CHAPITRE 15

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AMINATA GUEYE

Cette femme est vraiment forte. Elle a tellement envouté ma fille qu’elle ne reste même plus à la maison. Daf ko tagalé ak khelam, tagaléko ak dieukeuram (elle lui a fait perdre la tête et séparer de son mari).

Abdourahmane ne lui parle même plus. Mais cela ne va pas durèr parce que si une jeune femme peut faire ça, qu’est ce que moi, qui suis née bien avant elle, est capable faire ?

Le jour de l’accident de Amadou, Aïcha est sortie d’ici comme une folle et Amadou n’a pas cessé de pleurer après elle. C’est à cause de ça qu’il a eu son accident et que je n’ai pas pu faire boire à Abdou le bissap où j’avais mis la poudre que Serigne Diéne m’avait donné.

Je suis repartie le voir. Il m’a dit que cette femme avait fait d’énormes sacrifices et que ce ne sera pas aussi facile. Il maintient ce qu’il a dit : Aïcha doit retourner avec son mari et entrer dans les bonnes grâces de sa coépouse pour mieux la ferrer. Il m’a donné deux sacrifices à faire. Le premier consistait à prendre un morceau de cola rouge, de le séparer en quatre parties, de dire :

《diaganté Abdourahmane Sall et le nom de sa coépouse na tass ni nienti kharou gourou yi》(que la relation entre Abdourahmane et sa femme se casse comme les quatre morceaux de ce cola),
Après, les jeter de part et d’autre dans la rue.

Il m’a assuré que si ces quatre morceaux ne se reconstituaient pas pour reformer un cola, mon gendre allait se séparer de sa deuxième et qu’ils ne se remettraient jamais. Cela n’a pas été du tout difficile à faire car c’est Khadija qui m’a donné le nom de la femme, sans savoir pourquoi, bien que je ne connaissais pas son nom de famille mais le marabout m’a assuré que ce n’était pas grave du moment qu’elle répondrait si on disait MOSSANE.

Mais le deuxième était plus difficile encore car c’était à Aïcha de le faire. Il s’agissait pour elle de prendre ses selles à elle et de les mettre au bout de deux morceaux de bois que m’avait donné le marabout, l’un avec du fil blanc enroulé autour qui représentait Abdourahmane car disait-il, il ne savait même pas ce qu’il fait le pauvre et l’autre avec un morceau de fil rouge qui représentait sa coépouse car c’était le diable en personne. Apres, elle devait dire en les enduisant de ses selles :

《diganté Abdourahmane ak niarel’am bi na khegn ni p… yi》( que la relation entre Abdourahmane et sa deuxième sente aussi mauvais que ces selles). Puis elle les enterreraient en les opposant.

Mais Aïcha ne m’a même pas écouté lui en parler. Au contraire, maintenant elle se fout de tout. J’ai été obligé de le faire moi-même après l’aval du marabout.

Que ne ferait une mère pour le bien de sa famille ?

Aïcha sort quand elle veut, rentre quand elle veut oubliant même qu’elle est toujours une femme mariée. Ses enfants passent maintenant plus de temps avec sa coépouse qu’avec elle et elle s’en fout.

Aïcha a toujours été cette femme calme au dehors qui ne disait pas grand-chose mais elle m’en a fait voir de toutes couleurs étant plus jeune. Je n’y ai même pas cru quand Abdou est venu ici pour demander sa main et qu’elle a accepté.

Avec son mariage, j’ai pu gagner l’estime de ma belle famille. Elle a fait un bon mariage. Son mari l’a mis dans de très bonnes conditions. Même nous, ils nous a mis dans de très bonnes conditions. Mais aujourd’hui tout le monde est content que son mari lui ait trouvé une coépouse et qu’elle soit revenue à la maison. Louné mangui kay dégeu nak.

Cette femme gagne là une bataille car la guerre c’est moi-même qui vais la gagner. J’irai même jusqu’à sa mort s’il le faut mais dinama abal.

LES TURPITUDES D'UN MARIAGE POLYGAMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant