Chapitre XXII. Le chant du marais.

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Les rumeurs étaient comme une mélodie empoisonnée, une chanson venimeuse qui rongeait jusqu'à l'os et perdaient l'esprit. Les rumeurs du marais étaient un terrible chant car l'on y tuait pour un oui ou un non, et si un tel prétendait que l'un voulait la mort de l'autre, même si les dires étaient infondés, les conflits entre familles pouvaient vites commencer et dégénérer. Telles étaient les rumeurs d'Atralean, ce maudit chant du marais.

Et cela Ignea le savait bien. Voilà huit cent ans qu'il lui parvenait, ne tombant pas dans l'oreille d'une sourde. Elle aimait à tout savoir et ce chant vicieux pouvait être un bon moyen de renseignement. Sauf lorsqu'il se retournait contre elle.

Agacée et surtout ébahie par ce qu'on faisait actuellement courir sur son compte, la Dame marchait sans but dans le palais. Elle s'était débarrassée d'Alouan, s'épargnant ainsi quelques tracas mais restaient Orion et cette stupide cour. Sans oublier la malédiction. Plus elle y pensait et plus cela l'énervait. Il lui fallait trouvé une solution. Et elle doutait sincèrement qu'Alaster soit aussi intéressé par ces recherches qu'il le prétendait. Après tout, en temps que seigneur, n'avait-il pas plus important à faire ? Elle devait se débrouiller seule et cela ne l'effrayait pas. Solitude était aussi une amie.

Elle entra dans une pièce quelconque, sans faire attention, furieuse, en attrapant un objet au hasard et en le lançant de toute ses forces contre un mur. Seulement celui ci ne produisit pas le son métallique qu'elle attendait et un grognement se fit entendre. La dame fit volte face et écarquilla des yeux en se rendant compte qu'elle se trouvait dans le bureau personnel d'Alaster et que son amant s'était pris l'objet dans la figure. Pourtant elle reprit son expression neutre et lâcha d'un ton sans équivoque :

<< Je ne suis absolument pas désolée.

- Je m'en doute bien, grogna la bête. Qu'est ce qui t'as encore mise dans cet état ?

Elle cligna des yeux avant de répondre :

- Le chant du marais.

Alaster fronça des sourcils et pencha la tête sur le côté. Les paroles de sa Dame l'avaient piqué.

- Le marais connait bien des chants. Il en murmure de nombreux au creux de mon oreille. Lequel a-t-il bien pu te servir cette fois ci ?

- Je parle des rumeurs Alaster. Les rumeurs ! Et pas les murmures cinglés d'un marais maudit...

- Tu cherches à vexer Atralean ? Déjà qu'il réclame ton sang...

- Tu sais qu'on me prête une relation charnelle avec Orion ?

Alaster ricana. Il avait entendu cette rumeur stupide qui l'avait amusé. Penser qu'il croirait de tels propos, alors même qu'il devait constamment empêcher sa Dame de s'attaquer au dernier membre de la lignée du marais brûlant, allaient le blesser ou conduire à une quelconque réaction était assez ironique. En revanche, il devait bien avouer que cela avait eut le mérite de réussir à mettre en colère Ignea, ce qui, en soit, n'était pas une chose difficile. Mais jouer sur cette corde était une très bonne façon d'y parvenir.

Il décida d'en rire.

- Vraiment ? Je ne pensais pas que le fils du feu était ton genre d'homme...

Une moue mutine naquit sur le visage effrayant de la jeune femme qui s'affala dans un divan, repliant les jambes sous elle. Elle posa sa tête sur sa main, et répliqua, entrant dans le jeux de la bête :

- Tu te fais vieux Alaster. Il me faut bien satisfaire quelques désirs que tu ne parviens pas à éteindre.

- Plaisante toujours ma belle, nous verrons bien si je ne suis pas à la hauteur.

Atralean - La Dame Du MarécageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant