Il regarde la scène parce qu'il n'y a rien d'autre à regarder. Et il ne sait pas quoi faire. Donc il ne fait rien. Hoseok et sa copine s'engueulent. Elle est furieuse. Elle fait des grands gestes avec ses bras et ses mains, elle dit beaucoup de mots et elle les dit très fort. TaeHyung n'a jamais vu Hoseok énervé. Mais à cet instant, il y a des éclairs sous son visage calme. Il réplique des mots froids, tranchants. Ils s'engueulent longtemps. Puis la gifle part se loger sur la joue pâle du garçon.

« -Et pourquoi tu dis jamais rien toi ? » s'exclame soudain la fille en désignant TaeHyung.

Puis elle part en tornade, claquant la porte dans son dos en un coup féroce. Hoseok soupire et va s'asseoir près de la fenêtre, là où se trouvait TaeHyung quelques minutes plus tôt. Il sort une cigarette, la porte à ses lèvres puis l'allume. La braise illumine la nuit dans ses yeux.

« -Dis quelque chose. »

TaeHyung reste debout, immobile, le visage vide, les pupilles incomprises.

« -Tu sais, tu as le droit de dire que j'ai été un enfoiré. Un putain d'enfoiré. Et tu aurais raison. Et c'est pas parce que tu m'apprécies que t'as pas le droit de me dire que je me suis comporté comme un enfoiré. J'ai tort parfois, et ta mère et ton père et tout le monde a tort parfois. C'est comme ça que ça marche dans la vie. J'ai le droit d'être con, on a tous le droit d'être con. Et toi tu as le droit de parler. T'as le droit d'être quelqu'un. Ok ? »

TaeHyung ne répond pas. TaeHyung entend mais coule. Il entend mais il ne répond pas.

Et quand Hoseok lui tend une cigarette et qu'il l'accepte, il n'y a plus de réalité.

Âmes Poétesses - TaeKookWhere stories live. Discover now