Corps

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Comme il l'avait promis à son fils, Drago se rendit directement auprès de Harry. Il avait pris la précaution de se munir d'une potion pour la gueule de bois. Avec ce que le héros du monde magique avait bu dans la tour d'Astronomie la veille au soir, il ne devait pas être dans une forme olympique. Il doutait même que ce fichu brun ait pu sortir de son lit vu les quantités qu'il avait ingurgitées en parlant de son mariage raté. Et puis... il le lui avait promis.

Drago n'avait pas été surpris d'apprendre qu'il avait été malheureux avec la belette femelle. S'il détestait les Weasley en général, il savait que Ron Weasley était un véritable ami pour Potter. Par contre... La belette femelle n'avait qu'une chose en vue : devenir Lady Potter.
Il était évident qu'elle ne voyait que les avantages à épouser l'ami de son frère. Elle se comportait comme si elle n'avait jamais pris la peine de connaître celui qui était devenu son mari. Vouloir de lui une vie publique alors qu'il n'aimait pas ça prouvait bien sa stupidité... Elle aurait dû aussi se douter que Potter ne la laisserait pas rejeter un seul de leurs enfants, pas après l'enfance misérable qu'il avait eue.

Il frappa aux appartements de Potter et n'attendit pas qu'il réponde pour entrer à grands pas.
Voyant son collègue affalé sur un fauteuil, visiblement mal en point, il grogna et leva les yeux au ciel. Apparemment cet idiot n'avait pas cherché à atteindre son lit, et s'était contenté de cuver le whisky ingurgité dans son salon.
- Réellement Potter ?
Sans douceur, il le redressa et lui fit avaler le contenu de la fiole de potion. Rapidement, il put voir les effets de sa potion, et il se redressa satisfait.

Dégrisé, Harry cligna des yeux, et fronça les sourcils, visiblement perdu.
- Malefoy ?
Avec un demi-sourire, Drago le lâcha pour s'installer face à lui.
- Ça va mieux ?
- Je suppose. Tu avais besoin de moi ?

Drago ricana.
- En dehors du fait que tu es un professeur dans cette école et que tu es sensé montrer l'exemple à tous les gosses ?
Harry laissa échapper un grognement agacé et fusilla du regard l'insupportable blondinet.
- Sérieux ? Y'a pas cours aujourd'hui.

Le Directeur de la maison Serpentard se redressa et reprit son sérieux. Potter était de nouveau lucide après tout, et même si l'agacer était un plaisir permanent, sa visite avait un but bien précis.
- J'ai eu la visite de Scorpius.
Harry se redressa un peu plus et se frotta les yeux, comme pour éliminer les dernières traces d'ivresse et de fatigue de son organisme. Puis il accorda toute son attention à son vis-à-vis.
- Comment il va ? Il se remet de ce qui s'est passé ?
Drago eut un sourire de gratitude en voyant que son collègue semblait sincèrement concerné par le bien être de son fils. Il hocha lentement la tête.
- C'est un enfant solide. Il va bien.
- Pourtant, tu n'es pas venu me coller une de tes fichues potions dans le gosier pour me dire que ton fils va bien non ?

Drago hésita puis secoua la tête, de nouveau sérieux.
- Il est venu me parler d'Albus.
Harry se tendit immédiatement et le blond se pencha en avant pour poser une main sur son bras, dans l'espoir de le calmer. S'il resta immobile, le Gryffondor grogna cependant immédiatement.
- C'est James qui a encore fait des siennes ?
- Je ne pense pas. En tous cas, s'il est impliqué Scorpius ne m'en a pas parlé.
Le brun prit une longue inspiration pour se calmer, et hocha la tête.
- Vas-y Malefoy, je t'écoute.
- Scorpius est inquiet parce qu'Albus passe toutes ses soirées à pleurer toutes les larmes de son corps.

Harry sembla déstabilisé, et Drago se dépêcha de continuer.
- Il se sent responsable de ton divorce apparemment. Il s'est persuadé que c'est à cause de lui, et que tous les Weasley vont le détester et te détester. Et il sait à quel point tu aimes la famille belette.
Le Sauveur resta muet, visiblement horrifié. Drago se leva pour poser les mains sur ses épaules et le secouer légèrement.
- Potter.
L'homme leva ses yeux verts vers lui et secoua la tête.
- Pourquoi il n'est pas venu me voir ?
- Parce qu'il est une tête de mule comme son père ? Parce qu'il préfère se penser responsable de tout ce qui ne va pas autour de lui ? Tu te souviens Potter ? Toi qui pensais que tu étais responsable de toutes les morts dues à la guerre ? Tu comprends à quel point tu avais tort ?

Harry se leva brusquement faisant reculer Drago. Cependant, il ne le repoussa pas. Il l'attira juste contre lui pour le serrer dans ses bras à l'en étouffer, sans dire un mot.
Les deux anciens rivaux restèrent enlacés de longues minutes avant de se séparer, un peu gênés par leur soudaine proximité.
La voix rauque, Harry remercia Drago d'être venu lui parler et lui demanda s'il pouvait faire venir Albus, puisqu'il était son responsable de maison.

Lorsque Drago fut sorti, Harry se laissa tomber dans son fauteuil, bien plus perturbé qu'il ne voulait l'avouer.
Sans le savoir, Malefoy avait su trouver les mots pour apaiser la culpabilité qui le rongeait toujours, des années après la guerre. Il s'était toujours senti coupable de ne pas avoir lutté assez fort, de ne pas avoir agi assez vite. Il y avait la mort de ses parents - qui avaient voulu le protéger. La mort de Sirius, mort parce qu'il avait désobéi. La mort de Tonks et Remus qui venaient d'avoir un enfant, morts sur le champ de Bataille. La mort de Fred, laissant George amputé de sa moitié d'âme.
Personne ne lui avait jamais fait de reproches directs, mais Harry avait gardé cette culpabilité en lui. C'était peut être pour cette raison qu'il avait laissé Ginny le manipuler comme elle l'avait fait, pour expier. Il n'avait peut être pas été heureux en ménage, mais il n'avait rien fait de son côté pour atteindre le bonheur qu'il avait longtemps espéré.
Il était resté prisonnier d'un travail qui ne lui avait jamais plu, il avait laissé sa femme l'éloigner et le priver de ses enfants.

Et voilà que Drago lui montrait son jeune fils qui se torturait l'esprit pour des évènements qui n'avaient aucun rapport avec lui, et en une phrase, il lui prouvait qu'il était aussi innocent qu'Albus. En quelques mots, il démolissait le mur de culpabilité qu'il avait érigé dans son esprit.

Famille recomposéeWhere stories live. Discover now