Chapitre 31

1K 65 15
                                    

Martina

En poussant la porte de chez moi, je suis toujours en larmes. Ma mère arrive directement vers moi, elle a toujours des traces de bronzage de leur séjour en montagne. Elle me prend dans ses bras, car elle sait, elle sait que la vérité a éclaté et qu'il est en colère.

- Ne te mets pas dans cet état, ça va aller. Laisse-lui le temps de digérer la nouvelle.

Elle me caresse le dos et parle doucement.

- Il... il ne me pardonnera jamais, maman. Tu aurais vu son visage, son...

Je sanglote tellement fort que les mots se bousculent dans ma bouche comme dans ma tête. Pourquoi ai-je été aussi bête pour laisser passer ma chance d'être avec lui ? Il a toujours été le seul à me comprendre, et moi je l'ai jeté et je lui ai menti. Il ne mérite rien de tout ça. Ma mère se redresse soudainement.

- Où est Ylana ? dit-elle en paniquant

- Je l'ai laissée avec lui, ils avaient besoin de se retrouver tous les deux.

- Ah d'accord.

Elle me pousse et m'enlève ma veste, mais la seule chose dont je suis capable c'est de m'affaler sur le sofa. Elle ne me dit plus rien. En même temps, il n'y a plus rien à dire. Même si elle m'a toujours soutenue, elle m'a également toujours certifié que je faisais une connerie cette fois-là. Et Dieu seul sait pourquoi je ne l'ai pas écoutée et ne l'ai pas laissée me raisonner. Je sors mon GSM, et malgré moi j'ai le coeur qui se ressert en voyant que je n'ai aucun appel en absence ou message. Non mais tu t'attendais à quoi ?

J'enfonce mon visage dans l'oreiller, en espérant que par je ne sais quelle magie, les images de cette soirée vont s'évaporer. Je suis tellement en colère contre moi même que je me réjouis même que ces images ne me quittent pas dans un certain sens. Ça me fait bien comprendre que je me suis trompée, et que je n'ai d'autre solution que d'assumer mes actes et en subir les conséquences, que j'ai mérité que tout me revienne à la figure.

Le problème c'est que cette haine me pousse à faire changer les choses, à ne pas abandonner. Il faut que je me batte pour récupérer cette bulle de bonheur que je venais littéralement de faire éclater. Mais comment réussir à lui expliquer, à l'atteindre ? Il ne veut plus me voir, et c'est compréhensible. De plus, je sais que si j'essaie de l'appeler il ne daignera pas répondre, et il est hors de question que je laisse lâchement un message sur sa boîte vocale.

Je me lève dans un élan dont je ne sais pas la provenance, attrape à la volée une feuille et un stylo. J'écris, je couche toute cette satanée histoire sur la feuille de papier, et je suis surprise quand dix minutes plus tard, une page est déjà noire de mon écriture.

Après presque une demi heure, je plie soigneusement les feuilles. Est-ce que je dois aller lui donner maintenant ? Laisse-lui du temps, Martina. Il va se sentir accablé si je retourne le trouver maintenant, et risque de lire cette lettre sans vraiment y voir ce que je ressens. Je préfère attendre de la lui donner quand il ramènera Ylana à la maison.

Je me lève, en laissant cette lettre sur la table, et monte dans ma chambre car je suis épuisée. Ma mère est déjà au lit depuis je ne sais combien de temps, et c'est là que je me rends compte que le temps est passé plus vite que ce que je pensais. Je me faufile discrètement dans ma chambre, et me glisse sous les draps de mon lit sans même prendre le temps de me changer. La seule chose que je veux, c'est ne plus penser à ça. Mais je sais pertinemment que je ne fermerai pas l'oeil de la nuit, ou alors très peu.


Jorge



Je me réveille avec Ylana - avec ma fille - allongée de tout son long sur mon torse nu. Je passe mes doigts dans ses mèches brunes et bouclées en souriant. Ce sont des sensations tellement nouvelles et tellement enivrantes. Je me suis occupé d'elle tout le temps, mais maintenant que j'ai appris que j'étais son père, tout ce que je peux ressentir est totalement différent, comme amplifié.

Elle dort toujours paisiblement, la bouche légèrement ouverte, et garde sa joue collée contre mon pectoraux. Je ne bouge pas, je ne veux pas la réveiller, je veux juste profiter de ce moment si paisible et pourtant anodin, mais j'en ai déjà raté tellement à ses côtés que cela représente un véritable trésor à mes yeux à l'instant.

J'attrape mon gsm sur la table de chevet. Je n'ai aucun message. Je pensais que Martina aurait tenté quelque chose, mais en même temps elle me connaît et elle sait pertinemment que je n'aurais jamais répondu.

J'ai encore beaucoup de mal à me dire qu'elle m'a menti tout ce temps. Elle aurait très bien pu tout m'avouer quand on s'est retrouvé à Paris, mais non. Elle n'en a rien fait. Et je lui en veux pour tout ce temps perdu.

Les jours défilent, et j'apprends, ou plutôt découvre mon nouveau rôle. Ylana reste collée à moi la plupart du temps, je crois qu'elle ressent également ce changement conséquent dans sa vie. Cette petite est vraiment très intelligente. J'ai promis que je la ramènerai aujourd'hui mais j'ai du mal. J'ai la sensation que je vais la perde à nouveau, et je n'ai vraiment pas envie de m'en séparer. Je sens que j'ai le droit de l'avoir plus avec moi, pour compenser avec tout le temps dont j'ai été privé d'elle, mais je ne peux pas faire ça. Ça serait aller trop loin...

Je rassemble les affaires d'Ylana, qui est entrain de jouer avec ma mère dans la cuisine. Elles se sont trouvées rapidement ces deux-là. Ma mère est folle de la petite. Comment ne pas l'être ? Elle est tout bonnement exceptionnelle.

Même si ça me déchire le coeur de devoir la ramener, je n'ai pas vraiment le choix car de plus, je dois commencer à travailler cette semaine. Enfin pouvoir exercer ma vocation. Je rassemble tous les affaires de ma petite, et les rejoins ensuite à l'étage inférieur.


Je me sens nerveux, je n'ai aucune envie de la voir et d'écouter son baratin. Ce qu'elle a fait me fait tellement souffrir, je ne crois pas pouvoir m'en remettre un jour. Rien que de penser à tous ces petits moments précieux que je n'ai pas eu la chance de vivre, j'ai la nausée.

Lorsque je les rejoins, ma fille me jette un immense sourire, que je lui rends.

- On va devoir y aller ma puce.

- Déjà ?

Elle fait la moue et regarde ma mère.

- Maman t'attend mon ange, dit-elle en posant une main dans la chevelure d'Ylana.

- Bon d'accord.

Elle se laisse glisser du tabouret et se dirige vers moi. Je lui tends son petit manteau puis la prends dans mes bras. Je vais aller jusque chez elle à pied, histoire de profiter de ma fille au maximum. Je ne m'étais jamais rendu compte que son absence puisse tant me blesser, même si je n'étais pas au courant. J'aurais tellement voulu que tout se passe autrement. Mais le temps... c'est lui le véritable problème dorénavant.

Ylana se penche vers ma mère pour lui faire un câlin. C'est une petite très affectueuse, et très bien élevée. Même si je ne doute pas des compétences de Tini en tant que maman, je suis heureux de voir comme elle est épanouie.

- Au revoir, grand-mère.

Je vois aussitôt ma mère tressaillir, et une larme perler dans ses yeux. 

- A plus tard ma puce.

Elle lui fait un petit signe de la main, beaucoup trop mignon pour ne pas succomber à son charme. Je me dirige vers l'entrée et la petite cale sa tête dans le creux de mon cou. Je passe une main dans ses cheveux. Quand je sors, le soleil me surprend ; il fait super beau. Je me sens tellement heureux, mais trahi par la même occasion. Tout est vraiment flou... Mais ce qui est sûr est que je vais me rattraper auprès de ce petit bout pour tous ces instants manqués.

¿Dónde está tu mamá ? {JORTINI} Tome 1Where stories live. Discover now