Chapitre 8

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Amy:

« J'avais un rêve. Celui d'approcher les étoiles. De marcher avec elles et flirter avec le soleil. Explorer la galaxie, faire une balade sur la lune et contempler la terre vue d'en haut. Effleurer la Voie Lactée du bout des doigts. Regarder vers l'infini... Lorsque mes yeux se posent sur le ciel clairsemé d'étoiles, ses profondeurs et ses couleurs, je vois une infinité de possibilités... Aujourd'hui, tout a basculé. Je cherche les étoiles... en vain. J'avais un rêve et ce rêve n'est plus... »

En moi quelque chose s'est éteint. Rien, absolument rien ne m'a préparé à ça. C'est déjà très dur de vivre l'absence de nos parents et là, tous mes repères s'effritent. Je n'ai plus rien à quoi me raccrocher.

Je suis terrifiée à l'idée de dormir sous un pont au milieu des cartons. D'être à la merci de la rue, ses dangers et ses pièges. Toute seule, Jessica ne pourra pas nous défendre. Je frémis à la pensée d'une agression ou d'un viol. Je redoute le froid, la chaleur, la neige, la nuit. Et par-dessus tout, je suis couverte de honte à l'idée d'être la risée de mes amies ou de leur inspirer de la pitié. Que vais-je bien pouvoir leur dire? Que je suis SDF dorénavant? J'ai peur d'être rejetée, incomprise et de perdre toute identité.

Et mes études? Je n'ai pas envie de les abandonner. Jamais je ne pourrai réviser dans la rue. Non, il n'est pas question que je retourne au lycée, plutôt mourir! Je ferai fuir tous mes camarades à des kilomètres à la ronde. Où nous doucherons-nous? Les toilettes publiques ne sont pas rares dans Paris, existe-t-il seulement des douches publiques en libre-service?

Je me masse les tempes. C'est un cauchemar. Je vais me réveiller. Le cauchemar continue. J'ai beau me creuser la tête, je ne vois pas d'issue. Peut-être pourrions-nous dormir dans la voiture de maman? Mais, on ne pourra pas stationner éternellement dans la rue et sa citadine n'est pas un bunker.

Comment allons-nous faire? Sommes-nous condamnées à mendier pour survivre? Je dois me mettre à la recherche d'un travail pour aider Jess et trouver le moyen de gagner de l'argent.  Que puis-je bien pouvoir faire?

Je revois le cœur serré les SDF qui dorment parfois dans la rue à quelques mètres de la maison  sur des cartons posés à même le sol. De temps en temps, je vide les placards ou le réfrigérateur pour leur offrir des paquets de biscuits, ou des trésors dénichés au fond du frigo. Le sourire qui s'affiche sur leurs lèvres est ma plus grande récompense. J'aurai tellement aimé leur offrir bien plus, un gîte, un avenir ou un toit. Je vais bientôt les rejoindre, c'est une certitude. Ce n'est qu'une question de temps.

Pourquoi? Pourquoi nous? J'ai beau me torturer l'esprit, la réponse m'échappe. C'est trop dur la vie.

Une migraine affreuse tambourine dans ma tête. J'ai envie d'arrêter le temps, que tout se fige. J'ai envie que ce mauvais rêve s'arrête. Une terreur incontrôlée prend possession de mon esprit, m'envahit toute entière. Je pousse un long cri de désespoir... avant de m'écrouler.

J'entends des pas précipités dans l'escalier. Jessica est là. Elle me promet de nous épargner la rue. Puis, il y a l'arrivée d'Ethan. Elle remue le couteau dans la plaie, encore béante. J'explose. Ethan s'en va. Je n'en ressens ni joie ni soulagement.

Je m'efforce de ne pas craquer pour Jess. Des larmes silencieuses coulent sur ses joues, j'en ai le cœur meurtri. Je les essuie d'une main. Pauvre Jessica, ça doit être très dur pour elle, car elle doit trouver une solution pour nous deux. Je ne dois pas être un poids. J'essaie de rester courageuse, mais je n'y arrive pas. Je me mets alors à pleurer à mon tour. Elle me berce, me murmure des mots apaisants dans un langage que je ne comprends pas.

Après un laps de temps infini, à bout de forces, je finis enfin par m'apaiser. Je lâche tout bas, tellement bas que je crains que Jessica n'ait entendu:

— Il faut croire aux miracles, Jess. Maman répète souvent qu'il faut toujours y croire. Elle me manque tellement. J'aimerais retourner en enfance quand tout allait bien et ne jamais prendre conscience du mal. Fuir tous les problèmes de ce monde... et me réfugier dans ses bras, sous un ciel étoilé ...


Jessica:

Quelle journée! La pire de ma vie, après celle de la mort de June bien sûr, ou celle qui a suivi le départ de mes parents, renchérit une petite voix dans ma tête. La porte refermée sur mes visiteurs, je me laisse glisser par terre et m'assois dos au mur.

Je me sens tellement impuissante et désemparée face à la détresse d'Amy. Je suis complètement retournée devant tant de souffrance. Cerise sur le gâteau: je suis responsable de son tourment. Je suis incontestablement coupable. Je n'ai pas su protéger ma sœur des aléas de ce monde sans pitié.

Un cri déchirant perce à travers les murs. Affolée, je me précipite à l'étage. Amy, telle une épave, gît, esseulée au milieu du lit. Elle est livide. Prise d'un tremblement soudain, elle se met brusquement à pleurer. Je la prends dans mes bras. La sonnerie vient troubler le silence. Elle s'agrippe à moi.

Tout s'enchaîne. Ethan débarque, malgré mon avertissement. La porte qui se referme me fait sursauter. J'essaie de réconforter Amy du mieux que je peux. Je la serre dans mes bras. Des larmes silencieuses coulent sur mes joues. Elle les essuie d'une main. Aujourd'hui, pour elle tout s'est écroulé. Et pour moi aussi. Amy fait un effort pour se ressaisir et veut croire malgré tout à un miracle. Mais, elle parle si bas, tellement bas que je me demande si je n'ai pas rêvé.

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Coucou à tous,

J'espère que ce chapitre vous a plu.

J'attends vos retours avec
impatience. 😉

Plein de bisous. 😘

Je vous aime❤️❤️❤️
Sophie

HOMELESS SOON ( Disponible maintenant au format PAPIER )Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin