Chapitre 4 : Quand un duc et une comtesse s'infiltrent au lupanar.

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Pour la première fois, le duc Desiderio San Silvestre, Primum d'Angleterre, avait perdu la face. Il s'était vu contraint d'accepter la présence d'une certaine inspectrice dans cette affaire, qui soit dit en passant, ne lui disait rien qui vaille. Etant un tigre royal, il possédait des sens décuplés qui ne lui étaient malheureusement d'aucune aide. Pas de traces suspectes, pas d'odeur inconnue sur les corps hormis celle de décomposition. Comme cette comtesse Barowmerry d'ailleurs. Il n'avait senti aucune fragrance sur elle, ce qui était incompréhensible. Ses yeux bridés et sa chevelure faisaient d'elle le mouton noir des Barowmerry, une famille irlandaise essentiellement composée de rouquins. Deux jours seulement qu'ils se connaissaient et elle l'intriguait. Quel être vivant naissait inodore ? Qui était-elle vraiment ? Avait-elle un lien avec le tueur ?

Un coup toqué à la porte le sortit de ses pensées. Son valet entra chargé des vêtements du palefrenier. Travaillant pour le Primum, leurs habits dépassaient les qualités requises pour la domesticité. Grâce à cela, il pourrait s'infiltrer dans cet excentrique lupanar sans éveiller les soupçons.

La nuit était tombée depuis longtemps, les étoiles illuminaient les ruelles lugubres de Londres. Le silence laissait transpercer de temps en temps les cris aigus des rats, les joyeux bruits des tavernes ou encore les glissements subtils de la lame d'un couteau pliant. C'est avec le sentiment d'être légèrement paranoïaque que Thémis arriva enfin devant Les plaisirs de la Lune. Un palefrenier chichement habillé était adossé au mur, ses yeux ambrés transperçant l'obscurité. Mais cette apparence décontractée et séductrice s'évanouit lorsqu'elle s'approcha.

- Un pantalon ?! Bon sang, vous êtes prévisible dans la manière la plus imprévisible possible.

Elle n'eut pas le temps de répliquer car un groupe de marins s'approchait du lupanar, riant à gorge déployée et puant l'alcool. Desiderio lui jeta un rapide coup d'œil avant d'agripper son bras et de franchir l'entrée. Clairsemée de voiles jaunes, des torches montraient le chemin vers un salon aux allures romaines. Il aurait pu sembler aux deux enquêteurs se trouver dans un salon de jeux des plus banals, si des femmes peu vêtues n'étaient pas assises sur des genoux masculins. L'odeur florale des parfums féminins se mélangeaient à celle du tabac, du musc et de la transpiration, se collant à sa peau et à ses vêtements. Assaillit par ses effluves, Desiderio sentait ses yeux s'irriter et ses narines devenir peu à peu insensible. Il n'avait pas prévu cela en venant, espérant secrètement trouver la fragrance de l'homme au cigare et par conséquent la femme qu'il fréquentait. Il devrait finalement recourir aux bonnes vieilles méthodes.

Il repéra la propriétaire des lieux devant les escaliers menant aux chambres. Appuyée négligemment sur la rambarde, elle l'accueillit d'un sourire satisfait aux lèvres.

- Joli déguisement mon chou. Que pensez-vous de mes filles ?

- Magnifiques, dans le style bas de gamme sans l'option « hygiène corporelle » incluse. Quelle femme avait-il l'habitude de voir ?

- Qui ?

Il plissa ses yeux de manière intimidante, une veine palpitant sur ses tempes, pendant que la propriétaire des Plaisirs de la Lune déglutissait difficilement. Elle avait compris, il ne fallait pas jouer avec ce gars là.

- Ro-rosalie elle s'appelle. Mais j'crois que vot'e collègue l'a trouvé avant vous, c'est la plus désirée d'ici, lui dit-elle en pointant du doigt une Thémis susurrant à l'oreille d'une rougissante blonde.

Sentant son regard sur elles, ces dernières se dirigèrent vers une porte close donnant sur un petit salon rouge des plus intimes. San Silvestre les rejoignit à grands pas, évitant les mains baladeuses des belles-de-nuits. Il s'installa sur le fauteuil en cuir en face d'elles, attentif à la conversation qui se déroulait sous ses yeux.

- Martin venait deux fois par semaine, mes soirées lui étaient réservées. C'était un gars bien vous savez, il ne me traitait pas comme une....une pute...

- Avait-il des ennemis ? Des hommes jaloux de l'attention spéciale que vous lui accordiez.

- Il s'attardait pas dans le salon vous savez. Il venait dans ma chambre directement. Alors j'sais pas trop...

- Une dernière question. Savez-vous quel métier il exerçait ?

- Oh, oui j'le sais ! Il me parlait souvent de ses journées après la partie d'jambes en l'air. C'était un ouvrier de Barow'Entreprise...ou un truc du genre. Il travaillait sur une calèche volante qu'il m'a dit. Un truc révolutionnaire.

- Merci Rosalie, vous avez été d'une grande aide.

Ce ne fut qu'une fois bien au chaud dans la calèche du duc qu'ils assimilèrent les dires de la plantureuse blonde. Un seul regard échangé leur permis de comprendre qu'ils étaient arrivés à la même conclusion.

Martin King travaillait dans l'entreprise d'aérodynamisme de Lord Barowmerry, le père de Thémis.

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Enfin le chapitre 4 publié ! Cependant il y a un petit quelque chose qui cloche, il faudra donc que je le réécrive. 

Quand je parle de "calèches volantes", je parle de voitures. "Volantes" parce que ça va beaucoup plus vite qu'une calèche ^^

On dirait que tout relie la victime à la famille Barowmerry. Étrange...


Carpe Diem : Folies NocturnesWhere stories live. Discover now