Une porte verrouillée

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Harry faisait une ronde, seul pour une fois, dans les couloirs déserts de l'école. Drago était de corvée de retenue, surveillant un groupe d'élèves qui avaient décidé de braver son autorité pendant le cours de potions.

Drago avait été furieux sur le moment, mais Harry lui avait montré le comique de la situation. Les élèves, quelques Gryffondor et deux Serdaigle avaient lancé des ingrédients au hasard dans les chaudrons pendant qu'il avait eu le dos tourné.
Probablement qu'ils avaient espéré le blesser et l'envoyer à l'infirmerie quelques temps, sa présence ne faisant toujours pas l'unanimité.

Les chaudrons avaient bel et bien explosé. Cependant, Drago avait connu la guerre, et il avait dû subir la présence de Voldemort dans sa propre maison. Sa mère inquiète pour sa sécurité l'avait entraîné encore et encore pour qu'il puisse survivre à un duel. Pas les duels policés et sévèrement encadrés appris à Poudlard. Plutôt les joutes sauvages qui pouvaient entraîner la mort à la moindre faute d'inattention, les duels de champs de bataille.
Il était moins nerveux qu'à son adolescence, mais il avait gardé tous ses réflexes intacts.
Aussi au son du sifflement du chaudron prêt à exploser, il avait plongé derrière son bureau en lançant un sort de bouclier sur la majeure partie de la classe. La mixture avait recouvert les coupables trop proches du chaudron bouillonnant pour être inclus dans les protections, les couvrant de boutons particulièrement disgracieux.

Drago n'avait pas mis longtemps à comprendre que ce n'était pas accidentel, aussi, il les avait collé sans pitié, indiquant à Pomfresh de ne pas soigner leur éruption cutanée d'ici la fin de la semaine... Quelques jours d'humiliation ne leur ferait pas de mal, après tout.

*

Puisque ses années en tant qu'élève n'étaient pas si loin dans sa mémoire, Harry pensait connaître toutes les ruses estudiantines pour échapper à la surveillance des professeurs et des préfets. Aussi, il déambulait lentement dans les couloirs, aux aguets, ouvrant les portes des classes pour vérifier qu'aucun petit malin ne s'était dissimulé.

Il était au troisième étage lorsqu'il tomba sur une porte verrouillée. Avec un froncement de sourcils, il regarda autour de lui, haussa les épaules, et lança un Alohomora discret pour inspecter la pièce et assouvir sa curiosité : il ne se souvenait pas d'une salle de classe à cet endroit.
Il fit quelques pas à l'intérieur et sourit en reconnaissant la pièce.

Il était déjà venu ici, durant sa toute première année. Il était encore inconscient de ce qu'était le monde magique, et il s'était longuement promené sous sa cape d'invisibilité qu'il venait de recevoir - son premier vrai cadeau de Noël. Puis il était entré dans cette pièce, et il avait découvert pour la toute première fois le visage de ses parents et le miroir du Riséd.

Il se souvenait de Dumbledore qui était venu le voir pour le mettre en garde au sujet de la relique. Ce miroir qui avait perdu tant de sorciers, en les plongeant dans une douce illusion qui n'existait que dans leurs esprits.
Le pouvoir de montrer ce que son cœur désirait le plus... Il se rendit compte qu'il n'avait jamais vu Ginny dans ce miroir. Il avait rêvé d'une famille, mais pas de la benjamine des Weasley...

Yeux fermés, l'homme se plaça devant le miroir, légèrement tremblant. Il se demandait ce qu'il verrait s'il ouvrait les yeux. Ce qu'il désirait.
Un bref instant, il songea à quitter la pièce sans regarder, craignant ce qu'il pourrait découvrir. Mais son courage Gryffondor se réveilla subitement, et il ouvrit les yeux.

Au départ, il ne vit que son reflet. Lui, adulte, les cheveux noirs toujours autant en désordre, ses yeux toujours aussi verts derrière ses lunettes. Il portait une robe sorcière noire ouverte sur une tenue moldue - le genre de vêtement qu'il portait pour donner ses cours maintenant qu'il n'était plus contraint de porter l'uniforme austère des Aurors.
Il eut un sourire amusé en se rendant compte qu'il désirait réellement être professeur. Ce n'était pas juste une lubie ou une façon de contrer Ginny... Puis, au loin derrière son reflet, il vit arriver plusieurs silhouettes. Son double eut un sourire tendre, et ses trois enfants se placèrent près de lui.
Tous les trois. James, Albus et Lily. Et ils étaient visiblement proches.
Teddy se montra aussi, souriant.

Mais ce n'était pas terminé. Deux personnes de plus arrivaient. Bouche bée, Harry recula d'un pas en contemplant le reflet, ce que son cœur voulait. Ce qu'il désirait au plus profond de lui, sans qu'il n'en ait totalement conscience.
Scorpius Malefoy s'était glissé près d'Albus, et les deux garçons chuchotaient ensemble comme ils le faisaient sans arrêt, visiblement complices. Autant que Ron et lui l'étaient.

A ses côtés, il y avait quelqu'un. Quelqu'un qu'il n'aurait jamais pensé voir entrer de nouveau dans sa vie. Drago Malefoy était près de lui, avec son sourire narquois, son air fier et ses vêtements chics. Ses robes austères de potioniste ne trompaient personne sur leur qualité : même après toutes ces années, Drago Malefoy restait un aristocrate fortuné.
Drago leva la main doucement pour la poser sur son épaule, tendrement. Le Harry du miroir sourit et se pencha vers lui.

Leurs gestes étaient... perturbants aux yeux de Harry. Il eut l'impression qu'une nuée de papillons se déployait dans son estomac, alors qu'il contemplait la proximité qu'il avait avec celui qui fut son ennemi.
A une époque, Harry aurait violemment réagi. Il aurait nié, se serait peut être mis en colère. Il aurait voulu oublier ce qu'il venait de voir et il aurait pris la fuite.

Le Harry du présent par contre contemplait le miroir fasciné. Il ne savait pas si ce qu'il voyait se produirait un jour. Ses enfants réconciliés et proches de lui... et Drago.
Hésitant, il leva la main comme pour la poser sur son épaule, comme pour recouvrir celle du fantôme dans le miroir vague réminiscence de sa première rencontre avec le miroir. Autrefois, il avait eu le même geste avec ses parents en reflet... Mais il avait fait son deuil depuis, il avait accepté leurs morts. Puis, avec un soupir, il se força à fermer les yeux et à se détourner de la relique.

Il ne pouvait pas nier que ce qu'il venait de voir l'avait grandement perturbé. Il résista à la tentation de se tourner pour vérifier que Drago était toujours à ses côtés, derrière lui, son insupportable sourire narquois aux lèvres. Comme si le blond connaissait un secret ignoré du commun des mortels.
Puis, il sortit de la pièce à grands pas, et la verrouilla soigneusement. Il ne faudrait pas qu'un élève ne découvre le miroir du Riséd et ne se perde dans les illusions que l'objet pourrait lui montrer.

Harry laissa tomber sa ronde. Il avait l'esprit en ébullition, et il ne verrait probablement pas un élève passer devant lui de toutes façons.
Il rentra dans ses appartements, et se laissa tomber dans un fauteuil. D'un coup de baguette, il attira à lui la bouteille de Whisky pur-feu pour s'en servir une généreuse rasade.

Il commençait juste à reprendre ses esprits, quand quelqu'un frappa à la porte. Avec lassitude, il se leva, abandonnant son verre sur la table.
En voyant son visiteur, ses yeux s'écarquillèrent, et son cœur se mit à battre à toute vitesse. Cependant, il s'écarta pour le laisser entrer.

C'était Drago Malefoy.

Famille recomposéeDonde viven las historias. Descúbrelo ahora