S05 - EP 19 ● part I

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ÉPISODE 139 – (partie 1/5)


La porte s'ouvrit sur un visage haï. Rudy cilla. Quelque chose avait vraiment contrarié Chayton. À force de le côtoyer, il lui arrivait de déchiffrer son humeur. Dernièrement, l'homme semblait vibrer sur la longueur d'onde de la colère et de la nervosité. Depuis le jour de l'an, Chayton zonait en « fréquence haute colère ». Rudy l'avait connu calme et froid au début de sa séquestration. Il avait souvenance d'un masque presque avenant, au brunch Meiridies, à la réception organisée pour ses fiançailles annulées.

Il se tint à carreau, mais son angoisse drapé d'un mauvais pressentiment grandit. Cette journée ne s'annonçait pas comme les autres. Son regard éperdu se porta sur l'entrée. Chayton ne s'était pas donné la peine de la verrouiller. Il arrivait que le connard ouvre grand les portes et les fenêtres, sous le prétexte d'aérer la maison. Il la refroidissait surtout, par ces temps venteux et froids. Se doutant que la manœuvre servait à saper son moral, Rudy se retirait dans sa chambre et se réfugiait dans un roman fantasy.

Chayton possédait un stock de livres, de DVD et Blu-ray, avec un faible pour l'irréel, le surréaliste, la science-fiction, le fantastique et l'horreur. Des styles que Rudy affectionnait. Parfois, il se surprenait à se demander ce qu'aurait été leur relation sans kidnapping et sans le fossé entre son père et l'énergumène.

Quand la déprime avait raison de lui, Rudy regardait fixement à travers l'une des nombreuses fenêtres de la baraque. Il s'essayait alors à la projection astrale. Combien de fois n'avait-il pas formulé le vœu ridicule de se téléporter, en observant les saules dans le jardin... Chayton cessait son manège à son premier éternuement. Car il était exclu qu'il tombe malade, à en juger la douche chaude imposée au moindre toussotement. Son geôlier soufflait le chaud et le froid. Littéralement.

— Ton but est de développer chez moi un syndrome de Stockholm, lui avait-il demandé, une fois.

Chayton avait ricané.

— Il faut des semaines, voire des années pour y arriver. Ça dépend aussi de la force mentale de l'otage. Avec ton caractère effronté, tu as de la marge avant de me manger dans la main.

— Tu sais, si t'es en manque d'amis ou de présence humaine, il y a des façons plus saines de s'attirer la sympathie des autres.

— Je mourrais de solitude plutôt que d'avoir la sympathie d'un Leblanc.

Jusqu'ici, leur rapport se définissait par cet équilibre d'échanges acerbes et de considérations déplacées. Le geôlier s'assurait que le captif ne manque physiquement de rien. Le prisonnier vérifiait qu'émotionnellement, le bourreau tienne toujours la route. Ils se détestaient presque avec cordialité. Mais depuis la veille, Rudy le sentait, la donne avait changé. Il soupçonnait l'étrange émission de Menews TV, devant laquelle il avait trouvé Chayton, d'en être fautive.

*

Rudy vivrait un premier janvier insolite... son rapt mis de côté.

Nouveau calendrier, et les informations à la télévision prenaient une autre saveur. Chayton ne suivit pas l'émission jusqu'au bout. Il quitta la pièce en trombe, tandis que les journalistes invitaient des Leblanc à dévoiler quelques secrets de leur maison. Il ne rentra pas de l'après-midi. Rudy passa quasiment son jour de l'an seul, avec ses pensées battant la campagne.

Quelle mouche avait piqué les Leblanc, pour accepter ce show-débat en direct live ? Lui s'était infligé une torture durant le dernier tiers de l'émission. Entre Tonton Nat qui rencontrait de plus en plus de difficultés à exprimer ses pensées, papy Ritchie qu'on avait déplacé malgré ses problèmes de tension, Grand-oncle James outré d'être catapulté en pleine télé-réalité, Vince fermé aux questions des internautes, et Oncle Danny qu'on aurait dit mal en point... Puis son grand-père avait fini par clamer, pompeux :

HOT CHILI - saison 5Où les histoires vivent. Découvrez maintenant