Chapitre 7 ( Dernière partie)

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          Règle N° 4: Ne pas retenir ses larmes.

          À la vue de Peter et de Martha sur le pas de la porte, je sens mes craintes redoubler. Une sueur froide perle à mon front. Je suis atterrée par la tournure que prennent ces événements.

Peter me toise froidement.

— Bonjour Jessica. Pouvons-nous entrer? Maître Duponnier doit être sur place. Nous le rejoignons pour la visite.

— Laissez- nous passer jeune fille, la maison est à nous désormais, renchérit son épouse les lèvres pincées.

Le toupet des parents d'Ethan me plonge dans un état de sidération tel que je suis incapable de réagir. Martha fait un pas en avant, je m'écarte pour les laisser passer. Incommodée par l'effluve de son parfum capiteux, je m'appuie sur le chambranle de la porte et assiste, médusée aux salutations.

— Maître, minaude Martha avec un large sourire en tendant la main à l'huissier.

— Les présentations ne sont plus nécessaires.

Martha pousse un soupir d'impatience.

— Ne perdons pas de temps en politesses inutiles. L'associé de mon mari nous a escroqués et ce n'est que justice que de racheter la maison. Elle nous revient de droit.

Un malaise presque palpable règne dans la pièce après sa brève tirade. Toutefois, la gêne ne s'empare pas bien longtemps de ce beau petit monde. Les tractations autour des modalités de la vente vont bon train. L'officier public et les Charby discutent maintenant entre eux en m'ignorant complètement.
Peter et Martha veulent faire le tour de toutes les pièces. Affolée, je tente de m'interposer maladroitement.

— Amy n'est pas au courant pour la maison..., commencé-je.

Le regard de Peter me cloue sur place. Vaincue, je bredouille.

— Je vais peut-être le lui annoncer... avant... votre tour, achevé-je.

— Encore heureux que nous n'ayons pas à le faire à votre place, intervient Martha d'une voix sifflante.

Désemparée, je cherche le soutien de l'huissier; je me heurte à un mur d'indifférence. Je baisse la tête, accablée.

***

À quoi bon retarder l'inéluctable? La mort dans l'âme, je monte lentement l'escalier. Arrivée devant la chambre d'Amy, happée par une vague d'appréhension, j'ai envie de faire demi-tour et de prendre mes jambes à mon cou. Mon cœur cogne à coups redoublés. Je toque et entre. Le sourire d'Amy se meurt sur ses lèvres. Le peu de courage qui me reste s'envole. Je m'assois précautionneusement à ses côtés et la prends dans mes bras. La tête appuyée sur mon épaule, elle murmure d'une voix blanche:

— Papa? Maman?

Je secoue la tête.

— Alors, qu'est- ce qu'il y a Jess?

Prenant une grande inspiration, je me jette à l'eau. Amy reste figée, les traits crispés. Une angoisse sourde se lit dans ses yeux. Pendant un laps de temps infini, elle ne dit plus un mot. Enfin, elle sort de son mutisme.

— Ils ne peuvent pas nous mettre à la rue, s'offusque- t- elle.

— Nous ne pouvons rien y faire Amy. Nous n'avons aucun recours, dis-je d'une voix éteinte.

Je suis témoin impuissante de sa souffrance. Et comme si cela n'est pas suffisant, je me prépare à lui asséner l'estocade finale; je me mords les lèvres.

HOMELESS SOON ( Disponible maintenant au format PAPIER )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant