Chapitre XXXVI : Un grand pas en avant

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Je ne peux toujours pas croire ce que Ricardo nous a dit !
Ça m'a mise hors de moi !
Heureusement qu'Alexis a su me détendre pendant l'heure d'arts visuels...
Sans ça, je ne sais pas sur qui je me serais défoulée...Et quelle réputation j'aurais eue, car je suis réputée pour être calme, pacifiste et quelqu'un qui ne sort jamais de ses gonds. Ce qui est vrai, je le conçois, je l'avoue même. Mais il est des choses qui m'énerve plus que d'autres, plus que tout !
Comme, par exemple au hasard, les gens qui vous prennent pour des demeurés et de haut et qui vous narguent comme personne sur un sujet qu'ils ne connaissent que très peu, voire pas du tout.
Je passe doucement ma main sur les petites croûtes sur mon cou. Elles sont toutes petites, presque parties et les plaies dessous cicatrisées, fait étonnant au vu de ma nature humaine. Avant-hier, Alexis m'a bel et bien marquée, comme les loups-garous l'entendent nomalement à proprement parler. J'ai remarqué le soir en rentrant chez moi, devant mon miroir avant d'aller me coucher, que de tout minces filets de sang coulaient de mon cou. Comme c'était tout petit, je n'ai pas pris la peine d'en parler avec lui, même si la sensation de vertiges qui m'a prise pendant quelques heures après sa morsure était plus que déroutante. Le lendemain, c'est-à-dire hier, en me réveillant et en me levant, j'ai eu un bref vertige mais qui a disparu tout de suite, pas de quoi alarmer toute la maison. Surtout que quand je me lève trop vite, j'ai parfois la tête qui tourne quelques secondes alors je ne me suis en aucun cas alarmée.

En ce moment, je suis à mon casier et une fois mes affaires de cours récupérées du peu de choses que j'ai dans cette sorte de boîte de métal, je marche résolument en direction de ma salle de classe.
C'est étrange, je me sens observée...Mais il n'y a personne autour de moi à part deux étudiants près de leurs casiers ouverts qui discutent en riant.
Je me presse et rejoins mes amis en classe. Je pose mes affaires sur la table et prends place sur la chaise à côté d'Alexis qui m'attendait. Il me regarde avec un air interrogateur, comme s'il sentait mon trouble et mon déséquilibre masqué. Bien sûr qu'il le sent, il a un sixième sens de loup, maintenant, suis-je bête. Je lui chuchote alors doucement, tandis que notre enseignant de français entre dans la salle d'un pas vif :
-Tout à l'heure, dans le couloir, je me suis sentie observée par quelqu'un ou quelque chose. Mais à part deux autres étudiants qui riaient et qui n'avaient pas l'air de s'occuper de moi, je n'ai vu rien ni personne.
Alexis affiche un air impassible mais je sais qu'il s'inquiète beaucoup. Maintenant que j'y pense, encore étonnant qu'il ne m'ait pas suivie à la trace jusqu'à mon casier et qu'il m'ait laissée y aller seule...Il me fait un vif baiser sur la joue et me chuchote en retour :
-Fais attention à toi...Je ne supporterais qu'il t'arrive quoi que ce soit. Surtout avec les Minuit lâchés dans la nature...
-Je sais, je sais...dis-je doucement.

Le cours commence. Durant tout le reste de la matinée, Alexis me suit alors à la trace dans tout le gymnase. C'est limite s'il ne vient pas dans les toilettes des filles avec moi, dans la même cabine que moi ! Je ne dis rien, parce que je sais qu'il se fait beaucoup de souci pour ma sécurité et moi. Après tout, je ne suis qu'une humaine. Une simple humaine. Une faible humaine...
À midi, on est assis à une table dans un des couloirs deux étages au-dessus de la cafétéria. On est à un angle de mur et on entend alors Ricardo et James, bien que nous ne les voyons pas, discuter.

-Agent de renseignements professionnel ? disent alors Samuelle et Heiling en s'adressant à moi. Va les espionner !
Tina me fait aussi un sourire en coin. Elle aurait bien envie d'y aller aussi, je le sens, mais deux personnes ne seraient pas très discretes contrairement à une seule. Je soupire avec un sourire tout de même amusé.
-Bon, d'accord, j'ai compris...
Je me lève et vais à l'angle de mur qui donne sur le reste du couloir. Je vois alors les deux garçons, au beau milieu du passage, mais ce qui me permet de les voir entièrement tous les deux.

-Comment ça, tu veux me quitter ?
James se tortille les mains entre elles. Je l'ai rarement vu aussi embarassé. Il bredouille alors :
-Je...Je pense que j'ai profité de ta proposition pour me remettre de ma rupture avec Mélusine. Je...Je ne veux pas te faire croire plus longtemps que je t'aime à ce point. Ce n'est qu'une illusion que je me fais et que je te donne...Alors je préfère arrêter.
Ricardo croise les bras.
-Tu veux tout stopper sous ce prétexte ? On n'a même pas encore été au-delà du baiser, tu te paies ma tête ?
-Non ! s'indigne alors James. Pas du tout ! Mais Rick, comprends-moi, je me dis que je ne t'aime pas assez pour rester avec toi, tu mérites mieux !
Je vois alors Ricardo décroiser les bras et mettre ses mains sur ses hanches, comme s'il réfléchissait mais avec un air indigné.
-James, je te pensais plus courageux et plus avare que ça dans une relation, surtout avec moi. Tu n'as pas envie de me...
Je fais la moue avant même d'écouter Ricardo terminer sa phrase. Je n'aime pas les mots vulgaires, et surtout quand on parle d'amour. Pourquoi gâcher une si belle chose en en parlant avec autant de vulgarité ? Cela ne sert strictement à rien. Alexis le sait mais il fait plutôt partie des garçons romantiques que vulgaires. Enfin, plutôt dans les loups-garous romantiques. Mais si c'était le cas contraire, je ne sortirais pas avec lui, tout est une question de logique. Et de goûts, aussi. James répond alors avec un certain calme :
-Non, plus maintenant...
-Comment ça, plus maintenant ?
-Avant oui. Mais maintenant, non. Je ne veux plus...
Leur discussion se poursuit sans aboutir à rien jusqu'au moment où James dit :
-Ricardo, ça ne sert à rien d'essayer d'argumenter et de me persuader. Je l'ai décidé. Je te quitte.
Je suis surprise que James ait décidé d'utiliser son prénom plutôt que son surnom. Ça témoigne du sérieux de la situation de son point de vue. Son interlocuteur perd le contrôle de lui-même, sous la frustration, et prend James au col de sa chemise, comme Alexis avec lui l'autre jour.
-Tu essaies de me faire une blague ? C'est pas drôle, James !
Notre ami se dégage avec violence de la prise de Ricardo.
-Je ne plaisante pas, Rick. Je n'oserais pas avec un sujet aussi sensible que l'amour. Si tu ne veux pas regarder la vérité en face, tant pis pour toi, mais je ne suis plus à toi à partie de maintenant.
Ricardo se met alors à le traiter de tous les noms et lui hurle toutes les insultes possibles et imaginables. Je sens bien qu'il est énervé, mais selon ses dires que je suis en train d'entendre au grand malheur de mes oreilles, pas parce que James le quitte mais parce qu'il avait, entre autre, envie de le mettre dans son lit. Je passe sur les détails gênants qu'est en train de proliférer ce charmeur de mes deux. Peut-on vraiment avoir autant de désirs, tant exclusivement physiques et charnels que ça en devient presque malsain ?
Je cesse de réfléchir à tout cela et voit alors Ricardo qui frappe James en plein visage. Peine perdue, mon cher, il a la résistance, très élevée en somme, d'un lycanthrope. James frappe alors son ancien petit ami dans le ventre, relativement doucement à son échelle, pour le calmer et s'en va.

Je retourne m'asseoir et on est bientôt rejoints par James. Il nous sourit timidement et on le soutient tous !
-Tu es venue nous observer, n'est-ce pas ? me dit-il avec des yeux rieurs.
-Comment tu sais ? je réplique en souriant.
-Je t'ai sentie...dit-il avec un air inconcerné en se grattant innocemment le nez.

Je souris et regarde Alexis qui me rend mon sourire.
Étrange, je me sens à nouveau observée...Comme ce matin. Mais personne ne tentera rien si je suis en présence d'autant de civils et surtout, avec deux autres loups-garous aussi forts que ces deux énergumènes d'Alexis et James.
L'après-midi, on retourne en cours et malgré plusieurs passages seule, dans les couloirs complètement vides du gymnase, quand je faisais des allers et retours de ma classe à mon casier, rien ne se passait. J'avais encore la désagréable sensation d'être observée mais rien ne s'est passé.
À chaque fois que je revenais en classe, Alexis m'interrogeait du regard avec des yeux insistants. Si je le laissais dans cette configuration de visage plus longtemps, je suis sûre qu'il pleurerait toutes les larmes de son corps à cause de la sécheresse de ses yeux mais qu'il ne les clignerait pas une fois avant d'obtenir une réponse claire et suffisamment satisfaisante pour lui !
Les cours s'enchaînent alors avec une surprenante rapiditié et notre après-midi se termine assez vite, à notre plus grand étonnement. Est-ce que mon état de stress m'a donné l'impression d'avoir des cours en accéléré ? Je ne sais pas. Mais quoi qu'il en soit, nous sortons de notre salle de cours.

Après mon passage à mon casier habituel, je raccompagne comme tous les jours Alexis à son arrêt de bus. On discute tranquillement, comme toujours, et il m'embrasse avant que son bus n'apparisse au coin de la rue. Cette fois, il m'a embrassée plus longuement que d'habitude, étrange...Comme s'il sentait que quelque chose allait arriver, comme s'il sentait que quelque chose n'irait pas bien à l'avenir...
Je profite pleinement de ce baiser avant qu'il n'entre dans son bus pour rentrer et s'éloigner de moi.

Quand je fais le chemin de retour, je suis obligée de repasser aux alentours du gymnase. Je passe derrière une haie et je vois alors à travers un groupe de quatre personnes autour d'une cinquième, allongée sur le ventre, par terre. Elle a l'air mal en point.
Soudain, mon cœur fait un bon dans ma poitrine !
Je reconnais par terre Gary, qui relève la tête vers ceux qui me paraissent être ses agresseurs. Il a un œil au beurre noir et un filet de sang coule d'entre ses lèvres qui ont aussi été ouvertes.
J'entends alors des bribes de leur discussion de là où je me trouve :
-Vous êtes des...Des enflures !
Un des agresseurs aux cheveux bruns qui est grand et que je vois de dos rit avec un ton glaçant et réplique :
-Parle pour toi qui es à la botte des Primus sans te poser de questions ! Ce n'est pas comme s'ils étaient blancs comme neige et exempts de tout crime !
Gary grogne sourdement, je l'entends depuis là, et rétorque :
-Les dirigeants sont toujours obligés de se salir les mains à cause d'ordures telles que vous ! Vous êtes vraiment...
Il reçoit alors un coup de pied en plein visage d'un autre homme, blond et presque rasé, qui a une carrure de culturiste et les muscles saillants qui vont avec.
-Tais-toi ! De toute façon, dans quelques minutes, tu auras tout oublié ! De nous et des Primus !
-Exactement ! reprend la première silhouette. Tu vas tout oublier !
-Parce que tu n'as pas de...Primus...

Mince ! Je n'ai pas entendu la fin de sa phrase en entier ! J'aimerais me rapprocher mais si je le fais, je risque de me faire repérer...
Je suis tellement désolée pour Gary...J'aimerais l'aider mais impossible...Si ce sont les Minuit, au vu de leur haine pour les Primus, la famille d'Alexis, il ne faut pas que je me montre...On ne sait pas ce qu'ils pourraient me faire s'ils me capturaient ou quel chantage ils feraient aux Primus s'ils me prenaient en otage...

Je décide de partir bien malgré moi. Je continue ma route un petit quand soudain, j'entends derrière moi :
-Alors comme ça, on a tout vu ?
Alors c'est le noir complet autour de moi...

Mon lycanthrope favoriWhere stories live. Discover now