Famille recomposée

Échange de prisonniers

Depuis l'instant où elle avait été surprise dans la chambre des secrets par Harry Potter, alors qu'elle venait de kidnapper les fils de deux de ses professeurs, Electre avait eu une conduite exemplaire. De l'avis de tous, elle était une autre jeune fille, plus calme et plus respectueuse.
Elle avait pris conscience de ses erreurs, mais elle avait également peur d'être envoyée à Azkaban. La nuit, elle s'éveillait en sursaut, haletante, alors qu'elle imaginait les Aurors venir la chercher pour la traîner au milieu des Détraqueurs.

De façon surprenante, Albus et Scorpius ne semblaient pas lui tenir rigueur de ce qu'elle avait fait. Ils n'avaient jamais eu un commentaire déplacé ou le moindre reproche à son encontre. Pire encore, ils faisaient leur possible pour la mettre à l'aise.
Habituellement, depuis son arrivée tardive à Poudlard, elle restait isolée dans la salle commune après le repas. Elle ne parlait à personne, et personne ne semblait vouloir tenter de se lier à elle.
Depuis qu'elle était remontée de la chambre des secrets, menée par ses deux professeurs, les deux garçons qu'elle avait agressé venaient s'installer près d'elle, et tentaient de l'intégrer à leurs conversations.

La plupart du temps, elle était trop surprise de leur gentillesse pour réellement leur répondre convenablement, mais les deux plus jeunes ne semblaient pas s'en formaliser et faisaient comme si tout était normal.
Un soir où elle avait loupé le dîner, Albus était même revenu avec de quoi grignoter pour elle.
En voyant ses yeux verts amicaux fixés sur elle, elle avait pensé horrifiée qu'elle avait jeté le Doloris sur ce garçon, et la culpabilité la dévorait.

Ces sentiments étaient quelque chose de nouveau. Elle avait tellement baigné dans les souvenirs de ses parents - qui étaient cruels et sans pitié - qu'elle avait voulu leur ressembler. Elle avait réellement pensé qu'elle pourrait être la digne héritière de son père, s'interdisant ne serait-ce que de penser à une autre éventualité pour son avenir.
Sauf qu'elle avait pris conscience qu'elle n'était pas aussi froide, aussi dépourvue de sentiments qu'elle voulait bien le croire. Elle avait grandi sans amour, dans une solitude glaciale, mais à l'instant où les professeurs Potter et Malefoy lui avaient tendu la main et avaient fait preuve de gentillesse, tout ce qu'elle avait cru s'était effondré.

Personne ne lui avait jamais appris à différencier le bien et le mal. Personne n'avait jamais semblé se soucier de son bien-être, de son avenir.
Cependant, Electre n'était pas stupide : elle avait vite compris que ce qu'elle avait fait était mal. Et depuis qu'elle l'avait reconnu dans son esprit, elle se sentait coupable.

C'est pourquoi, quand le professeur Malefoy entra dans la salle commune des Serpentard et lui annonça qu'elle était convoquée dans le bureau du professeur Potter, elle s'était sentie bêtement soulagée. Elle allait être punie, probablement renvoyée. Mais elle aurait ce qu'elle méritait. Elle accepterait le châtiment sans protester.
Un peu pâle, elle salua doucement Albus et Scorpius qui étaient près d'elle, comme si elle leur disait adieu presque. Les deux jeunes garçons froncèrent les sourcils mais lui adressèrent un sourire amical, en lui annonçant qu'ils l'attendraient pour aller manger dans la Grande Salle.

Le professeur de potions les interrompit.
- Je pense que vous ne devriez pas attendre Electre ce soir, les garçons. Elle mangera probablement avec nous, dans le bureau du professeur Potter.
Les deux amis hochèrent la tête, visiblement déçu d'être écarté d'un repas avec leurs pères, mais ils n'émirent aucune protestation.

Electre suivit donc Drago Malefoy, restant quelques pas derrière lui, le regard fixé sur le dos de l'homme qui la conduisait visiblement vers son châtiment. Elle ne se rendait pas compte qu'elle ralentissait de plus en plus, si bien qu'elle sursauta lorsque Drago se retourna pour lui demander de ne pas trop traîner.

La voyant si nerveuse, il fronça les sourcils et il soupira.
- Miss Sayre... Nous ne nous rendons pas à un échange de prisonniers ou à une quelconque séance de torture ! Je sais bien que Rusard parle toujours de châtiments corporels, mais je vous assure qu'aucun professeur ne ferait le moindre mal à un élève.
La jeune fille hocha la tête, mais il était évident qu'elle n'était pas à l'aise. Drago souffla, et la fit passer devant lui, l'obligeant à avancer en la guidant d'une main légère sur son épaule.

Plus ils approchaient du bureau du professeur Potter, plus Electre se sentait mal. Les larmes menaçaient de déborder, et elle avait l'impression que son coeur n'avait jamais battu aussi fort dans sa poitrine. Elle s'immobilisa d'un coup et baissa la tête, n'osant pas regarder son Directeur de maison.
- Professeur Malefoy... Je voulais vous dire... Je suis vraiment désolée de ce que j'ai fait. Je...
Drago l'interrompit en pressant gentiment son épaule.
- Miss... Electre, calmez-vous. Personne ne vous en veut, d'accord ?

Misérable, Electre hocha la tête, refusant cependant de relever la tête, restant concentrée volontairement sur le sol de Poudlard.

Drago observait Electre Sayre, fille de Voldemort et de Bellatrix Lestrange, avec une sorte de fascination. Il avait côtoyé ses deux parents, et il était bien placé pour décrire leur folie et leur cruauté.
Cependant, la gamine semblait... dévastée et fragile. Elle avait été une adolescente qui avait suivi ce qu'on lui avait rentré dans le crâne toute son enfance avant de se rendre compte qu'elle avait fait les mauvais choix.

Il n'y avait pas à chercher bien loin pour qu'il fasse le parallèle avec sa propre adolescence et qu'il se souvienne de ses erreurs, dont la plus grave avait laissé une marque indélébile sur son bras...
Il avait été surpris de la décision de Potter de laisser la jeune fille impunie, de cacher qui elle était réellement. Sur le moment, fou d'inquiétude pour les deux garçons disparus, il aurait voulu la faire souffrir et se montrer impitoyable.

Puis, une fois rassuré de voir que Albus et Scorpius allaient bien, il avait compris la décision de Potter et avait été totalement d'accord avec lui. Elle méritait une seconde chance, tout comme lui y avait eu droit. C'était une gosse, qui n'avait rien connu d'autres que l'héritage plein de haine laissé par ses parents biologiques. Elle ne devait pas avoir eu une enfance bien heureuse, et il était temps qu'elle découvre qu'il y avait autre chose que la vengeance pour elle.

Son avenir était entre ses mains.

Prompt de demain : prison